Procès Netanyahu : Filber confirme avoir aidé Milchan à investir dans les médias
L'ex-directeur du ministère des Communications a dit avoir conseillé le milliardaire israélien pour le compte de l'ex-Premier ministre

L’ancien directeur du ministère des Communications Shlomo Filber a commencé, mercredi, à témoigner dans l’Affaire 1000 – l’un des trois dossiers actuellement examinés dans le cadre du procès pour corruption de l’ex-Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui est actuellement en cours.
Dans ce dossier, l’ancien chef de gouvernement est soupçonné d’avoir accepté des cadeaux illicites, et notamment des cigares et du champagne, de la part de deux milliardaires, le producteur hollywoodien Arnon Milchan, qui est de nationalité israélienne, et le magnat australien James Packer.
Milchan n’a pas été mis en examen dans ce dossier tandis que Netanyahu a été inculpé pour fraude et abus de confiance. Il est aussi accusé de fraude dans deux autres dossiers et de pots-de-vin dans l’un d’entre eux. Pour sa part, l’ancien Premier ministre ne cesse de clamer son innocence.
Filber, ancien proche de Netanyahu et témoin déterminant dans ces poursuites, a confirmé devant les juges, mercredi, avoir aidé Milchan concernant les investissements qu’il prévoyait de faire dans les médias israéliens. Il a aussi précisé avoir tenu au courant Netanyahu de l’avancée de ces projets à toutes les étapes.
Il a raconté que pendant l’été 2015, Netanyahu lui avait présenté Milchan – qui, à l’époque, était le propriétaire de la Dixième chaîne – parce que l’ex-Premier ministre voulait qu’il serve d’intermédiaire entre les deux hommes, à ce moment-là, et qu’il aide Milchan à naviguer dans les questions de régulation liées à une fusion qui était alors envisagée entre Reshet et Keshet, deux des principales chaînes de télévision israéliennes.
Filber a ajouté que peu après leur rencontre, l’assistant personnel de Milchan à l’époque, Hadas Klein, avait organisé une nouvelle réunion privée.

Filber a expliqué avoir fréquemment informé Netanyahu de ses réunions avec Milchan et du contenu de leurs entretiens.
« C’est Netanyahu qui m’avait demandé de le faire », a-t-il dit.
Filber a aussi noté qu’il avait recommandé à Netanyahu de ne pas s’opposer à la fusion.
Après la présentation, par les parties civiles, d’un texto écrit par Klein qui disait que leur « ami commun » (Netanyahu) se réjouissait d’avoir appris les dernières informations en date, Filber a expliqué qu’il avait parlé avec l’ex-Premier ministre des « progrès » que lui et Milchan avaient alors réalisés.
« Je lui avais dit que j’avais parlé avec Arnon, qu’on avançait… Que je faisais tout ce que me demandait Milchan. Netanyahu avait fait un signe d’approbation de la tête et on avait continué à faire comme ça », a-t-il dit.
Filber a également affirmé avoir dit au comptable personnel de Milchan que si des négociations devaient commencer concernant la fusion entre Keshet et Reshet, « nous n’interviendrons pas et nous créerons pas d’obstacle ».
Filber, jusqu’à présent, avait témoigné dans l’Affaire 4000, qui est la plus grave des trois affaires impliquant Netanyahu. Il est considéré comme un témoin déterminant dans ce dossier.
L’Affaire 4000 est assurément la plus sérieuse impliquant l’ancien Premier ministre. Netanyahu est accusé d’avoir privilégié, de manière illicite et lucrative, les intérêts commerciaux de Shaul Elovitch, actionnaire majoritaire de la compagnie médiatique Bezeq, en échange d’une couverture positive de ses actions sur le site d’information Walla, propriété d’Elovitch.

Filber est actuellement interrogé par le Parquet lors de son contre-interrogatoire, le ministère public cherchant à confronter le témoin aux versions apparemment contradictoires qu’il a données lors de son interrogatoire par la police et lors de son passage devant les juges.
Les procureurs accusent Filber d’être revenu devant la cour sur ses propos et de minimiser l’implication directe de Netanyahu sur les événements, ainsi que l’impact de ses interventions sur les agissements de Filber.
La semaine dernière, les procureurs ont demandé à ce que Filber soit traité comme un « témoin hostile » en raison des changements survenus dans son témoignage. Une requête à laquelle ils ont accepté de renoncer pour le moment, tant qu’ils seront encore autorisés à mener le contre-interrogatoire.
Lorsqu’un témoin est déclaré hostile, les procureurs peuvent le contre-interroger et demander aux juges d’accorder plus de poids à ses déclarations antérieures qu’à son témoignage devant le tribunal.
Filber a nié toute tentative de tromper le parquet ou de faire volte-face sur ses témoignages, expliquant que toutes les différences intervenant dans ses déclarations étaient le résultat « de la complexité de la situation ». Il a par ailleurs reproché aux enquêteurs de police d’avoir tenté de simplifier outre-mesure ses propos.
« J’ai essayé d’expliquer la complexité [de la situation] aux enquêteurs de la police, mais ils ne voulaient pas entendre », a expliqué Filber à la cour. « Ils ne voulaient pas que je leur donne une vue d’ensemble de la situation, ils ne voulaient qu’un ‘oui’ ou un ‘non’. «