Festival du film israélien : « Manque de chance, Miri Regev a débarqué à Paris »
Après l'annulation de la présence d'Israël à l'ouverture du festival, sa directrice, Hélène Schoumann, s'inquiète pour la liberté d'expression

Elle est « étonnée », et un peu « triste ». Mais surtout, Hélène Schoumann, la directrice du Festival du film israélien à Paris, trouve qu’on en fait beaucoup autour de ce « boycott » (elle déteste ce mot qui lui rappelle les campagnes BDS). Elle soupire : « Se boycotter entre nous, franchement ! »
« En fait, c’est une tempête dans un verre d’eau. Tous les journaux en parlent, mais nous auraient-ils appelé pour parler de la programmation du festival si Miri Regev n’avait pas pris la décision qu’Israël n’assiste pas à l’ouverture du festival parce que le film Foxtrot y était programmé ».
Pour que l’ambassadrice d’Israël en France Aliza Bin Noun soit présente à l’ouverture du festival, il s’en est joué de peu.
« J’avais déjà reçu la subvention du ministère des Affaires étrangères et l’à-valoir de l’ambassade. L’ambassadrice m’avait même déjà écrit un édito, tout allait bien. Mais manque de chance, Miri Reguev débarque à Paris, elle voit son ambassadrice et lui dit ‘tu ne vas pas au festival’ « .
Dés sa sortie en Israël, la ministre de la Culture Miri Regev avait choisi le film de Samuel Maoz comme « bouc-émissaire, » estime Schoumann.
« Il est scandaleux que des artistes israéliens contribuent aux incitations destinées à la jeune génération contre l’armée la plus morale du monde, en propageant des mensonges en guise d’art, » avait écrit Regev dans un communiqué, lors de la sortie de Foxtrot, en septembre dernier.
Elle avait accusé Samuel Maoz, le réalisateur de FoxTrot de donner « un coup de main au BDS [mouvement de boycott d’Israël] et à ceux qui haïssent Israël dans le monde entier », et appelé l’Etat à cesser de financer des films qui « deviennent une arme de propagande pour nos ennemis. »
Regev, qui a été la porte-parole de l’armée israélienne, pointe du doigt une scène du film en particulier, qui montre des soldats israéliens tuer et enterrer une famille arabe.
« Mais ce film a quand même reçu un Lyon d’argent à Venise, il était présent dans la compétition des Oscars pour le prix du meilleur film étranger ! argumente Hélène Schoumann. De plus, je l’ai vu ce film, je n’y ai rien vu de choquant. C’est un film sur le deuil, avec des scènes oniriques, comme lorsque le soldat danse avec son fusil au checkpoint. Je prends ça pour une fable. D’autres films beaucoup plus critiques n’ont pas suscité autant de bruit en Israël. Je pense à Valse avec Bachir, à Lebanon, et, en remontant plus loin, à La vie selon Agfa du fils de Moshe Dayan. Dans la programmation même de notre festival cette année, il y a des documentaires bien plus durs ».
« Mais Reguev a décidé d’en faire son bouc-émissaire. En Israël, les gens disent qu’elle ne l’a même pas vu, » affirme-t-elle au Times of Israël.
« Je trouve qu’il y a un glissement vis-à-vis de la liberté d’expression, » conclut Hélène Schoumann qui a trouvé de la consolation dans les « multiples soutiens » qu’elle a reçus.