Le père d’une soldate seule tuée lors d’une attaque à Jérusalem se présente au sénat de l’État de Georgie
David Lubin affronte Sally Harris, sénatrice sortante, une progressiste du parti démocrate, qui a refusé un projet de loi qui adoptait la définition de l'antisémitisme de l'IHRA dans l'état

JTA — Dans la banlieue d’Atlanta, le père d’une soldate israélienne qui avait été tuée dans une attaque au couteau, au mois de novembre, a décidé de se présenter au sénat de l’État de Georgie après le refus opposé par la sénatrice sortante du parti démocrate, dans son district, de soutenir un projet de loi qui visait à lutter contre l’antisémitisme.
David Lubin, entrepreneur, a confié à l’Atlanta Journal-Constitution qu’il allait défier la sénatrice Sally Harrel lors des Primaires du parti démocrate, au mois de mai, suite au positionnement que la politicienne a adopté face à un projet de loi, H.B. 30, qui faisait de la définition de travail de l’antisémitisme mise au point par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) la définition officielle qui serait utilisée à l’avenir par l’état.
Après l’avoir critiquée à la tribune du parlement de l’État, Harrell s’était abstenue lors du vote sur la législation qui avait finalement été adoptée par le sénat le 25 janvier dernier et ratifiée dès la semaine suivante.
« Se contenter de quitter la pièce et de partir sans prendre également la peine de venir parler à la communauté juive, qui est le groupe le plus lourdement investi sur cette question ? Est-ce qu’elle fait cela avec les autres communautés ? », s’étonne Lubin au cours d’un entretien avec la Jewish Telegraphic Agency. « Que fait-elle avec les autres communautés ? Que fait-elle, d’ailleurs, de manière plus générale, si elle est à ce point déconnectée de ses électeurs ? »
Lubin avait exercé de fortes pressions sur les députés en faveur de l’approbation de la loi H.B.30 après que sa fille de 20 ans, Rose Lubin, a été poignardée à mort lors d’un attentat terroriste à Jérusalem, à un moment où les violences devenaient plus intenses en raison de la guerre menée contre les terrorsites du Hamas à Gaza. Rose était partie en Israël et elle avait intégré l’armée sous le statut de « soldate seule » après avoir terminé ses études dans un lycée de Georgie.
« La vie de Rose se concentrait vraiment sur la nécessité de ne pas laisser passer ce genre de choses, de ne pas les tolérer », explique Lubin. « Et c’est vraiment ce qui est le moteur de ma vie aujourd’hui. Quand quelque chose comme ça arrive, je sais que je dois m’impliquer. J’en ai l’obligation ».
Au mois de décembre, Harrell avait parrainé une loi en hommage à la mémoire de Rose Lubin. La fille du chef de cabinet de la sénatrice connaissait Rose et elle avait fait le lien, confie David Lubin à la JTA.

Alors qu’ils préparaient cette législation, raconte Lubin, lui et Harrell avaient discuté de H.B.30.
« Et pas une seule fois elle ne m’a fait part d’une quelconque inquiétude, de doutes, de confusion, d’une éventuelle mauvaise compréhension », note-t-il.
Le mois suivant, Harrell, une démocrate de l’aile progressiste du parti dont le district comprend une banlieue à forte population juive à Dunwoody, avait annoncé, le jour du vote, qu’elle était mal à l’aise à l’idée de soutenir le projet de loi en raison de l’absence de présentation aux députés de mesures de lutte contre les discriminations contre les autres groupes marginalisés.
« Si nous avions deux projets de loi aujourd’hui – si nous avions cette loi, H.B. 30, qui définit l’antisémitisme et si nous avions également une loi qui apporte une définition de l’islamophobie, je me sentirais tellement plus en paix », avait-elle expliqué.
« Nous devons, c’est certain, nous doter de ce qu’un sénateur a évoqué sous le terme de ‘feuille de route’ pour l’islamophobie », avait-elle ajouté. « Nous devrions avoir des définitions pour les membres de la communauté LGBTQ, nous devions avoir des définitions pour nos populations indigènes. »
Les critiques de la définition de l’antisémitisme telle qu’elle est présentée par l’IHRA déclarent que son approche des discours anti-sionistes est susceptible de limiter la liberté d’expression. La branche locale du groupe Jewish Voice for Peace, un groupe anti-sioniste, s’est opposé à la législation.

