Meron : Selon différents témoignages, Netanyahu avait conscience des dangers
"La seule raison pour laquelle nous avons eu cette réunion était le coronavirus," a témoigné le député Amir Ohana

Le témoignage d’un ancien ministre auprès de la commission d’enquête sur le mouvement de foule meurtrier de 2021 au Mont Meron et d’autres preuves pourraient remettre en cause les affirmations de l’ex-Premier ministre Benjamin Netanyahu selon lesquelles il n’était pas au courant des dangers dûs à la surpopulation de l’événement.
Netanyahu, actuellement chef de l’opposition, a déclaré jeudi à la commission d’enquête de l’État sur la catastrophe de Meron, au cours de laquelle 45 personnes ont été tuées pendant une fête religieuse, qu’il n’était pas au courant du « sérieux problème de sécurité » et qu’il n’était donc, en aucun cas, responsable de l’accident mortel survenu sous sa direction.
Cependant, le député du Likud Amir Ohana, qui était ministre de la Sécurité intérieure à l’époque, a déclaré au panel il y a deux mois que les problèmes de sécurité étaient bien connus.
Le pèlerinage annuel au Mont Meron, qui marque l’anniversaire traditionnel de la mort du rabbin Shimon Bar Yochai, Rashbi, figure rabbinique de la mystique juive du 2e siècle, attire habituellement des centaines de milliers de personnes dans ce sanctuaire du nord d’Israël.
À l’époque, les règles relatives à la pandémie de COVID-19 limitaient les rassemblements en plein air à seulement 100 personnes, ce qui signifiait que l’événement de Lag BaOmer au Mont Meron nécessitait une réglementation spéciale, approuvée par le gouvernement, pour permettre une plus grande affluence. Environ 100 000 fidèles, pour la plupart Juifs ultra-orthodoxes, ont participé aux festivités malgré des avertissements de longue date concernant la sécurité du site.
Selon Ohana, lors d’une réunion avec le Premier ministre sur la question avant l’événement, il n’a été question de la taille des foules que par rapport à la pandémie. « La seule raison pour laquelle nous avons eu cette réunion était le coronavirus », a-t-il déclaré.

« Chaque année, nous avons affaire à des bousculades. Ça n’avait rien de particulier. Ce qui était spécial en revanche, c’était la facette épidémiologique », a-t-il déclaré.
Interrogé sur le rôle du ministère de la Sécurité intérieure dans la prévention de la surpopulation, Ohana a répondu que « le sujet épidémiologique était au centre de chaque réunion, mais la question de la surpopulation a également été soulevée. Nous savions qu’il y avait une réelle menace ».
Il n’était pas clair s’il faisait également référence à la réunion avec Netanyahu.
« La seule raison pour laquelle nous avons eu cette réunion était le coronavirus », a-t-il répété à l’époque.
Lors de son témoignage jeudi, Netanyahu a repoussé les affirmations selon lesquelles il devrait porter une part de responsabilité dans la catastrophe, qui a été déclenchée lorsque que la foule extrêmement dense a commencé à quitter les lieux, certains ont apparemment glissé sur une passerelle et dévalé plusieurs marches, tombant sur ceux qui se trouvaient en dessous et entraînant un mouvement de foule meurtrier.

« Je ne savais pas qu’il y avait un sérieux problème de sécurité », a témoigné Netanyahu. « J’ai assumé la responsabilité de ce qui se passait à ce moment-là, à savoir, la catastrophe épidémiologique, que j’ai su empêcher. Je ne peux pas assumer la responsabilité de ce dont je n’avais pas connaissance. »
Ces commentaires ont suscité un feu nourri de la part de nombreuses personnes, qui l’ont accusé d’essayer de se dédouaner de ses responsabilités en affirmant ignorer un problème largement connu.

« Pendant les douze années de mandat de Netanyahu, tous les ministères du gouvernement étaient au courant des graves dangers qu’encourait la foule sur le mont, mais ont choisi de s’en tenir à ‘faites-nous confiance, tout ira bien’, ce qui a conduit à cette terrible catastrophe », a déclaré Diskin. « Les réponses de Netanyahu n’étaient pas satisfaisantes, et son affirmation selon laquelle il n’était pas conscient que le site était une bombe à retardement n’en est pas moins inquiétante. »
Le sujet de Meron a été discuté dans les commissions de la Knesset une quarantaine de fois pendant le mandat de Netanyahu, et au moins quelques-unes de ces commissions concernaient la surpopulation. Le sujet a également été abordé dans le cadre de différentes enquêtes du contrôleur d’État en 2008 et 2011.

« Le site… n’est pas configuré pour gérer les dizaines ou centaines de milliers de personnes qui y descendent en masse », avertissait le rapport d’enquête de 2011. « Il n’y a aucune chance que cela puisse continuer ».
Au cours de l’audience de jeudi, la présidente de la commission, l’ancienne juge Dvora Berliner, a mis Netanyahu au défi d’expliquer pourquoi, pendant ses nombreuses années au pouvoir, les problèmes de sécurité du site n’avaient jamais été traités, bien que le sujet eût été soulevé à plusieurs reprises. « Vous avez été Premier ministre pendant 12 ans. La question de la sécurité de l’événement annuel – à grande affluence – était omniprésente », a noté Berliner. « Comment cela est-il possible ? Expliquez-vous : pourquoi la question n’a-t-elle pas été traitée ? »
Netanyahu a rejeté son « accusation » et a affirmé que ses gouvernements avaient fait plus que tous les autres en la matière. « Je suis désolé, votre honneur, je n’accepte pas votre accusation. La question a été traitée, conformément aux recommandations du contrôleur d’État… Je l’ai traitée, j’ai pris des décisions qui étaient censées régler les différents problèmes sur le mont », a-t-il déclaré. « Les seuls gouvernements à s’être inquiété du Mont Meron, sont les gouvernements que j’ai dirigés. »

Netanyahu est le plus haut responsable à avoir témoigné devant la commission, qui a entendu plus de 100 autres personnes, y compris d’anciens ministres qui étaient en fonction à l’époque. Selon certaines informations, il devrait se faire taper sur les doigts par la commission par le biais d’une lettre d’avertissement.
Mercredi, Ynet a rapporté que le chef de la police israélienne, Kobi Shabtai, et d’autres hauts fonctionnaires devraient être informés dans les semaines à venir par la commission d’enquête qu’ils étaient susceptibles d’être tenus pour responsables de la catastrophe. Parmi eux, le chef de la police du district du nord, Shimon Lavi, a annoncé lundi sa démission de la police, invoquant sa responsabilité dans la tragédie mortelle du mont Meron.

Même si les recommandations de la commission n’obligeront pas un futur gouvernement à les adopter, aucun gouvernement israélien n’a, à ce jour, complètement ignoré les recommandations d’une commission d’enquête nationale.
Les festivités de Lag BaOmer se sont déroulées cette année sous de strictes limitations. Les autorités ont mis en place plusieurs mesures de sécurité pour éviter qu’une catastrophe similaire à celle de l’année dernière ne se répète, limitant l’affluence, imposant un système de réservations par le biais de l’achat de billets et changeant le mode d’organisation de l’événement.
Le gouvernement a également réparé les escaliers et les autres infrastructures du complexe pour renforcer la sécurité.