Israël n’a pas mis en œuvre les mesures promises pour renforcer l’AP avant le Ramadan
Des responsables disent que Jérusalem n'a ni baissé les taxes imposées sur le carburant, ni augmenté ses versements ni ouvert la liste des importations exonérées de taxes
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
WASHINGTON – Le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu n’a pas encore donné suite à une série de mesures visant à renforcer l’Autorité palestinienne, qu’il avait pourtant promis de mettre en œuvre avant le Ramadan, qui a débuté la semaine dernière.
À la mi-février, le cabinet de Netanyahu avait annoncé son intention d’abaisser de trois à 1,5 % la « taxe bleue » prélevée sur l’Autorité palestinienne pour les transferts de carburant, d’augmenter la part des versements faits à Ramallah sur la base des frais facturés aux voyageurs passant par le poste frontalier d’Allenby, situé entre la Cisjordanie et la Jordanie et d’allonger la liste des importations hors taxes faites au nom de l’Autorité palestinienne.
Cette semaine, quatre responsables israéliens, palestiniens et américains ont déclaré au Times of Israel qu’aucune de ces trois annonces n’avait été suivie d’effets.
Ce manque de suivi inquiète de plus en plus l’administration Biden, car la situation financière de l’AP est au plus bas, explique un haut responsable américain.
« Même les promesses les plus minimes que Netanyahu nous a faites n’ont pas été tenues », déplore un haut responsable de l’AP, qui a souhaité garder l’anonymat.
L’AP et les responsables américains critiquent particulièrement le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, dont les services sont supposés autoriser ces mesures, ce qu’ils n’ont pas fait.
Le cabinet de Smotrich n’a pas souhaité faire de commentaires sur ce point.
Un responsable israélien a fait savoir que les mesures promises par le Premier ministre devaient être examinées par le ministère des Finances, alors que la demande de l’AP remonte déjà à plusieurs années.
Un deuxième responsable israélien a déclaré que les mesures étaient à un stade avancé de mise en œuvre.
« Chacune avance à un rythme différent, mais ce sont des engagements pris par le Premier ministre, que tous ses ministres vont [mener à bien]. »
Rembourser l’AP ?
Début mars, le ministre des Affaires civiles de l’AP et secrétaire général de l’OLP, Hussein al-Sheikh, déclarait au Times of Israel qu’Israël s’était engagé, lors d’un sommet régional le 26 février à Aqaba, à transférer des millions de dollars de recettes fiscales qu’il avait retenus de l’AP.
« Ils ont promis à Aqaba qu’ils transféreraient les fonds, mais pour l’instant, nous n’avons rien vu », déclarait al-Sheikh dans une interview exceptionnelle accordée à un média israélien.
Cet engagement à transférer les recettes fiscales retenues ne figure pas dans le communiqué conjoint que les parties ont signé et rendu public, après une réunion de responsables israéliens, palestiniens, américains, égyptiens et jordaniens en Jordanie.
Il s’agissait du tout premier événement politique de cette nature depuis des années.
S’agissant des recettes fiscales, le haut responsable de l’AP a déclaré qu’il y avait actuellement « des millions de nos [dollars] détenus par la partie israélienne, qui a promis de nous les remettre, avant Aqaba et lors du sommet lui-même ».
Le conseiller à la sécurité nationale Tzachi Hanegbi, qui a dirigé la délégation israélienne à la réunion d’Aqaba, avait réagi aux propos d’al-Sheikh en déclarant que la question des recettes fiscales « n’avait pas du tout été abordée [à Aqaba]. Elle sera évoquée à l’avenir par le comité civil créé lors de la réunion [d’Aqaba]. »
Un responsable israélien a déclaré jeudi au Times of Israel que le comité civil ne s’était pas encore réuni, mais a précisé que les versements avaient été effectués.
Le cabinet de Smotrich l’a également confirmé tout en précisant qu’Israël retenait des millions de shekels sur chaque versement mensuel, en compensation des allocations versées par l’AP aux terroristes et à leurs familles.
D’autres réclamations de l’AP concernant des sommes qui lui sont dues seront évoquées lors du comité civil conjoint israélo-palestinien, a déclaré le responsable israélien, sans toutefois en préciser la date.
