Marée noire d’Evrona : l’EAPC condamnée à payer une amende de 1,5 M de shekels
Deux employés de l'Europe Asia Pipeline Company ont aussi écopé d'amendes ; Adam Teva V'Din déclare que les sanctions sont "une blague" et réclame une peine de prison
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.
Accusée d’avoir causé une fuite de pétrole en 2014 qui a dévasté une réserve naturelle dans le sud d’Israël, créant la pire catastrophe environnementale du pays à ce jour, la société publique Europe Asia Pipeline Company (EAPC) – anciennement Eilat Ashkelon Pipeline Company – et deux employés – a écopé d’amendes, une sanction jugée absurdement légère par groupe de défense de l’environnement.
Jeudi, le tribunal de Beer Sheva a publié une décision rendue il y a trois semaines, dans le cadre d’une négociation de peine, qui condamne l’EAPC à une amende de 1 562 000 shekels pour les préjudices causés à la réserve. Une somme similaire sera déposée à titre de caution pour éviter que les mêmes délits ne se reproduisent au cours des trois prochaines années.
L’EAPC avait été reconnue coupable de tous les chefs d’accusation retenus contre elle, notamment de deux chefs d’accusation de pollution aggravée de l’eau avec circonstances aggravantes, de deux chefs d’accusation de déversement de déchets dangereux dans le domaine public et d’un chef d’accusation lié à la diffusion d’une odeur forte ou déraisonnable.
Shlomi Levi, directeur adjoint des opérations à l’époque, a été condamné à une amende de 35 000 shekels et à une caution de 70 000 shekels pour ne pas commettre les mêmes délits au cours des trois prochaines années.
Haïm Bar Sela, alors responsable de terrain, a été condamné à payer une amende de 20 000 shekels et devra déposer une caution de 40 000 shekels. Il a également été condamné à effectuer 180 heures de travaux d’intérêt général.
Levi et Bar Sela travaillent toujours pour l’entreprise.
L’EAPC détournait une section de pipeline près de Beer Ora, à environ 20 kilomètres au nord d’Eilat, lors de travaux de maintenance en vue de la construction d’un nouvel aéroport à Timna. Une défaillance technique s’est produite, la conduite s’est détachée et quelque cinq millions de litres de pétrole brut se sont déversés d’un oléoduc de l’EAPC dans la réserve naturelle d’Evrona, dans le désert d’Arava sur une zone de 14,4 hectares. Le déversement a tué la flore et la faune, endommagé le sol et affecté la disponibilité de l’eau dans la région.
Les résultats d’un programme de surveillance quinquennal, publiés sept ans après la catastrophe, ont montré que la réserve ne montrait aucun signe de rétablissement et ont averti que son écosystème pourrait s’effondrer si l’on ne trouvait pas les moyens de nettoyer le sol et de permettre aux graines d’acacia de recommencer à germer.
Un avis d’expert de l’accusation a estimé les préjudices causés à la réserve naturelle à 100 millions de shekels. L’organisation de défense juridique Adam Teva V’Din a déclaré qu’on lui avait dit que les coûts indirects des dégâts étaient plus proches de 500 millions de shekels.
Selon l’acte d’accusation, la principale cause de la défaillance technique est la mauvaise exécution des travaux, l’absence de planification détaillée, la violation des règles et procédures de sécurité et l’absence de coordination entre les éléments de planification et d’exécution au sein de l’entreprise.
Il a fallu sept ans à la police verte du ministère de l’Environnement pour mener à bien son enquête, de sorte que les poursuites pénales n’ont été engagées par l’État qu’en 2021.
Le ministère a déclaré jeudi que l’amende de 1 562 000 shekels était la plus élevée possible compte tenu des circonstances et que la négociation de peine permettait « une sanction appropriée tout en rationalisant les procédures judiciaires, compte tenu du temps écoulé depuis l’incident ».
Les arguments pour et contre l’emprisonnement seront entendus en avril. Les poursuites judiciaires à l’encontre de deux autres responsables de l’entreprise sont en cours et n’ont pas été incluses dans la négociation de peine.
En 2019, un accord avait été conclu dans le cadre d’un recours collectif, selon lequel l’EAPC paierait 100 millions de shekels de dommages-intérêts pour la marée noire.
Amit Bracha, PDG de l’organisation de défense de l’environnement Adam Teva V’Din, a déclaré que « la punition absurde du pollueur en série et de ses dirigeants se moque de l’environnement et ne reflète en rien la gestion criminelle de l’EAPC ».
« La réserve naturelle d’Evrona est une ressource publique et le ministère public devrait réclamer des amendes beaucoup plus importantes pour les préjudices criminels causés à cette ressource naturelle unique, ainsi que des peines de prison pour les personnes reconnues responsables de ces crimes », a-t-il ajouté.