Israël expulse une travailleuse philippine et son fils né en Israël
Rosemary Peretz et son fils de 13 ans Rohan ont été embarqués à bord d'un avion avec un garde ; il s'agit de la première famille avec des enfants d'âge scolaire à être expulsée
Une travailleuse étrangère philippine et son fils adolescent né en Israël ont été expulsés de force d’Israël lundi soir, après que plusieurs appels à la cour ont échoué.
Rosemary Peretz et son fils Rohan ont été placés à bord d’un avion et expulsés sous la surveillance d’un garde, au lendemain d’une première tentative avortée, quand la mère a protesté dans l’avion.
La Cour d’appel de Tel Aviv a rejeté dimanche leur appel.
Peretz a été arrêtée par des agents de l’immigration avec son fils jeudi, car son visa de travail était arrivé à expiration, a expliqué Sabine Haddad, porte-parole de l’Autorité de la population et de l’immigration, à l’AFP. « Elle est ici illégalement depuis 10 ans », a précisé Haddad.
Il s’agit là de la première fois qu’une famille d’âge scolaire est expulsée de force, après une série d’arrestations ces dernières semaines. Près de 100 travailleurs étrangers ont été arrêtés – des Philippins pour la plupart.
Les avocats Carmel et Boaz Ben Tzur ont fait appel de cette décision.
Rohan Peretz, qui fréquente l’école Bialik Rogozin dans le sud de Tel Aviv, souffrait de « difficultés sociales et psychologiques » pour lesquelles il a reçu un traitement et a fait l’objet d’un suivi, ont déclaré les avocats.
« Plus jeune, il a fréquenté un programme d’éducation spécialisé, et l’an dernier, il a bénéficié d’un traitement psychologique de la part d’un centre de santé mentale du ministère de la Santé. Selon l’avis des prestataires de soin du centre – des autorités reconnues par l’Etat d’Israël – un déménagement pourrait causer des dégâts irréparables », indiquait l’appel émis par les avocats.
Les avocats ont également indiqué qu’une injonction temporaire pour éviter l’expulsion du jeune garçon serait appropriée, au regard de sa vulnérabilité.
« L’expulsion d’un garçon de 13 ans, né en Israël et qui y a vécu toute sa vie, est inacceptable », a-t-il dit.
Les activistes estiment qu’il est cruel de renvoyer Rohan – ainsi que d’autres enfants – vers un pays qu’ils ne connaissent pas et dont ils ne parlent pas la langue.
Un travailleur social, qui a rédigé un rapport sur le cas du jeune garçon, a écrit que « son transfert vers les Philippines, à un stade aussi critique de son développement, et le fait de le sortir de son environnement familial, causera probablement des dégâts irréversibles et une réaction comportementale sévère », a rapporté le site Ynet.
Un rapport de l’Autorité de la population et de l’immigration indique au contraire que « l’enfant a grandi en Israël mais qu’il a été élevé selon les valeurs culturelles philippines. Il se considère comme appartenant à un sous-groupe au sein de l’Etat. Sa mère l’a élevé et a renforcé ses liens avec les membres de sa famille. L’existence d’une famille élargie [aux Philippines] devrait faciliter l’arrivée et l’intégration du mineur aux Philippines, de façon favorable. »
Rosemary Peretz, 42 ans, est arrivée dans le pays en 2000 pour y travailler dans la prestation de soins. Sept ans plus tard, son employeur est décédé et elle est restée illégalement en Israël. Elle a travaillé comme employée de ménage ces dernières années. Elle n’a pas quitté Israël après sa période d’emploi légale parce qu’elle voulait y élever son fils. Elle dit ne pas avoir de famille proche aux Philippines, et que le père de l’enfant est un ressortissant turc, qui est retourné en Turquie.
Depuis leur arrestation mardi, la mère et le fils ont été placés dans un centre de détention situé à l’aéroport Ben Gurion.
Dimanche soir, ils ont été embarqués à bord d’un vol El Al, mais ont été débarqués après des protestations, selon des militants. Un politicien israélien a déclaré qu’ils n’avaient pas encore épuisé tous les appels à ce stade.
Il s’agit de la troisième famille avec des enfants en âge d’être scolarisés à avoir été arrêtée ces dernières semaines. Les deux autres familles mènent une bataille juridique pour éviter l’expulsion.
La semaine dernière, des migrants, leurs enfants et des Israéliens ont organisé des manifestations à Tel Aviv contre la politique d’expulsion des enfants de migrants nés en Israël.
L’expulsion des travailleurs étrangers, qu’elle soit volontaire ou contrainte, a été vivement critiquée en raison de son impact sur les enfants nés dans le pays, qui ont passé des années dans le système israélien.
En vertu de la loi israélienne, les travailleuses étrangères qui tombent enceintes doivent renvoyer leur bébé dans leur pays d’origine, afin d’obtenir un renouvellement de visa. Mais beaucoup ne le font pas et restent illégalement dans le pays en effectuant des travaux subalternes, en vue d’offrir à leurs enfants une vie meilleure que celle qu’ils auraient eue dans leur pays d’origine.
Quelque 60 000 travailleurs étrangers – principalement des femmes – sont actuellement employés en Israël, selon la Hotline for Migrant Workers, une organisation de défense des droits des migrants. La moitié d’entre eux provient des Philippines, 15 % du Népal, 10 % d’Inde, 10 % du Sri Lanka et 10 % de Moldavie, et le reste est originaire de pays d’Europe de l’Est.
L’AFP a contribué à cet article.