Le responsable américain a déclaré que plusieurs pays avaient demandé à Israël de mettre en œuvre les mesures de nature à renforcer l’AP, lors du sommet régional de suivi à Charm el-Cheikh, en Égypte, la semaine dernière, mais que « les progrès semblaient minimes ».
L’AP est également pressée de respecter ses propres engagements en ce qui concerne l’intensification de la présence de ses forces de l’ordre dans le nord de la Cisjordanie, devenue un foyer de groupes terroristes palestiniens, ont rappelé les responsables américains et israéliens, ajoutant que Ramallah était également pressé de condamner publiquement les attentats anti-Israéliens.
Selon le responsable américain, les représentants américains, égyptiens et jordaniens à Aqaba et à Charm el-Cheikh ont également souligné l’importance pour les ministres israéliens et palestiniens de s’abstenir de toute provocation verbale.
Ce qui a été fait
Les trois mesures destinées à renforcer l’Autorité palestinienne n’ont pas encore été mises en œuvre, mais d’autres sont entrées en vigueur pour augmenter les moyens de subsistance des Palestiniens avant le Ramadan.
Dans une déclaration en date du 20 mars, la liaison de l’armée avec les Palestiniens – le Coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires (COGAT) – a déclaré que les femmes palestiniennes de tous âges ainsi que les enfants jusqu’à l’âge de 12 ans et les hommes de plus de 55 ans originaires de Cisjordanie seraient autorisés à entrer en Israël pour prier à la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, le vendredi, même sans permis.
S’agissant des Palestiniens de la bande de Gaza, un nombre non précisé de Palestiniens sera autorisé à se rendre à Jérusalem du dimanche au jeudi pendant toute la période du Ramadan.
Le COGAT a déclaré que ces permis seraient accordés aux femmes de plus de 50 ans et aux hommes de plus de 55 ans.
Il a par ailleurs ajouté que les visites de Palestiniens de Cisjordanie à des membres de leur famille en Israël devaient être autorisées, tout comme les visites d’étrangers aux Palestiniens de Cisjordanie.
Les Palestiniens de Cisjordanie ont également reçu l’autorisation de se rendre à l’étranger pour Ramadan en empruntant des vols au départ de l’aéroport Ramon.
Israël avait déjà autorisé les Palestiniens à emprunter cet aéroport, situé dans le sud d’Israël, en août dernier.
Le COGAT a ajouté que, pendant la durée du Ramadan, les heures d’ouverture des différents points de passage et points de contrôle à destination et en provenance de la Cisjordanie seraient étendues.
Allenby ouvrira, lui, plus longuement à partir de dimanche prochain.
Ce dimanche donc, Israël commencera à exploiter le passage d’Allenby à quasi temps plein, au terme d’un an de pressions de l’administration Biden, a révélé un porte-parole de l’Autorité aéroportuaire au Times of Israel.
Le passage ouvrira du dimanche à 8 h au vendredi, 15 h 30 : le samedi, il sera ouvert de 8 h à 15 h 30.
Du 6 au 10 novembre, un programme pilote a permis de tester la capacité du passage à fonctionner à toute heure du jour après des années d’exploitation suivant des horaires limités, générateurs de longues files d’attente pour des piétons presque exclusivement palestiniens.
L’attente pour entrer en Jordanie peut durer des heures voire une journée entière, ce qui constitue une véritable difficulté pour les Palestiniens qui ne sont pas autorisés à emprunter l’aéroport Ben Gurion.
Ils n’ont d’autre choix que de passer par l’aéroport jordanien d’Amman, mais ils doivent s’acquitter de frais pour passer la frontière.
L’extension des horaires d’ouverture d’Allenby a été reporté à plusieurs reprises, s’attirant la colère de l’administration Biden qui avait annoncé au cours de l’été dernier que le passage serait ouvert en continu, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, dès septembre.
Les autorités israéliennes avaient informé leurs homologues américains être dans l’impossibilité de respecter cette échéance et proposé l’idée d’un programme pilote, à partir de novembre.
Cet essai a été concluant et l’Administration aéroportuaire s’efforce depuis de recruter les personnels nécessaires à la tenue de ces nouveaux horaires.