Pour les avocats de Netanyahu, l’affaire 4000 est antidémocratique
5 éminents juristes américains disent que criminaliser Netanyahu pour avoir influencé sa couverture médiatique est un danger pour la démocratie ; l'audience reprend dimanche

Les avocats du Premier ministre Benjamin Netanyahu ont présenté cette semaine un avis juridique de cinq professeurs américains, dont Alan Dershowitz, lors d’audiences préalables à l’inculpation, en faisant valoir que le fait d’enquêter sur l’influence de la couverture médiatique en tant qu’infraction pénale constitue un danger pour la démocratie.
Les interactions criminelles présumées de Netanyahu avec d’éminents propriétaires de médias israéliens sont au cœur de l’affaire la plus grave contre lui, l’affaire 4000, dans laquelle il fait face à une possible accusation de corruption. Elles figurent également dans les deux autres affaires, les affaires 1000 et 2000.
L’un des professeurs a demandé une audience avec le procureur général Avichai Mandelblit, qui a refusé la demande mais a déclaré qu’il lirait lui-même l’avis juridique des professeurs américains, a rapporté la Douzième chaîne vendredi.
La chaîne n’a pas nommé le professeur qui cherchait à rencontrer Mandelblit, ni aucune des autres personnes qui ont soumis l’avis juridique à part Dershowitz, un éminent professeur de droit et défenseur d’Israël.
Elle n’a pas non plus précisé pour quels motifs les professeurs soutenaient que le fait de poursuivre les dirigeants qui cherchent à être présentés sous un jour positif mettait en danger la démocratie. Dans l’affaire 4000, Netanyahu est accusé de s’être assuré une meilleure couverture sur le site Web Walla dans un accord de contrepartie dans lequel il a approuvé des accords commerciaux présentant un immense avantage financier pour le propriétaire de Walla, Shaul Elovitch, alors actionnaire majoritaire du géant israélien des télécommunications Bezeq.
Dershowitz a déjà déclaré que les politiciens négocient régulièrement avec les organes d’information au sujet de la couverture médiatique, déclarant à la radio de l’armée l’an dernier que « l’ingérence dans les relations entre les médias et le gouvernement représente un danger énorme pour la liberté d’expression ».

Les avocats de Netanyahu ont présenté leurs arguments en défense dans l’affaire 4000 lors de deux jours d’audience cette semaine avec Mandelblit et d’autres procureurs de haut niveau.
La Douzième chaîne a rapporté que, défiant toute attente, les avocats de Netanyahu ont présenté des arguments solides, que les procureurs s’attendaient à devoir faire un travail important après les audiences sans avoir à ordonner une enquête plus poussée, et que certaines parties de la « thèse » du procureur sur l’affaire devraient être « ré-examinées ». Selon le rapport, il est possible que le calendrier selon lequel le ministère public s’efforcera de prendre une décision finale sur l’opportunité de porter plainte puisse changer, malgré les démentis de l’accusation.
En revanche, des fonctionnaires du ministère public ont déclaré à la Treizième chaîne que les avocats de Netanyahu ne les avaient pas convaincus qu’il n’y avait aucune affaire de corruption à traiter dans l’affaire 4000.
Ni l’une ni l’autre chaîne de télévision n’a cité ses sources pour ses reportages sur ce qui s’était passé à l’audience de mercredi et de jeudi. Un avocat de Netanyahu a déclaré lors de ces deux journées qu’il était convaincu que les nouveaux éléments de preuve présentés au nom du Premier ministre ne laisseraient pas d’autre choix aux procureurs de l’État que de clore toutes les affaires.

