L’Agence juive appelle à la libre expression religieuse au mur Occidental
Dans sa première interview depuis son élection à la tête du conseil d'administration, Mark Wilf souligne la responsabilité des Juifs les uns envers les autres

Le nouveau président du conseil d’administration de l’Agence juive a déclaré que son organisation était la mieux placée pour organiser les pourparlers sur la question du mur Occidental, au moment où les courants non orthodoxes du judaïsme multiplient les appels à la reconnaissance de leurs droits sur le lieu saint, dans le sillage des récentes violences et manifestations contre leur présence.
« Je pense que tous les Juifs du monde devraient se sentir liés à l’État d’Israël, patrie ancestrale et État-nation non seulement des Israéliens, mais plus largement du peuple juif dans son entier. Les Juifs devraient se sentir autorisés à exprimer leur identité religieuse au Kotel [mur Occidental] comme ils l’entendent », a déclaré Mark Wilf au Times of Israel, dimanche, dans sa première interview depuis son élection.
« L’Agence juive peut être un forum, le lieu de rassemblement où tous les courants, toutes les composantes du Am Yisrael (le peuple juif) pourront débattre de tels sujets », a-t-il affirmé.
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Wilf, qui est promoteur immobilier, philanthrope et copropriétaire de l’équipe de football des Vikings du Minnesota, a été élu à l’unanimité par les 120 membres du conseil d’administration, organe parlementaire qui définit les politiques et le budget de l’organisation quasi-gouvernementale et approuve les nominations clés. Pour la première fois depuis deux ans, après une interruption due à la pandémie, le conseil d’administration s’est réuni dimanche et lundi dans le cadre très chic de l’hôtel Orient de Jérusalem.
Outre l’élection de Wilf, Doron Almog a été élu président de l’exécutif de l’Agence juive, après un an de recherches – parfois controversées – pour trouver un successeur à Isaac Herzog, ex-chef de l’organisation qui avait quitté son poste pour prendre la présidence d’Israël l’été dernier.
En sa qualité de président du conseil d’administration, Wilf aura une grande influence sur les politiques, le budget et les opérations de l’Agence. Son expérience à la présidence des Fédérations juives d’Amérique du Nord fait qu’il apportera toute sa connaissance et ses relations avec les groupes juifs d’Amérique du nord.
Wilf et Almog ont été élus à un moment crucial pour l’Agence juive, chargée de promouvoir et organiser l’immigration juive en Israël (aliyah). L’Agence supervise actuellement la plus grande vague d’immigration en Israël depuis une trentaine d’années, stimulée par l’invasion russe de l’Ukraine et la guerre civile éthiopienne.
Dernièrement, la Russie a menacé de restreindre les opérations de l’Agence sur son sol.
Le mur Occidental
La question du mur Occidental et les heurts parfois violents à la section égalitaire ont été évoqués et abondamment commentés lors de la réunion du conseil d’administration.
Le mois dernier, un groupe de jeunes, pour la plupart ultra-orthodoxes, a perturbé plusieurs cérémonies de bar et bat mitzvah organisées par des familles américaines dans la section égalitaire du mur Occidental, traitant les personnes présentes de « nazis » ou « d’animaux », dont ils n’ont pas hésité à déchirer les livres de prières.
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L’événement a suscité assez peu de réactions en Israël, mais a été largement dénoncé par les organisations juives américaines et internationales, au premier rang desquelles l’Agence juive, qui a appelé le gouvernement à agir.

