Le Liban appelle l’ONU à trouver d’autres financements pour le Tribunal spécial
Le TSL est tributaire des contributions volontaires des pays donateurs à hauteur de 51 % de son budget. Les 49 % restants sont financés par le Liban - en pleine crise économique
Le Premier ministre libanais sortant a appelé vendredi les Nations unies à trouver d’urgence d’autres sources de financement pour le Tribunal spécial pour le Liban (TSL), menacé de disparition faute de fonds en raison de l’effondrement économique du pays.
Mis en place en 2009 après une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, ce tribunal, qui siège dans la banlieue de La Haye (Pays-Bas), est chargé de juger les personnes accusées de l’attentat à Beyrouth qui avait coûté la vie à l’ancien Premier ministre, Rafic Hariri, et à 21 autres personnes en 2005.
« Tenant compte de la crise aiguë dont souffre actuellement le Liban », Hassan Diab a appelé dans une lettre le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, à « rechercher d’urgence d’autres sources de financement » pour le TSL.
Mercredi, ce tribunal avait dit qu’il risquait de disparaître d’ici fin juillet sans pouvoir mener à bien son mandat, en raison de graves difficultés financières liées à la pandémie et à la crise économique au Liban.
Le TSL est tributaire des contributions volontaires des pays donateurs à hauteur de 51 % de son budget. Les 49 % restants sont financés par le Liban, qui connaît sa pire crise économique depuis la guerre civile (1975-1990).
La Banque mondiale a affirmé mardi que l’effondrement économique du Liban risquait d’être classé parmi les pires crises financières du monde depuis le milieu du XIXe siècle.
Avec des coûts estimés à entre 600 millions et un milliard de dollars (entre 493 millions et 822 millions d’euros), le tribunal a rendu une condamnation et effectué trois procès.
Dans sa lettre, M. Diab affirme espérer que le tribunal continue d’exister, soutenant qu’une disparition du TSL aurait une « conséquence des plus douloureuses », car elle renverrait l’image « d’une justice fragmentée et incomplète ».
Sa missive intervient au lendemain de l’annonce par le TSL de l’annulation de l’ouverture du procès de Salim Ayyash, déjà reconnu coupable de l’attentat qui avait tué Rafic Hariri, le tribunal évoquant un « manque de fonds ».
Rafic Hariri, qui fut le Premier ministre libanais jusqu’à sa démission en octobre 2004, a été tué en février 2005, lorsqu’un kamikaze a fait sauter une camionnette remplie d’explosifs au passage de son convoi blindé à Beyrouth, provoquant la mort de 21 autres personnes et faisant 226 blessés.
Salim Ayyash, membre présumé du mouvement chiite libanais Hezbollah, a été condamné par contumace à la perpétuité l’année dernière pour cet « homicide intentionnel ». Les trois autres accusés dans l’affaire ont été acquittés.
Un nouveau procès de M. Ayyash devait s’ouvrir la semaine prochaine, cette fois concernant trois attentats ayant visé l’ancien chef du Parti Communiste libanais, Georges Haoui, tué le 21 juin 2005, l’ex-ministre Marwan Hamadé, blessé le 1er octobre 2004, et l’ex-ministre de la Défense Elias Murr, blessé le 12 juillet 2005.
Les familles des trois victimes ont déploré l’annonce de l’annulation du procès.
« Nous sommes tués deux fois : d’abord par l’assassinat (…) et ensuite par l’assassinat délibéré du procès », a asséné vendredi une femme prenant la parole au nom de la famille Haoui lors d’une conférence de presse.
« Si le tribunal ferme ses portes, la famille du martyr Georges Haoui poursuivra tous les responsables, au tribunal ou aux Nations unies, qui ont causé des retards dans notre affaire », a-t-elle affirmé.