Netanyahu fait face à des accusations de fraude et d’abus de confiance dans les trois affaires, ainsi qu’à une accusation de corruption dans l’affaire 4000.
Cette affaire concerne des soupçons selon lesquels Netanyahu aurait poussé des décisions réglementaires bénéficiant financièrement à Elovitch, l’actionnaire majoritaire du groupe de télécommunications Bezeq, en échange d’une couverture positive continue du site d’information Walla de Bezeq.
Dans l’affaire 2000, Netanyahu est accusé d’avoir convenu avec l’éditeur de journaux Yedioth Ahronoth Arnon Mozes d’affaiblir un quotidien rival en échange d’une couverture plus favorable du Yedioth. L’accord n’a jamais été mis en œuvre.
L’affaire 1000 porte sur des soupçons selon lesquels Netanyahu aurait reçu des dizaines de milliers de dollars de dons de riches bienfaiteurs, notamment Arnon Milchan et James Packer, en échange d’aide sur diverses questions.
Selon un reportage de la Treizième chaîne vendredi, Netanyahu, lors de son interrogatoire précédent sur l’affaire 1000, a reconnu aux enquêteurs qu’il avait reçu des cadeaux de Milchan et Packer, mais qu’il n’était pas au courant des quantités considérables de champagne envoyées pour son épouse.
Netanyahu aurait dit que Milchan était un de ses amis et que les deux étaient devenus proches alors qu’il évoluait en dehors de la politique et ne s’attendait pas à y retourner. Il a expliqué qu’ils étaient « comme des frères ».
En ce qui concerne les livraisons de champagne à son domicile, Netanyahu aurait dit aux enquêteurs : « Ma femme et moi sommes deux personnes différentes. Je ne suis pas au courant de ces quantités [de champagne]. Je ne crois pas qu’il y ait quelque chose de ce genre ici. Je sais une chose, quand on allait chez Arnon, le champagne coulait à flots. Je n’aime pas le champagne. Je ne bois pas, mais tout le monde en boit beaucoup là-bas. »

Le procureur a demandé à Netanyahu : « Milchan a dit que vous êtes un couple hédoniste et que vous le dégoûtiez » et qu’il aurait ajouté que les Netanyahu avait « des exigences constantes ».
Netanyahu a répondu : « Cela m’étonne et me déçoit. J’ai du mal à croire qu’il ait dit ça. Je ne lui ai rien demandé. La plupart des cigares étaient offerts lors de nos rencontres. »
Dans un document de février exposant les allégations contre Netanyahu, Mandelblit a déclaré que le champagne avait été demandé par Sara Netanyahu et que le Premier ministre était au courant des « quantités importantes » de bouteilles à avoir été livrées.
Les reportages télévisés de vendredi ont été diffusées après la deuxième journée de l’audience dans les affaires criminelles visant Netanyahu, qui s’est terminée jeudi soir après de longues heures de discussion. L’un des avocats du Premier ministre a déclaré qu’il était convaincu que les accusations portées contre le Premier ministre allaient être abandonnées.
« Nous avons continué à présenter nos arguments dans l’affaire 4000 aujourd’hui », a déclaré à la presse l’avocat Amit Hadad, à l’issue d’une session de 11 heures. « Les arguments étaient convaincants et ont été écoutés attentivement [par le ministère public]. »
Il a répété son refrain de la veille selon lequel « à la fin de l’audience, il n’y aura pas d’autre choix que de classer les affaires ».

Haaretz a signalé que malgré les plans visant à terminer les discussions sur l’affaire 4000 jeudi, on s’attendait à ce qu’elles se poursuivent jusqu’à dimanche. Dimanche et lundi avaient été initialement prévus pour se concentrer sur les affaires 1000 et 2000.
Vendredi, la Douzième chaîne a déclaré que le processus d’audience ne serait toutefois pas prolongé et se terminerait comme prévu avant Yom Kippour, qui commence mardi soir.

Netanyahu n’a pas accompagné ses avocats à l’audience. Jeudi, il a pris la parole lors de la cérémonie d’investiture de la 22e Knesset, dont l’avenir est déjà incertain, dans une impasse politique et sans voie claire pour lui de former un gouvernement. L’impasse actuelle a entraîné deux tours de scrutin sans précédent en l’espace de cinq mois et menace d’aboutir à un troisième.
Netanyahu, qui nie tout acte répréhensible, a affirmé à plusieurs reprises que les poursuites judiciaires engagées contre lui sont le résultat d’une chasse aux sorcières visant à l’évincer du pouvoir impliquant les médias, l’opposition politique, la police et le ministère public.

Alors que Netanyahu a remis en question la légitimité du processus de prise de décision dans le système judiciaire en désignant le procureur Shai Nitzan et la procureure principale chargée de l’affaire, Liat Ben-Ari, comme étant les deux principaux responsables de la ligne dure, son avocat, Ran Caspi, a fait l’éloge de ces personnes mercredi, en déclarant : « J’ai une confiance totale et sans réserve non seulement dans le système judiciaire israélien, mais aussi dans ceux qui sont à la tête des forces de l’ordre, et en premier lieu M. Shai Nitzan, le procureur général, et Mme Liat Ben-Ari, la procureure adjointe de l’Etat. »