Le Golan en échange d’une aide militaire israélienne ?
L’opposant anti-Assad, Kamal Al-Labwani, veut proposer un accord de paix à l'Etat juif et provoque des remous dans son propre camp
Elhanan Miller est notre journaliste spécialiste des affaires arabes
Un haut responsable de l’opposition syrienne a proposé à Israël de renoncer aux revendications de son pays sur le plateau du Golan en contrepartie du maintien d’une zone d’exclusion aérienne israélienne renforcée sur le sud de la Syrie.
Kamal Al-Labwani, un dissident syrien et membre fondateur du Conseil national syrien, a déclaré la semaine dernière au quotidien Al-Arab à Londres que la Syrie avait perdu ipso facto le plateau du Golan et devrait commencer à envisager la possibilité d’utiliser ses revendications territoriales pour obtenir une aide militaire israélienne pour renverser le régime d’Assad.
« Tant que nous Syriens continuerons à croire en l’anéantissement d’Israël et des Israéliens, il est naturel qu’Israël continue de soutenir Assad qui n’a pas levé le petit doigt contre eux », a déclaré Labwani au quotidien arabophone. « Nous signerons la paix avec les Israéliens en définitive. Pourquoi le nier ? »
« Pourquoi ne pourrions-nous pas négocier la question du Golan plutôt que de perdre à la fois le Golan et la Syrie avec lui ? », a-t-il ajouté.
Labwani, un des fondateurs du parti d’opposition Union démocratique libéral, enfermé près d’une décennie dans les geôles syriennes entre 2001 et 2011, a proposé que les Etats-Unis transforment le plateau du Golan en « un parc international de la paix » et d’ouvrir ses sites touristiques au monde entier.
« Les colons qui souhaiteront rester pourront le faire, ceux qui préfèreront retourner en Israël ou ailleurs pourront partir. A l’instar des habitants [arabes] originaires du Golan, ils devront choisir entre le retour sur leurs terres et une compensation financière », a-t-il soutenu.
En contrepartie, l’Etat hébreu devra imposer une zone d’exclusion aérienne sur le sud de la Syrie, et utiliser ses systèmes de défense aérienne et ses missiles Patriot pour faire respecter une zone d’exclusion aérienne d’une superficie de 100 kilomètres carrés.
Une intervention militaire israélienne en Syrie n’est pas moins justifiée qu’une intervention de l’OTAN, explique Labwani.
Israël a pris le contrôle du plateau du Golan pendant la guerre des Six Jours en 1967. On estime à 120 000 le nombre de Syriens qui ont quitté le plateau après la guerre. Aujourd’hui, quelque 20 000 Druzes y résident. La plupart ont conservé leur nationalité syrienne.
Labwani suggère que les populations druzes et arabes d’Israël servent d’intermédiaires entre les autorités israéliennes et le peuple syrien.
Ces surprenantes déclarations n’ont pas reçu d’échos favorables auprès de l’opposition syrienne. Selon le quotidien jordanien Al-Arab Al Yawm, des dizaines d’opposants syriens ont signé une pétition contre Labwani, y compris Salameh Kaileh, Walid Al- Bunni et Fady Jomar.
Le nationaliste et expert arabe Abdel Bari Atwan a également accusé Labwani d’avoir offert à Assad « le plus beau cadeau possible pour le [quatrième] anniversaire de la révolution ».
Sur sa page officielle Facebook, Labwani rétorque à ces accusations en écrivant que le peuple syrien saura faire la différence entre ceux qui cherchent véritablement une issue constructive à la crise syrienne et « ceux qui capitulent face au régime iranien agressif et perfide. »