« Les mots de réconfort ou de soutien ne suffisent pas : il faut des actions concrètes pour que les Juifs de tous les courants se sentent chez eux, en sécurité et bienvenus au Kotel et plus généralement en Israël », ont écrit les dirigeants de l’Agence juive, de l’Organisation sioniste mondiale, des Fédérations juives d’Amérique du Nord et de Keren Hayesod, Wilf y compris.
Il y a plusieurs années, l’Agence juive et son président de l’époque, Natan Sharansky, ont joué un rôle central dans la négociation du compromis du mur Occidental, en vertu duquel la place principale du mur devait continuer à opérer une ségrégation entre les sexes, conformément à la pratique orthodoxe, tandis que les courants non orthodoxes du judaïsme bénéficieraient d’une section égalitaire améliorée, assortie d’une représentation officielle dans le comité de gestion du lieu saint.
Le gouvernement a d’abord approuvé l’accord, en 2016, avant de le suspendre en raison des réticences des dirigeants haredim, dont certains avaient pourtant pris part aux pourparlers et conclu l’accord.
Le compromis est resté en suspens sous le gouvernement actuel, malgré des déclarations publiques initiales favorables à sa mise en œuvre effective, en raison de l’opposition, au sein de la faible majorité, d’une poignée de députés orthodoxes.
Wilf a refusé d’évoquer de manière détaillée la façon dont l’Agence juive aborderait la question avec le gouvernement israélien, se référant à une lettre adressée au Premier ministre, Yair Lapid, la semaine passée.
« Pour ce qui est des détails des délicats pourparlers en cours, je m’en tiendrai à la déclaration officielle de l’agence », a déclaré Wilf.
« Je prends ces fonctions, conscient du privilège, de l’honneur et des responsabilité qui m’incombent, et persuadé que ce n’est que collectivement que nous avancerons en tant que peuple », a-t-il déclaré.
Wilf, fils de survivants de la Shoah, a souligné la nécessité de parvenir à une meilleure « connaissance » entre Juifs d’Israël et de la diaspora.
« Je pense qu’il y a beaucoup à faire en la matière, et une de mes priorités sera de nourrir la relation Israël-Diaspora dans les deux sens.
Il est important que nous nous comprenions tous mieux », a-t-il ajouté.
Ex-Union soviétique et Éthiopie
Wilf et Almog entreront en fonction à un moment clef pour l’Agence juive, chargée d’importantes opérations d’immigration issues de l’ex-Union soviétique et d’Éthiopie.
Wilf a assuré qu’Almog et lui-même seraient rapidement opérationnels en raison de leurs relations étroites avec la direction actuelle.
« L’Agence juive dispose maintenant d’une base très solide dans tous ces domaines. Il n’y aura aucune discontinuité en termes de travail. La transition sera imperceptible, en toute transparence. Nous communiquons constamment », a-t-il expliqué.

Wilf a expliqué qu’Almog et lui s’étaient rencontrés pour la première fois en personne à l’occasion de la réunion du conseil d’administration. Maintenant qu’ils sont tous deux élus, Wilf a indiqué qu’ils commenceront à s’entretenir de l’avenir.
« Nous nous sommes d’abord connus via Zoom pour les entretiens de recrutement, et aujourd’hui nous nous sommes rencontrés en personne lors de la réunion du conseil d’administration. Nous allons nous entretenir dès aujourd’hui, et je serai régulièrement en contact avec Doron et [la PDG Amira Ahronoviz] ainsi que [le secrétaire général Josh Schwartz] et toute la direction. Ces entretiens vont commencer dès aujourd’hui », a-t-il déclaré.
Wilf a brièvement abordé les difficultés auxquelles l’Agence fait face en Russie, les autorités ayant menacé d’interdire les opérations de l’Agence juive sur son territoire.
« En définitive, les activités et programmes de l’Agence juive en Russie continuent à se dérouler comme prévu. Les questions soulevées par les autorités russes sont traitées dans le cadre de contacts continus. C’est ainsi que se déroulent nos activités. Le plus important est que les programmes et activités se poursuivent », a-t-il conclu.
Pour éteindre un incendie, il faut une caserne de pompiers
Ces dernières années, les dons de la communauté juive américaine à Israël ou à des causes israéliennes comme l’Agence juive se sont sensiblement réduits. Hanna Shaul Bar Nissim, chercheuse en philanthropie juive, considère que la baisse, amorcée vers 2009, tient à « une perception qu’Israël est moins dans le besoin, ainsi qu’à des préoccupations liées au conflit israélo-palestinien ».
Wilf, dont la famille a longtemps fait des dons à des causes juives, estime que la pandémie, la montée de l’antisémitisme aux États-Unis et la guerre en Ukraine ont ravivé le besoin d’organisations humanitaires.
« Pour éteindre les incendies, pour apaiser les crises, il faut des pompiers », a-t-il expliqué.
« Je pense que ces dernières années, la pandémie, la défense d’Israël, les actes antisémites qui frappent de nombreux foyers ont montré que la réponse collective était de loin la plus efficace », a-t-il assuré.
Wilf a ajouté que les dons à l’Agence juive avaient augmenté dans le sillage de l’invasion russe en février.
« Nous avons vu affluer des dizaines de milliers de nouveaux donateurs, des personnes qui s’étaient peut-être désengagées ou se sentaient moins concernées », a-t-il expliqué.
Wilf a précisé que l’Agence entendait diversifier la source de ses dons.
« Nous devrions essayer d’entrer en contact avec des groupes qui ne nous soutiennent pas encore », a-t-il déclaré. « Nous allons tendre la main à davantage [de communautés] que par le passé. Ce sera très certainement une de nos priorités. »
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