Le rapporteur de l’ONU va enquêter sur le traitement des ONG humanitaires en Israël
Selon Michael Lynk, la réponse menaçante d’Israël aux critiques de B’Tselem est inacceptable ; pour Danon, il représente une organisation décrédibilisée et ayant un parti-pris
Le rapporteur spécial des Nations unies pour la situation des droits de l’Homme dans les Territoires palestiniens a annoncé qu’il examinerait le traitement des défendeurs des droits de l’Homme dans la région suite à la « sévère réaction du gouvernement israélien » à la présence de B’Tselem devant le Conseil de sécurité des Nations unies ce mois-ci.
Michael Lynk, qui a soumis son premier rapport à l’Assemblée générale des Nations unies vendredi, a déclaré que « les défendeurs des droits de l’Homme et les travailleurs humanitaires accomplissent un rôle indispensable pour attirer notre attention sur les violations des droits de l’Homme, et ils ne devraient en aucun cas être menacés de quelque manière que ce soit, ou intimidés de quelque manière que ce soit. »
L’ambassadeur d’Israël auprès des Nations unies, Danny Danon, a fustigé en réponse le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies, à qui répond Lynk, qui est selon lui une organisation biaisée dont Israël ne reconnaît pas l’autorité.
B’Tselem a été dénoncée par de nombreux ministres israéliens, dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu, après le discours de son directeur exécutif, Hagai El-Ad, devant le Conseil de sécurité des Nations unies, qui appelait l’institution à prendre des mesures contre Israël en raison de sa politique d’implantation en Cisjordanie.
En réponse au discours d’El-Ad, le président de la coalition et député du Likud David Bitan avait appelé à déchoir El-Ad de sa nationalité, et avait annoncé qu’il proposerait une législation qui interdirait aux citoyens israéliens de demander des actions contre Israël aux institutions internationales. Bitan a été largement critiqué pour sa proposition, par des députés de gauche et de droite, qui l’ont qualifiée de non démocratique, ignorante et à courte vue.
« Le fait que certains ministres du gouvernement israélien ait menacé de révoquer la nationalité du directeur exécutif de B’Tselem est particulièrement inquiétant pour Israël », a déclaré Lynk.
En ce qui concerne son rapport, Lynk a déclaré que « non seulement l’occupation devient plus profonde, plus enracinée, plus intégrée, plus ancrée ; mais la situation économique et sociale des Palestiniens sous l’occupation empire constamment. »
Ceci, a-t-il affirmé, a entrainé la création d’une « économie palestinienne défigurée et étouffée qu’Israël, la puissance occupante, contrôle de manière décisive et exploite à son propre profit. »
Lynk a déclaré que « l’occupation dégouline de violations des droits de l’Homme. » Il a parlé de la pauvreté croissante, des incidents récurrents de « punition collective », notamment les démolitions de maisons, les fermetures géographiques et « le blocus intégral depuis presque dix ans de la bande de Gaza. »
« L’occupation d’Israël nie le droit au développement de la Palestine et entrave durement sa capacité à atteindre les cibles même minimales des Objectifs de développement durable, a-t-il déclaré. La pauvreté est en hausse. Le chômage grimpe à des niveaux épiques. L’insécurité alimentaire devient de plus en plus aigüe. L’économie palestinienne est plus étouffée et moins viable sous l’occupation. »
Il a fustigé « l’accumulation constante de violence et le manque de responsabilité des forces de sécurité israéliennes, en réaction à des manifestations ou des tentatives d’attaques palestiniennes. »
Un cycle de violence et de terrorisme palestiniens, qui a débuté en octobre 2015, a entraîné la mort de 36 Israéliens, deux Américains, un Erythréen et un Soudanais, selon l’AFP ; 234 Palestiniens et un Jordanien sont décédés pendant la même période. La plupart des Palestiniens tués menaient des attaques au couteau, à main armée ou à la voiture bélier, selon les autorités israéliennes. D’autres sont morts pendant des manifestations ou des affrontements, et certains ont été tués par des frappes aériennes israéliennes sur la bande de Gaza.
Lynk a souligné qu’Israël lui avait empêché l’accès aux territoires palestiniens.
« C’était aussi le cas pour mes deux prédécesseurs au poste de rapporteur spécial, a-t-il déclaré. Je voudrais rappeler au monde que la coopération de tous les états membres est une obligation fondamentale de l’adhésion aux Nations unies. »
Danon, l’ambassadeur israélien aux Nations unies, a fustigé les remarques de Lynk et déclaré qu’elles « soulignent les torts considérables causés par des groupes israéliens extrémistes qui nous calomnient sur la scène internationale. »
« Ce non sens qui jaillit de ces groupes extrémistes fournit des munitions aux ennemis d’Israël et de la légitimité aux actions contre Israël. »
Lynk, a-t-il ajouté, « représente une organisation biaisée et de parti-pris, et nous ne reconnaissons pas sa crédibilité ou son autorité. »
Israël a une relation tendue avec le Conseil des droits de l’Homme, qu’il accuse de partialité inhérente à son égard.
Quand Lynk a été nommé à ce poste en mars, ses détracteurs, dont l’association UN Watch, ont rejeté sa nomination, l’ONG déclarant que le choix du Canadien était de parti-pris et « une parodie de justice et une brèche des propres règles de l’institution mondiale. »
Hillel Neuer, le président de UN Watch, avait à l’époque déclaré que Lynk est depuis longtemps un détracteur ouvert d’Israël, qu’il a condamné l’Etat juif pour des « crimes de guerre » présumés à Gaza en 2009, et a appelé à une solution au conflit en « revenant en 1948, la date de partition et le début du nettoyage ethnique. »