L’affrontement sanglant de Qalandiya souligne le danger de compter sur Waze
Beaucoup de conducteurs aiment allumer l’application de navigation et déconnecter leurs esprits, mais les experts disent que la confiance mal placée dans la technologie a un prix
Après que deux soldats israéliens se sont perdus tard lundi soir, déclenchant des affrontements à Qalandiya qui ont entraîné la mort d’un Palestinien et des blessés des deux côtés, certains se demandent pourquoi le duo avait placé tant de confiance dans l’application de navigation Waze, ce qui les a menés dans le camp de réfugiés.
Qalandiya est dans la zone A de Cisjordanie, où l’Autorité palestinienne exerce un contrôle civil et sécuritaire. Les forces de défense israéliennes entrent occasionnellement dans la zone pour mener des raids d’arrestation, mais la règle est que l’entrée est absolument interdite aux citoyens israéliens.
Les soldats non combattants qui sont entrés dans le camp tard lundi soir ont été dirigés là-bas par Waze, et auraient pu voir les panneaux routiers qui disaient « Vous entrez maintenant en zone A » et prévenaient ainsi du danger. Dans le camp de réfugiés, leur véhicule militaire a été bombardé de cocktails Molotov et de pierres, poussant les soldats à fuir et nécessitant une opération de sauvetage, pendant laquelle des soldats et des Palestiniens ont échangé des coups de feu.
La compagnie Waze, un outil de carte et de navigation achetée par Google pour plus d’un milliard de dollars en 2013, a répondu mardi aux suggestions selon lesquelles ses directions avaient trompé les soldats, affirmant que les soldats étaient responsables.
« Waze comprend une option par défaut spécifique qui empêche les routes des zones qui sont marquées comme dangereuses ou interdites aux Israéliens d’être activées, a déclaré la compagnie dans un communiqué. Dans ce cas, l’option était désactivée. De plus, le conducteur a dévié de la route suggérée et en conséquence, est entré dans la zone interdite. »
“Il y a également des panneaux rouges sur la route en question qui interdisent [aux Israéliens] l’accès aux territoires sous contrôle palestinien. Chaque conducteur a la responsabilité de respecter les panneaux routiers et les lois locales. »
Mais le technologiste Anderson Mccutcheon a déclaré au Times of Israël que l’erreur des soldats était un exemple d’une plus large tendance sociale à placer trop de foi dans la technologie, qui ne mérite pas nécessairement une telle confiance.
« La technologie est souvent ignorante de l’environnement social dans lequel elle est utilisée, » dit-il.
Sans savoir précisément ce qu’il s’est passé, Mccutcheon suggère que l’application a pu utiliser des données des utilisateurs israéliens et palestiniens et donc suggérer une route qui aurait été parfaitement sûre pour un Palestinien mais pas pour un soldat israélien.
« Ce n’est pas quelque chose qui est spécifique à Waze mais est une conséquence de chaque plateforme qui est utilisée par beaucoup de personnes, et pour chaque personne l’utilisation peut être extrêmement différente, dit-il. Pour un Palestinien, le cas de l’utilisation est parfaitement sûre et est une fonction quotidienne, et pour une autre personne il peut être extrêmement dangereux ou complètement illégal. »
McCutcheon dit que, au final, l’utilisateur est responsable : « la responsabilité était sur les soldats, de ne pas utiliser Waze ou de vérifier deux fois. Vous ne pouvez pas faire confiance à une plate-forme pour votre sécurité ou voter légalité. »
Néanmoins, les sources ont révélé que les soldats utilisaient souvent Waze dans des situations non opérationnelles.
Bryan Seely, un expert en cyber-sécurité de Seattle et ancien Marine américain, dit que quand il s’agit d’unités militaires, « j’espèrerais qu’ils ne comptent pas sur une technologie civile qui peut être surveillée et potentiellement tracée. Ils devraient utiliser un GPS militaire ou des cartes, pas un iPhone ou un appareilcellulaire personnel. »
Seely, dont la spécialité est de trouver les bugs et les failles des algorithmes de Google et d’attirer l’attention du public dessus, et qui avait mis sur écoute les services secrets américains, dit qu’il y a partout une tendance dangereuse parmi les agents d’application de la loi à utiliser une technologie civile « parce que c’est si pratique, c’est la force de l’habitude ».
Une application basée sur la participation des utilisateurs, comme Waze, dit Seely, n’est pas nécessairement sûre à utiliser, particulièrement pour les forces de sécurité. Elle peut être sensible à la manipulation.
« Quand Google ne peut pas automatiser ou construire un algorithme, leur prochain choix est de compter sur la participation des utilisateurs. Je ne pense pas que Waze puisse être manipulée de cette manière [diriger les utilisateurs dans une mauvaise direction], mais cela ne me surprendrait pas non plus. »
De plus, beaucoup d’utilisateurs ont déjà remarqué que la technologie de Waze était moins qu’infaillible.
« Waze se trompe, a écrit un utilisateur de Facebook. A l’occasion, elle vous emmène au mauvais endroit, mais ce qui m’ennuie c’est quand elle essaie de prendre des raccourcis qui vous font foirer, comme éviter le feu tricolore et attendre ensuite de vous que vous tourniez à gauche dans une des trois voies en plein embouteillage. Et ensuite parfois elle me surprend et propose une route exceptionnelle… J’ai arrêté de l’utiliser. »
L’AFP a contribué à cet article.
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