Les archives des ventes d’armes israéliennes durant le génocide rwandais resteront closes
La Cour suprême rejette une pétition d’un avocat destinée à révéler les exportations militaires au pays africain, citant un risque pour la sécurité nationale et les relations étrangères
Judah Ari Gross est le correspondant du Times of Israël pour les sujets religieux et les affaires de la Diaspora.
Les archives des ventes d’armes d’Israël au Rwanda pendant le génocide de 1994 resteront scellées et dissimulées au public, a décidé cette semaine la Cour suprême.
L’avocat militant Eitay Mack avait demandé en 2014 au ministère de la Défense les informations sur les exportations militaires vers le pays africain. Sa demande avait été rejetée par une cour de Tel Aviv, et l’affaire est passée dans le système d’appel pendant l’année et demie suivante, pour s’achever avec la décision de lundi.
Mack a affirmé qu’il y avait « un intérêt public majeur à révéler ces informations, et qu’empêcher leur divulgation avait créé un sentiment que les accusés s’interposaient en raisons de considérations extérieures », selon la décision de la Cour.
La présidente de la Cour suprême, Miriam Naor, le juge Neal Hendel et le juge Yitzchak Amit ont déterminé que malgré le droit de savoir du public, il existait des préoccupations sécuritaires et diplomatiques qui les empêchaient d’accéder à la demande.
Les juges ont cité la section 9 de l’acte sur la liberté d’information d’Israël, qui permet au gouvernement de retenir les documents si « dans la divulgation des informations, il y a une inquiétude de nuire à la sécurité nationale, à ses relations étrangères, à la sécurité de son public ou à la sécurité ou au bien-être d’un individu. »
Les preuves et la logique de l’Etat pour garder ces informations scellées ont été présentées à huis clos ; cependant, elles étaient basées « uniquement sur des considérations pertinentes », selon la décision de la Cour.
« Dans la loi israélienne, il n’y a pas de droit juridique qui soit absolu, et même le droit à l’information […] peut être dépassé par d’autres intérêts », ont établi les juges.
« Cependant, ce n’est pas une décision générale, ont-ils ajouté. Il est possible que la force de l’intérêt public pour révéler l’information excède la force des préoccupations listées dans la section 9. »
Dans une déclaration suivant l’audience, Mack a parlé d’une décision « erronée et immorale ».
« L’Etat d’Israël ne peut qu’y perdre », a-t-il déclaré.
Mack a cependant applaudi la Cour pour la reconnaissance du génocide rwandais de 1994, ce que les cours inférieures avaient refusé de faire.
Pendant 100 jours, de 750 000 à un million de Tutsis ont été brutalement assassinés, principalement avec des machettes et d’autres armes rudimentaires. Le nombre exact de victimes a été difficile à déterminer puisque aucune archive officielle du massacre n’a été gardée.
Certaines des armes utilisées auraient été des balles 5.56-mm, des grenades et des fusils de fabrication israélienne. Cependant, la documentation officielle de ces ventes, et leur étendue, restera protégée des yeux du public suite à la décision de lundi.
En plus de l’affaire du Rwanda, Mack a rempli nombre de demandes au nom de l’acte de liberté d’information au cours des dernières années pour révéler les détails des ventes d’armes d’Israël aux pays au cœur d’un génocide au moment de la transaction, dont la Bosnie, la Chine, l’Ouganda et le Guatemala.
« J’ai travaillé pour renforcer la supervision du public sur les experts militaires », avait-il déclaré au Times of Israël l’année dernière.
En plus de demander des informations conformément à la loi, Mack a également travaillé avec la députée Meretz Tamar Zandberg pour empêcher les ventes d’armes israéliennes au Soudan du Sud. Avec l’aide de Mack, Zandberg a également proposé une loi qui interdirait les exportations militaires vers les pays qui commettent des « violations brutes des droits de l’Homme ».
La proposition de loi n’a pas été votée par la Knesset.