Le projet de métro à l’honneur alors qu’Israël cherche des solutions de transport
Les lignes de Tel Aviv sont approuvées mais un expert met en garde contre un "projet fantaisiste" qui pourrait ne pas se réaliser ou échouer à tenir ses promesses
Sharon Wrobel est journaliste spécialisée dans l'immobilier pour le Times of Israel.
Les projets de mise en place d’un métro dans le centre d’Israël avancent de manière régulière, avec environ la moitié du réseau proposé qui a d’ores et déjà été approuvé.
Selon les plans, ce sont environ 45 kilomètres de voie qui relieront Tel Aviv, Rehovot, Ness Ziona, Lod, Beer Yaakov, Rishon Lezion, Holon et Ramat Hasharon sur la dite « Ligne 1 sud ».
Sur une autre ligne, la « Ligne M 3 », 39 kilomètres de voie desserviront 25 stations, assurant une connexion entre Bat Yam, Holon, Tel Aviv, Ramat Gan, Petah Tikva et Or Yehuda.
Il n’est pas prévu que les passagers puissent voyager sur ces lignes avant 2032 au plus tôt.
Ce projet de métro est le plan de transport le plus ambitieux du pays, visant à assurer une liaison entre différentes zones et banlieues de Tel Aviv pour réduire la circulation automobile. Mais dans la mesure où il traversera largement des secteurs qui sont d’ores et déjà densément construits, il pourrait s’avérer être un projet d’ingénierie particulièrement complexe à mener à bien. D’autres systèmes similaires ont, dans le passé, été installés, mais avant la construction des zones urbaines et non après.
« Aucun pays n’a construit un système de métro comme celui-ci auparavant, avec un réseau qui traverse des secteurs qui sont déjà très développés », confie Amiram Strolov, un conseiller en transports publics intervenant à international, au Times of Israel, « et il est finalement encore difficile de dire si c’est possible de le faire ».
Strolov a conseillé des municipalités dans le monde entier sur des systèmes de transport public, notamment aux États-Unis. Il qualifie le projet de métro israélien d’exemple « de mégalomanie » et de « fantaisie » qui, très probablement, ne verra pas le jour et échouera à tenir ses promesses.
La réponse à apporter aux défis à relever en matière de transport en Israël, ajoute-t-il, est beaucoup plus simple : il faut investir dans les réseaux publics de transport pour aller plus vite et pour transporter un nombre plus important de passagers.
« Élargir les routes pour pouvoir utiliser les accotements coûte environ 20 millions de shekels et en faisant cela ou en créant une autre sorte de voie réservée aux transports publics, on peut augmenter à la fois le nombre de voyageurs et la vitesse », explique-t-il. « Et il y a aussi le système national de train qui a été installé par les Britanniques et que nous ne développons que très lentement ».
Le Times of Israel avait fait savoir, il y a quelques temps, que la construction de la section nord de la ligne « M 1 » était à nouveau envisagée dans un contexte de fortes objections au plan, retardant la liaison entre Tel Aviv et Modiin, Raanana, Kfar Saba, et Hod Hasharon.
Tal Kedmi, qui fait campagne contre le projet de métro dans son ensemble et plus spécifiquement contre la section de Raanana, explique que « nos principales objections ont visé les propositions concernant des travaux en vue d’un tunnel qui passerait sous les maisons et sous les jardins d’enfants, et nous nous sommes aussi opposés à cette incapacité de mettre en place une station susceptible d’accueillir les personnes en situation de handicap à côté de Bet Levenstein, où se trouve pourtant le plus grand centre de rééducation du pays ».
De plus, Kedmi n’est pas sûr que le projet aidera à résoudre les problèmes de circulation et il reste critique face à la non-réactivité du gouvernement.
« Il n’y a eu aucun dialogue jusqu’à présent », explique-t-il. Il n’y a non plus « aucune preuve que le métro soulagera véritablement la circulation routière et je pense que les connexions dans le nord ont été abandonnées pour des raisons financières dans ce qui est d’ores et déjà un projet excessivement coûteux ».
Jusqu’à présent, le budget national a alloué la somme de six milliards de shekels. Mais les municipalités devraient apporter une contribution financière à partir de l’année prochaine, et les propriétaires qui se trouvent à proximité des lignes de métro devraient payer des impôts élevés.
La ministre de l’Intérieur Ayelet Shaked a promis de présenter d’autres projets de ligne de métro à l’approbation, même si elle n’a pas donné de calendrier. L’étape suivante comprendra des appels d’offres et le début de la réquisition et du nettoyage de terrains.
Par ailleurs, la première section du tramway de Tel Aviv, la Ligne Rouge, pourrait ouvrir avant la fin de l’année même s’il reste d’importants contrôles à effectuer. La ligne reliera Bat Yam, Tel Aviv et Ramat Gan à Petah Tikva en un peu plus d’une heure. Il y aura 34 stations au total et notamment dix stations souterraines.
En plus de ces gros projets à Tel Aviv, le ministère des Transports a fait savoir qu’il investirait environ un milliard de shekels au cours des cinq prochaines années dans les transports publics et durables, en travaillant avec les municipalités pour améliorer les réseaux préexistants. La ministre des Transports Merav Michaeli et la maire de Netanya Miriam Feierberg-Icher ont signé un accord concernant l’avancée d’un tel projet à Netanya au mois de mai.
Mais les détails restent indéterminés et un projet similaire à Ashdod, qui avait été lancé en 2011, est considéré comme un échec.
L’accord avec Netanya prévoit d’étendre les réseaux de transport public pour assurer la connexion entre toute les zones urbaines de la ville. Des itinéraires supplémentaires de bus et des pistes cyclables seront construites dans le centre de la ville et dans les banlieues adjacentes, et les réseaux de transport préexistants seront renforcés à hauteur de 50 %, avec la priorité donnée aux routes servant aux transports publics et aux vélos plutôt qu’aux voitures privées. Des ombrages supplémentaires seront installés sur les trottoirs pour encourager la marche.
Michaeli a suggéré que cette approche représentait un changement majeur de politique, une politique qui tente dorénavant de rassembler tous les éléments des transports urbains, et elle a vivement recommandé aux autres municipalités d’être partenaires dans des projets similaires.
Feierberg-Icher a déclaré qu’elle considérait que la promotion des transports publics à Netanya était une initiative nécessaire et complémentaire au large processus en cours de rénovation urbaine, qui comprend la construction de dizaines de milliers de logements et de bureaux dans la ville.
Certaines villes, et notamment Tel Aviv, prennent actuellement des initiatives significatives pour réduire l’utilisation de la voiture, notamment en réduisant le nombre de places de parking disponibles dans une ville où il est déjà difficile de trouver une place de stationnement.
Toutefois, les transports publics nécessaires pour remplacer les voitures sont à la traîne, estiment les observateurs.
« Il n’y a pas une solution unique », explique Strolov. « Nous avons besoin d’une approche mixte mais ces projets à grande-échelle sont lents, il sont extrêmement chers, et nous leur accordons trop la priorité sur d’autres changements qui seraient plus simples et plus efficaces ».
Le succès des transports publics se révèle dans la plus grande demande d’habitations à proximité des lignes (et dans leurs prix plus élevés) – c’est le cas, par exemple, aux abords de la ligne de tramway de Tel Aviv.
Ce qui est une bonne indication que les Israéliens sont prêts à abandonner la voiture lorsqu’une alternative réelle leur est offerte, souligne Strolov.