Frappes israéliennes contre des journalistes au sud-Liban : « probables » tirs de mitrailleuse après les obus de char – rapport
Un char israélien, dont deux tirs d’obus ont tué en octobre un journaliste de Reuters et blessé six reporters dont deux de l’AFP dans le sud du Liban, a « probablement » ouvert le feu sur le groupe dans un deuxième temps à l’aide d’une mitrailleuse lourde, selon les dernières conclusions d’une analyse menée pour le compte de Reuters par le laboratoire de l’Organisation néerlandaise de recherche scientifique appliquée (TNO).
Une enquête publiée par Reuters en décembre citant des résultats préliminaires d’analyses menées par TNO, un institut indépendant spécialisé dans l’analyse de munitions et d’armement, concluait que deux obus de char avaient été successivement tirés à une distance de 1,3 km des journalistes, tuant le reporter de Reuters Issam Abdallah, 37 ans, et blessant deux journalistes de l’AFP, dont la photographe Christina Assi, 28 ans, qui a subi une amputation de la jambe droite.
Une enquête de l’Agence France-Presse, menée avec le collectif britannique d’experts et d’enquêteurs indépendants Airwars, avait également conclu début décembre qu’un obus de char de 120 mm stabilisé par des ailettes, exclusivement utilisé par l’armée israélienne dans la région, était à l’origine de la frappe.
Dans son rapport final, qui mentionne de nouvelles analyses audio, TNO révèle que les journalistes ont ensuite été vraisemblablement la cible de tirs de calibre .50 (12,7 mm), des munitions utilisées par les mitrailleuses Browning pouvant équiper les chars israéliens Merkava.
« Il est probable qu’un char Merkava, après avoir tiré deux obus, ait également utilisé sa mitrailleuse contre l’endroit où se trouvaient les journalistes », écrit TNO, en ajoutant que « ce dernier point ne peut être conclu avec certitude car la direction et la distance exacte du tir (de la mitrailleuse) n’ont pas pu être établies ».
Ces reporters étaient venus couvrir les affrontements transfrontaliers entre l’armée israélienne et des groupes armés dans le sud du Liban, où la communauté internationale s’inquiète du risque d’extension du conflit entre Israël et le Hamas.
La succession de deux frappes, espacées de 37 secondes, montre qu’elles étaient ciblées, selon les experts interrogés par l’AFP et Airwars. Les journalistes étaient par ailleurs clairement identifiables.
Reuters n’est pas en mesure de déterminer de manière indépendante si l’équipage du char israélien savait qu’il tirait sur des journalistes, ni s’il a également tiré sur eux avec une mitrailleuse et, dans l’affirmative, pourquoi.
Aucun des deux reporters de l’agence Reuters qui ont survécu, ni aucun autre journaliste de l’AFP présent sur les lieux, ne se souvient des tirs de mitrailleuse. Tous ont déclaré être en état de choc à ce moment-là.
Deux autres investigations menées séparément par les organisations de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) et Amnesty International, désignent toutes deux « des frappes israéliennes ».
« Le rapport de TNO, qui suggère fortement que les journalistes ont subi des tirs nourris de mitrailleuse, ajoute du poids à la théorie d’une attaque ciblée et délibérée », a réagi jeudi le directeur de l’information de l’AFP, Phil Chetwynd, en réitérant son appel à une enquête approfondie de la part de l’armée israélienne.
L’armée israélienne n’a pas répondu à une demande de commentaires sur les aspects de l’attaque contre les journalistes.
Interrogée en décembre sur les conclusions préliminaires de TNO, Tsahal avait déclaré : « Nous ne visons pas les journalistes ».
Après la frappe du 13 octobre, l’armée israélienne avait seulement affirmé que le lieu où se trouvaient les journalistes était « une zone de combat active ».