Les aides aux familles de terroristes palestiniens visées par un projet de loi
La loi déduirait les paiements versés par l’AP aux prisonniers palestiniens et à leurs proches des revenus qu’Israël transfère annuellement à l’Autorité palestinienne
La commission des Lois a approuvé dimanche un projet de loi qui couperait les fonds versés à l’Autorité palestinienne (AP) pour les salaires payés par Ramallah aux terroristes condamnés et à leurs familles.
Si elle passe à la Knesset, la législation déduirait les paiements versés par l’AP aux prisonniers palestiniens et à leurs proches des revenus qu’Israël transfère chaque année à l’Autorité palestinienne.
Selon l’accord économique signé en 1994, Israël collecte annuellement environ 127 millions de dollars de droits de douane perçus sur les marchandises destinées aux marchés palestiniens qui transitent chaque mois par les ports israéliens, puis les transfère à l’Autorité palestinienne.
Le projet de loi devra passer par trois lectures à la Knesset avant de devenir une loi. Le soutien de plusieurs ministres de dimanche favorise un soutien de la coalition, ce qui donne une bonne chance au projet d’avancer.
La législation est une version adoucie d’une proposition de loi formulée, à titre personnel, par le député Elazar Stern du parti Yesh Atid qui aurait vu les fonds être automatiquement déduits de l’AP. Dimanche, Stern a salué l’approbation des ministres de la proposition et a appelé le gouvernement à la transformer rapidement en loi.
Le ministre de la Défense Avigdor Liberman, à l’origine du projet de loi, s’est félicité de ce vote, premier pas vers une possible adoption au Parlement.
« Bientôt, nous mettrons fin à ce théâtre de l’absurde », a-t-il écrit sur Twitter, ajoutant que l’argent confisqué serait utilisé « pour lutter contre le terrorisme et indemniser les victimes ».
La version du projet de loi du ministère de la Défense permettra au gouvernement, soit de déduire les fonds, ce qui serait irréversible, soit de « geler » les paiements, laissant au cabinet de sécurité le dernier mot.
« Bientôt, ce théâtre de l’absurde sera fini, et les salaires des terroristes que nous allons déduire de [l’Autorité palestinienne du président Mahmoud] Abbas seront utilisés pour empêcher le terrorisme et pour compenser les victimes », a-t-il déclaré.
Les critiques de la proposition ont averti qu’elle pourrait conduire l’AP à la banqueroute, puis à son effondrement.
Aux Etats-Unis, le Sénat a mis à l’ordre du jour un projet de loi approuvé par la Chambre des représentants visant à suspendre l’aide à l’Autorité palestinienne si elle continue de donner des allocations aux familles de terroristes palestiniens condamnés pour des attentats.
Selon les législateurs américains, ces paiements incitent à la violence et bloquent toute avancée dans le processus de paix, au point mort depuis 2014.
La semaine dernière, Avi Dichter, député du Likud et ancien chef du service de sécurité du Shin Bet, a fustigé la proposition du gouvernement, déclarant que la version amendée serait inefficace, puisque la décision finale appartiendrait au cabinet de sécurité, et serait basée sur des considérations diplomatiques ou de sécurité nationale.
L’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) effectue des paiements mensuels à tous les prisonniers palestiniens en prison en Israël, quel que soit le motif de leur incarcération, et également aux familles de soi-diant « martyrs » – un terme utilisé par l’OLP en référence à toute personne ayant été tuée par des Israéliens, que la personne attaquait ou non des Israéliens.
Un récent rapport publié par le Coordinateur des Activités du Gouvernement dans les Territoires (COGAT), l’agence du ministère israélien de la Défense responsable de l’administration des affaires civiles en Cisjordanie et aux points de passage avec Gaza, a déclaré qu’un tiers des prisonniers palestiniens sont « directement responsables de meurtres d’Israéliens ».
Selon le ministère de la Défense, l’Autorité palestinienne a payé, en 2017, 687 millions de shekels (159 millions d’euros) au « fond des familles de martyrs [qui meurent en martyrs, en ayant tué ou perpétré des attentats et ont alors le nom de shahid] » et 550 millions de shekels (128 millions d’euros) au Club des Prisonniers palestiniens – environ 7 % du budget total.
Les prisonniers palestiniens purgeant des peines de 20-30 ans pour avoir mené des attaques terroristes peuvent recevoir à vie 10 000 shekels (2 380 euros) de salaire mensuel, a déclaré le ministère de la Défense, citant des chiffres palestiniens.
Les prisonniers qui sont condamnés à une peine de 3 à 5 ans obtiennent un salaire mensuel de 2 000 shekels (476 euros). Les prisonniers palestiniens qui sont mariés, ont des enfants, vivent à Jérusalem, ou détiennent la citoyenneté israélienne reçoivent des paiements supplémentaires.
En janvier, le président américain Donald Trump a menacé de coupes dans les aides à l’AP, demandant pourquoi Washington devrait effectuer « aucun de ces futurs paiements colossaux » quand les Palestiniens « ne veulent plus parler de paix ». Les Etats-Unis ont récemment gelé 100 millions de dollars d’aides à l’Agence des Nations unies qui s’occupe des réfugiés palestiniens, appelant à des réformes dans l’organisme international.
Les législateurs américains ont également proposé la loi Taylor Force – nommée en hommage à un citoyen américain tué dans une attaque au couteau à Tel Aviv – qui couperait le financement américain à l’AP à moins qu’elle n’arrête sa pratique de verser des allocations mensuelles aux familles de terroristes qui tuent des Israéliens.
L’AP a refusé de mettre un terme aux paiements aux prisonniers palestiniens.
En juin, Abbas, dans un discours lu par son conseiller aux Affaires étrangères Nabil Shaath, a avancé l’argument que les « paiements pour soutenir des familles relèvent d’une responsabilité sociale de s’occuper des familles innocentes affectées par l’incarcération ou le meurtre de leur être aimé ».
« C’est une rhétorique franchement raciste de qualifier de terroristes nos prisonniers politiques. En effet, ils sont les victimes de l’occupation, pas les créateurs de l’occupation », a déclaré Abbas.