Festival d’Israël : Prestation émouvante de 4 jeunes talents touchés de plein fouet par le 7 octobre
Le premier spectacle de "The Music People", qui aura lieu chaque année entre Jérusalem et le sud en signe de solidarité, s'est tenu dans le Neguev ; L'une des chanteuses est la petite-fille d'un otage assassiné
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »
Des adolescentes, musiciennes amatrices, ont donné une incroyable performance vocale, jeudi soir, avec les artistes israéliens à l’affiche de The Music People. Ce projet issu du 7 octobre fait partie du Festival d’Israël cette année.
Normalement, le Festival d’Israël se déroule en totalité à Jérusalem, mais il se passe cette année également pour partie dans le Neguev, en témoignage de solidarité avec cette région qui porte encore les profonds stigmates du pogrom perpétré par le Hamas le 7 octobre.
« C’est la première fois que nous organisons le Festival d’Israël en dehors de Jérusalem », a expliqué Eyal Sher, le directeur du festival, au début du spectacle, avant de demander au public de lever la main pour savoir combien de personnes vivaient dans la région et combien venaient d’ailleurs. C’était moitié-moitié.
Sher a poursuivi en disant qu’ils avaient vendu toutes les entrées du premier spectacle et en avaient ajouté un deuxième ; le premier spectacle a eu lieu à 17h30, devant un public composé de jeunes familles et d’amis de lycée des jeunes chanteuses, venus en bus depuis la mer Morte, là où nombre d’entre eux ont été évacués après le 7 octobre.
« Nous sommes ici en témoignage de solidarité avec le Sud », a ajouté Sher. « Nous espérons redonner une lueur d’espoir. »
Ce spectacle, qui sera également à Jérusalem le 18 septembre, a eu lieu dans l’auditorium du kibboutz Dorot, à dix minutes en voiture de Sderot et d’une communauté évacuée quatre mois durant, après le 7 octobre, mais qui n’a pas été détruite par l’attaque grâce à l’action courageuse de la brigade d’urgence de la communauté.
Les quatre chanteuses amatrices – Talia Dancyg, Yaara Cohen, Imri Sharif et Agam Jeremy Bitton – sont montées ensemble sur scène pendant près de deux heures, chacune d’entre elles interprétant une chanson écrite et enregistrée ces tout derniers mois. Les ont rejoints quatre artistes bien connus du public, à savoir Alon Eder, Alma Gov, Marina Maximilian et Karolina, ainsi que Tom Guedj au violoncelle, Adi Rennert au clavier et bien d’autres.
(Pour le concert du 18 septembre, c’est le guitariste et chanteur Berry Sakharof qui se produira à la place de Marina Maximilian, avec à la batterie Tuval Haïm, dont le frère Yotam Haïm a été pris en otage du kibboutz Kfar Aza et tué accidentellement par les soldats israéliens le 15 décembre.)
Chacune de ces artistes amatrices avait été intelligemment associée à un artiste chevronné, grâce à Yuval Shafrir et Chaim Shemesh, les producteurs à l’origine du projet dès les semaines qui ont suivi le 7 octobre.
Lui-même percussionniste, Shafrir s’est produit sur scène jeudi soir en présentant rapidement « Les quatre merveilles », ainsi que ses collègues musiciens partenaires.
Tout cela a donné lieu à un spectacle des plus émouvants qui a plus d’une fois tiré des larmes à son public, entre deux tours de chants plus doux reprenant des standards israéliens des années 1970, parfois interprétés en duo.
Tout au long de ce spectacle, les adolescents dans le public ont repris à voix basse les paroles des chansons des jeunes artistes – leurs amies – qu’elles connaissaient manifestement bien.
Les quatre jeunes filles, encore adolescentes, ont, chacune à leur manière, été marquées de plein fouet par l’attaque du Hamas : Talia Dancyg y a perdu son grand-père, Alex Dancyg, 75 ans, pris en otage au kibboutz Nir Oz et tué en captivité à Gaza. Elle donne par ailleurs de la voix pour exiger la conclusion d’un accord pour faire libérer les otages.
Yaara Cohen, 16 ans, a elle été évacuée avec sa famille du Moshav Ein Habesor, dans le sud : son professeur de musique, Shlomo Mathias, a été tué le 7 octobre avec sa femme alors qu’il protégeait leur jeune fils. Imri Sharif, 17 ans, a quitté le kibboutz Gesher HaZiv, situé en Galilée occidentale, avec sa famille en octobre pour s’installer à Tel Aviv.
Agam Jeremy Bitton, 18 ans, est elle originaire du Moshav Gilat, dans le Neguev occidental : sa famille a décidé de rester pour aider la communauté, qui a elle-même subi ses pertes.
Les quatre jeunes filles ont mis leur voix, talents et émotions au service de ce spectacle : elles se sont rapidement présentées avant d’interpréter leur morceau et de faire un duo avec un artiste tête d’affiche.
Sharif a souri timidement à Alon Eder avant leur solo, qui a donné lieu à un final avec toutes les jeunes filles. Cohen, qui avait interprété son titre « Grapefruit Tree », dédié à son professeur de musique bien-aimé, en début d’année à la Bibliothèque nationale avec Sakharov, a à plusieurs reprises pris Alma Gov dans ses bras sur scène.
Bitton, avec ses airs résolument jazzy, a donné une incroyable prestation lors de son duo avec Maximilian, le pianiste et chanteur de jazz russo-israélien de formation classique qui n’a pas arrêté de lui sourire pendant leur morceau commun.
Dancyg, qui souriait là sans doute pour la toute première fois depuis des mois, après l’angoisse de la captivité puis la tristesse de la mort de son grand-père, était ravie d’être sur scène avec Karolina, chanteuse principale de Habanot Nechama, avec laquelle elle partage un goût prononcé pour la soul-reggae.
« Apprends-moi à faire comme Talia », a dit Karolina en souriant à Dancyg, montée sur scène avec sa guitare acoustique, ses cheveux bruns ondulés lui tombant dans le dos, vêtue d’un t-shirt noir revêtu de l’inscription
« Ramenez-les à la maison », allusion aux 101 otages encore aux mains des terroristes de Gaza.
Le public s’est laissé emporter par les sons et paroles de ces jeunes chanteuses, sur fond des stigmates du 7 octobre et images des otages, mentionnés par les musiciens sur scène et visibles sur les drapeaux, pancartes et panneaux affichés le long des routes et dans les communautés de cette région meurtrie.
La troisième représentation de The Music People aura lieu à Jérusalem, le 18 septembre prochain : les billets sont disponibles en ligne.
Pour découvrir la liste des événements du Festival d’Israël dans le Neguev et à Jérusalem, consultez le site Internet du festival.
N’hésitez pas à venir voir l’exposition « Windless » et les instruments à vent créés par l’artiste Yaniv Shenzer à partir de morceaux de roquettes tirées sur Israël. Visible, dans un premier temps, au studio de danse Adama de Sderot, l’exposition se transportera au Théâtre de Jérusalem, les 26 et 27 septembre prochains.