Max Oppenheimer, chaînon oublié de la modernité viennoise, exposé en Autriche
Cette figure aujourd'hui méconnue de la modernité viennoise "aura toujours été à la recherche de nouveaux défis stylistiques", explique le directeur du musée Leopold
Il était aussi célèbre en son temps que Schiele et Kokoschka, avant de sombrer dans l’oubli : le musée Leopold de Vienne ressuscite tardivement vendredi avec une exposition évènement l’œuvre essentielle du peintre juif autrichien Max Oppenheimer.
Cette figure aujourd’hui méconnue de la modernité viennoise « aura toujours été à la recherche de nouveaux défis stylistiques », explique à l’AFP le directeur de l’établissement, Hans-Peter Wipplinger.
Expressionnisme, dadaïsme, futurisme, cubisme… son œuvre reflète « presque cinq décennies d’histoire de l’art », estime le spécialiste.
Avec cette rétrospective historique, la plus grande à ce jour – plus de 170 œuvres à voir jusqu’au 25 février 2024 -, il souhaite lui « rendre justice ».
Né en 1885 dans une famille juive à Vienne, Max Oppenheimer devient dès la fin de ses études une figure majeure du mouvement rebelle de la Sécession.
Avec ses portraits monochromes de Sigmund Freud, de Tilla Durieux ou de Stefan Zweig, il entre en concurrence avec Oskar Kokoschka, qui mène à son encontre une virulente campagne de presse, l’accusant de plagiat.
Car à la différence de nombre de ses acolytes dans une ville alors bouillonnante de créativité, « MOPP », son pseudonyme, ne fait rien pour séduire. S’ils admirent son coup de pinceau, ses contemporains le décrivent souvent comme antipathique et conflictuel.
Fait rarissime, il ne cache pas son homosexualité et le jeune Egon Schiele, qui apprécie son esprit libre, vient le voir pour lui demander son avis sur ses toiles. En 1910/11, les deux artistes partageront le même atelier.
Et le même papier ! L’exposition dévoile en effet un dessin d’Oppenheimer, caché au dos d’un croquis de Schiele maintes fois présenté. Leur style est alors étrangement similaire.
Mais l’artiste passionné de musique, un temps taraudé par les thèmes religieux et mythologiques, quittera bientôt Vienne. Il déménagera neuf fois dans sa vie.
Il est stimulé par l’avant-garde de Berlin ou Paris, fuit en Suisse la conscription et plus tard les nazis, qui dénigraient son « art dégénéré ».
Jusqu’à mourir seul et dans la misère à New York en 1954, à l’âge de 68 ans.
Monter l’exposition a donc nécessité une méticuleuse enquête. Car de nombreux tableaux ont été spoliés ou détruits, d’autres restant à ce jour inaccessibles dans des collections privées.
Un autoportrait à la puissance saisissante est par exemple montré pour la première fois depuis 110 ans au public.
Il appartenait au collectionneur Oskar Reichel, pillé sous le IIIe Reich, et a refait surface en avril dans un catalogue d’enchères avant de rejoindre le musée Leopold.
Un retour aux sources émouvant, car cette institution accueille la plus grande collection au monde d’œuvres d’Egon Schiele, qui semble avoir retrouvé une âme sœur.