Dans son allocution, Harrell avait fait référence à la fois à Rose Lubin et à des tracts antisémites qui avaient été distribués dans les banlieues d’Atlanta (c’est la Goyim Defense League, l’organisation suprématiste blanche dont le siège est en Floride mais qui a des membres dans tous les États-Unis, qui est souvent à l’origine de ce type de prospectus).
« Cette action partielle que nous allons entreprendre ne va pas éliminer la haine – c’est pourtant ce que tous ceux qui sont dans cette chambre veulent, je pense, c’est ce que nous voulons tous », avait-elle continué. « Nous n’éliminerons pas la haine si nous n’apprenons pas à nous écouter, les uns les autres ».

Lubin déclare à la JTA qu’il a eu le sentiment que Harrell a exploité l’histoire de sa fille lors de son discours pour dénigrer le projet de loi sur l’antisémitisme.
« Elle m’a expliqué qu’il n’y avait jamais eu aucun lien entre Rose et le texte, que c’était deux choses différentes », dit Lubin. « Mais quand je suis parti du rendez-vous que j’avais avec elle, j’ai réalisé qu’elle était déconnectée de ses électeurs, qu’elle ne comprenait tout simplement pas les personnes de sa communauté de vie ».
Les responsables juifs de l’état ont également fait part, eux aussi, de leur trouble face au positionnement de Harrell. Elle a été la seule sénatrice à s’abstenir lors du vote, qui s’est finalement terminé par six voix « contre » et 44 « pour ».
« Je suis terriblement déçu par la sénatrice. Je ne comprends pas ce qu’elle a voulu faire », a commenté Dov Wilker, directeur régional de la branche d’Atlanta de l’American Jewish Committee (AJC), auprès de l’agence de presse locale Rough Draft Atlanta. Il a raconté avoir rencontré la sénatrice mais ne pas être parvenu à la convaincre de soutenir le projet de loi H.B. 30.
Lubin se présente lors des Primaires du parti démocrate en Georgie, qui auront lieu le 21 mai, en tant que démocrate modéré, s’efforçant d’inverser ce qu’il considère comme une vague de sentiment anti-israélien parmi les progressistes.
« On peut lier ce sentiment au mouvement progressiste et au parti démocrate. Il ne fait que croître, là-bas. Et puis, il y a des démocrates modérés comme moi qui disent : ‘Mais attendez, je ne rentre pas dans cette case’, » a-t-il dit au Jewish Insider. « Tout à coup, avant d’avoir eu le temps de nous retourner, on va voir notre parlement d’état rempli de représentants défavorables à Israël et qui ont le pouvoir de changer très rapidement la dynamique de ce pays pour nous ».
Parmi les autres sujets au cœur de sa campagne, les droits sexuels et reproductifs, le durcissement des lois sur le contrôle des armes et l’expansion du programme Medicaid.
Il ajoute toutefois qu’il se présente aussi pour Rose, qui était l’aînée de ses cinq enfants. Lors de ses funérailles à Jérusalem, en présence de milliers de personnes, son commandant, ses amis et son frère avaient évoqué une personnalité solide mais qui sortait des sentiers battus, une pom-pom girl qui avait fait du catch dans son lycée d’Atlanta et une élève douée qui réalisait son rêve de toute une vie – faire son alyah dès que la possibilité lui en serait donnée.
« Les gens à qui j’ai parlé m’ont dit : ‘David, si quelqu’un peut se dresser contre tout ça maintenant, c’est toi qui as une chance, avec ta situation actuelle, avec qui tu es, avec ce que tu défends, avec ce que tu représentes.’ Et nous en avons parlé en famille », déclare Lubin en évoquant sa candidature au sénat de Georgie. « Ma fille, elle vivait comme ça avec nous, tous les jours. Et c’est une source d’inspiration pour moi ».
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