“La force des liens faibles” : des chercheurs d’Israël, d’Iran et de Syrie unissent leurs forces
Avec du vin, des ballades et des débats, les chercheurs ont participé à un rassemblement à Fontainebleau dans le but de stimuler les “économies de paix”
Loin de leur pays d’origine au Moyen Orient, un groupe de 30 chercheurs iraniens, syriens, égyptiens, émiratis, tunisiens, marocains, turcs et israéliens spécialisés dans le domaine de l’entrepreneuriat commercial se sont réunis le mois dernier pendant deux jours et demi pour participer à un atelier dans le cadre idyllique de l’école de commerce INSEAD à Fontainebleau, en France.
Leur objectif : mettre en place des projets de recherche conjointe qui favorisent la gestion stratégique et l’esprit d’entreprise au Moyen Orient tout en stimulant la tolérance, la collaboration et l’établissement de la paix.
Dans ce magnifique cadre, ils ont parlé, mangé, débattu, étudié et échangé des idées. Mais ils ont également eu le temps de flâner ensemble dans les jardins de l’école de commerce, ont eu l’occasion de se promener dans des voitures tirées par des chevaux, de respirer les odeurs de pelouses fraîchement tondues, de visiter ses châteaux et de faire de la barque sur le lac du domaine.
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La nourriture était bonne, le vin réconfortant. Cependant, le but principal était d’apprendre à se connaitre, non pas en tant qu’adversaires de parties opposées dans le sanglant conflit israélo-palestinien, mais plus tôt en tant que chercheurs ayant des intérêts, des passions et des objectifs communs.
« L’idée est de faire correspondre les chercheurs israéliens avec des collègues arabes dans le domaine de l’esprit d’entreprise et de la stratégie » et finalement voir leur recherche conjointe conduire à un document publié sur le sujet relatif au Moyen Orient, a déclaré Niron Hashai du Centre Asper pour l’entrepreneuriat de l’université hébraïque de Jérusalem, l’un des organisateurs du rassemblement.
Les autres organisateurs de l’atelier 2017 pour l’Initiative pour une collaboration académique au Moyen Orient et en Afrique du Nord (IACMENA) qui a eu lieu du 28 au 30 avril, venaient de l’INSEAD, l’école de commerce, du Strategic Management Society, une société de recherche qui regroupe plus de 3 000 membres de 80 pays différents, et de l’Institut de recherche Harry S. Truman pour l’avancement de la paix de l’université hébraïque de Jérusalem. Le professeur de l’INSEAD Ithai Stern était à l’origine du rassemblement.
« L’idée est de relier les Israéliens et les Arabes qui n’ont pas la chance de se rencontrer en général en raison des boycotts et de la politique », a précisé Menahem Blondheim, responsable de l’Institut Harry S. Truman, lors d’une interview téléphonique. Le dialogue et le travail en commun sont importants pour promouvoir l’économie de la paix, promouvoir l’économie de la région et créer un terrain plus fertile pour la recherche scientifique.
« Il existe une force des liens faibles, a affirmé Blondheim. Quand vous travaillez ou rencontrez les mêmes personnes, cela devient très différent quand vous commencez à travailler et à rencontrer des personnes de milieux différents. Cela ouvre la porte à de nouveaux mondes. »
C’est la deuxième fois qu’une telle initiative était organisée. La première réunion de ce type a été organisée à Cambridge un an plus tôt avec des participants plus jeunes. Cette année, les participants étaient principalement des professeurs. Aucun document commun sur l’événement de l’année dernière n’a été publié, a indiqué Hashai, mais des travaux sont encore en cours sur les recherches effectués.
Le rassemblement de cette année a débuté avec un repas commun. « Au début, il y avait des hésitations et de la suspicion parce que nous ne nous connaissions pas, mais au bout d’un quart d’heure, nous étions amis », a expliqué Hashai.
Le format des sessions d’étude était unique pour un forum académique. Elles étaient très axées sur des objectifs avec des délais serrés, a ajouté Hashai. Les chercheurs ont été associés les uns aux autres en fonction de leurs domaines de recherche. On leur a donné une limite de temps pour choisir le sujet de leur recherche conjointe, définir leur théorie, exposer l’hypothèse et présenter leur travail aux autres participants à la fin de l’événement.
« Nous avons travaillé comme pour un hackathon, a indiqué Hashai. Je suis sûr que ma recherche avec mon collègue turc, sur l’effet des fondateurs sur l’efficacité des dépenses en recherche et développement dans les entreprises, produira un papier, et peut-être près de 50 % des autres recherches aussi », a-t-il estimé.
Parmi les sujets proposés par l’atelier, a été étudié l’impact d’une réforme de 2017 sur l’emploi palestinien en Israël. Cette étude vise à contester le postulat dominant, que la couverture médiatique négative entraîne une performance négative. Une autre étude examinait comment les entreprises appartenant à des minorités ethniques peuvent devenir plus tenace.
Convaincre les chercheurs à se joindre à l’initiative n’était pas facile, a déclaré Hashai. Beaucoup des invités ont refusé de venir, de crainte des réactions dans leur pays d’origine, dont beaucoup n’ont pas de relations diplomatiques avec Israël.
Ceux qui ont accepté, cependant, sont rentrés dans un projet à long terme. Tous les participants ont accepté de voir leur nom apparaître sur les articles communs, a précisé Hashaïd. « Il fallait être soit complètement dans l’initiative, soit ne pas y participer », a-t-il souligné.
Un important argument en faveur du programme a été l’accès à des spécialistes de divers domaines pertinents qui ont été invités pour servir de mentors et de conseillers auprès des équipes de recherche. Cela a également aidé beaucoup de participants à travailler dans des universités en dehors de leur pays d’origine, a ajouté Hashaïd.
Pour cet article, seuls les chercheurs israéliens ont accepté d’être interrogés à visage découvert, d’autres participants ont préféré que leurs noms et leurs photographies ne soient pas publiés pour protéger leur vie privée.
Cependant, pour ceux qui ont travaillé ensemble, les différences culturelles ne se sont pas fait sentir, a affirmé Hashaïd.
Pour le dernier dîner en commun, les organisateurs ont demandé à un chef franco-libanais de préparer une variété de kebabs, de feuilles de vigne, d’agneau grillé et d’autres viandes, salades et pains du Moyen Orient. « Nous avons adoré la nourriture française que nous avons mangé pendant tout l’événement, a déclaré Hashai. Mais quand nous avons vu toute cette nourriture libanaise délicieuse, tout le monde était heureux parce que c’est la nourriture que nous aimons et nous avons tous eu le sentiment d’être à la maison. »
« Ce que nous faisons représente une goutte dans l’océan, mais nous voyons des progrès au fur et à mesure que de plus en plus de gens sont prêts à se joindre à l’initiative. Et quand ils viennent, ils voient que la personne de l’autre côté du conflit ou des barrières n’est qu’un autre chercheur comme lui », s’est réjoui Hashai.
« Nous ne parlons pas de politique mais de notre travail et de nos objectifs. C’est une très belle façon de briser les murs entre nous. Les chercheurs sont un petit groupe dans un petit monde, mais chaque petit pas dans la bonne direction est en fait un grand pas. »
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