Le maire adjoint de NY dénonce les « tropes antisémites » du Washington Post concernant Columbia
L'article du journal dit que des milliardaires juifs auraient usé de leur argent et pouvoir pour pousser le maire Eric Adams à prendre des mesures contre les étudiants protestataires
Un maire adjoint de New York s’en est pris au Washington Post pour un article qui, selon lui, reprenaient des tropes antisémites en suggérant que des milliardaires juifs ont fait usage de leur argent et de leur pouvoir pour influencer la manière dont les élus ont traité les étudiants manifestant contre Israël à l’université de Columbia.
Fabien Levy, qui a envoyé au Post un communiqué dans lequel il conteste l’article comme étant « complètement faux », a exprimé jeudi sur X qu’il avait été « choqué par l’enquête. »
« L’insinuation selon laquelle des donateurs juifs auraient secrètement conspiré pour influencer les agissements du gouvernement est un trope antisémite trop familier sur lequel le Washington Post aurait dû avoir honte d’enquêter, et encore plus de le publier », a-t-il écrit.
Levy a ajouté que « l’histoire est encore plus choquante que celle qui nous a été décrite initialement » et a précisé que les deux fois où la police a été appelée à Columbia, c’était à la « demande écrite spécifique de l’université de Columbia ».
L’article en question, publié jeudi, décrit les activités d’un groupe WhatsApp créé après le 7 octobre, dans lequel les participants, pour la plupart des milliardaires juifs, se seraient coordonnés pour discuter de la meilleure manière d’utiliser leurs ressources pour aider Israël à mener à bien sa bataille en matière de diplomatie publique à l’étranger.
« Les messages révèlent la manière dont certaines personnalités ont utilisé leur argent et leur pouvoir pour tenter de façonner l’opinion des Américains sur la guerre de Gaza, mais aussi les agissements des universitaires, des hommes d’affaires et des dirigeants politiques, y compris le maire de New York », peut-on lire dans l’article en question.
Exclusive: A group of billionaires and business titans working to shape U.S. public opinion of the war in Gaza privately pressed New York City’s Mayor Eric Adams (D) last month to send police to disperse pro-Palestinian protests at Columbia University. https://t.co/PWgvkAwVG0
— The Washington Post (@washingtonpost) May 16, 2024
Le groupe, appelé « Israel Current Events », aurait été créé par le magnat de l’immobilier Barry Sternlicht quelques jours après le 7 octobre et fermé au début du mois de mai. Une personne anonyme proche de Sternlicht aurait déclaré au Post que le groupe avait été fermé parce qu’il avait largement dépassé son objectif initial et que les participants initiaux n’étaient plus actifs depuis des mois.
L’objectif du groupe, tel qu’initialement défini par un membre du personnel de Sternlicht dans des messages envoyés par le groupe et consultés par le Post, était de « changer le narratif » afin d’aider Israël à mettre en œuvre sa stratégie de diplomatie publique.
Certains membres du groupe ont rencontré des responsables israéliens, notamment l’ancien Premier ministre Naftali Bennett et le ministre et membre du cabinet de guerrre Benny Gantz, pour des réunions informatives sur la manière dont ils pouvaient aider Israel. On apprend par ailleurs dans les messages du groupe que ses membres ont aidé Israël à organiser des projections du documentaire de 45 minutes réalisé par Tsahal sur les atrocités commises par le Hamas le 7 octobre, sur la base d’images filmées par des caméras de sécurité et des caméras corporelles de terroristes.
Ce documentaire, réalisé par Tsahal dans le cadre de la campagne de diplomatie publique d’Israël, a été montré à des journalistes et à des élus à travers le monde, et les membres du groupe ont contribué à organiser une projection à Harvard également.
En plus des efforts déployés pour aider la diplomatie publique israélienne, le Post allègue également que certains membres du groupe auraient fait des dons au maire de New York, Eric Adams, afin de le convaincre de faire appel à la police pour expulser les manifestants anti-Israël. L’article indique qu’ils auraient en outre usé de leur influence sur les dirigeants de Columbia pour les persuader de demander à Adams de faire appel à la police.
Selon les messages, les membres du groupe ont assisté à une réunion Zoom avec Adams le 26 avril, au cours de laquelle ils ont discuté de la possibilité de « faire des dons à Adams et d’utiliser leur ‘influence’ pour persuader la présidente de Columbia de laisser la police de New York revenir sur le campus, ainsi que de financer les ‘efforts déployés pour enquêter’ afin d’aider la ville ».
Bien qu’un lien permettant de faire des dons à la campagne d’Adams ait été partagé dans le groupe, le Post n’a pas été en mesure de confirmer combien de dons ont été faits par ses membres, ni quand ils ont été faits, si tant est qu’ils l’aient été.
Comme l’université est privée, la police de New York (NYPD) n’est autorisée à entrer à Columbia pour disperser les manifestations et arrêter les manifestants uniquement qu’à la demande de l’institution, et non à la seule demande du maire.
La NYPD a été appelée à Columbia pour disperser des manifestations à deux reprises en avril. La première fois, c’était le 18 avril, un jour après l’installation d’un campement sur le campus par des manifestants anti-Israël dans le cadre de leur manifestation. Plus de 100 manifestants ont été arrêtés ce jour-là et le campement démantelé.
Bien que le campement ait été reconstruit le lendemain et qu’il soit resté en place pendant des semaines, la police n’a plus été sollicitée jusqu’au 30 avril, date à laquelle des étudiants ont vandalisé et occupé le Hamilton Hall. La police a été appelée cette nuit-là pour faire sortir les étudiants du hall et elle a, à cette occasion, arrêté des dizaines de manifestants.
Dans sa réponse, Levy a affirmé que les informations faisant état d’autres considérations que la demande de l’université étaient « complètement fausses ». Il a réitéré le point de vue de Adams selon lequel les manifestations pacifiques « ont leur place dans notre société et seront toujours protégées », mais qu’en tant qu’université privée, Columbia avait le droit de demander l’aide de la police si les manifestations organisées sur son terrain violaient ses règles.
« Le Washington Post et d’autres organismes sont en droit de prendre certaines décisions éditoriales pour marquer leur désaccord avec les décisions prises par les universités de demander à la NYPD de faire évacuer les campements illégaux sur les campus, mais dire que les Juifs ‘ont utilisé leur argent et leur pouvoir dans le but de modeler les opinions américaines’ est offensant à bien des égards », a-t-il conclu.
La guerre à Gaza a été déclenchée le 7 octobre lorsque des milliers de terroristes du Hamas ont déferlé sur le sud d’Israël, tuant près de 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et prenant 252 otages.
En réponse, Israël a lancé une invasion terrestre dans la bande de Gaza dans le but de démanteler le Hamas et de récupérer les otages.
Selon le ministère de la Santé de la bande de Gaza, dirigé par le Hamas, plus de 35 000 personnes ont été tuées ou sont présumées mortes dans les combats jusqu’à présent, même si seuls 24 000 décès ont été identifiés dans les hôpitaux. Ce bilan, qui ne peut être vérifié, ne fait pas la distinction entre terroristes et civils, et comprend les quelque 15 000 terroristes qu’Israël dit avoir tués dans les combats. Israël affirme également avoir tué un millier de terroristes à l’intérieur du pays le 7 octobre et les jours qui ont suivi.
Depuis le début de la guerre, Israël fait l’objet de critiques internationales croissantes pour sa campagne militaire à Gaza, en particulier ces derniers mois, alors que l’enclave palestinienne est au bord de la famine et que le nombre de civils déplacés ne cesse d’augmenter.
Les étudiants des universités internationales se sont montrés particulièrement virulents dans leurs critiques, et les manifestations se sont intensifiées en avril au camp de Columbia. De nombreuses universités américaines et européennes ont suivi le mouvement, avec des étudiants installant leurs propres campements et occupant des bâtiments au sein des établissements universitaires pour exiger que ces derniers se désinvestissent d’Israël.
Alors que certaines universités ont conclu des accords avec les manifestants, les manifestations à Columbia se sont poursuivies pendant des semaines et certains étudiants juifs ont quitté l’université, déclarant qu’ils ne s’y sentaient plus en sécurité. Les deux dernières semaines des cours ont été dispensées en ligne et la principale cérémonie de remise des diplômes de l’université a été annulée.