Réforme et sécurité : les avertissements du Renseignement militaire à Netanyahu
Selon le renseignement, les ennemis d'Israël – et notamment le Hezbollah et l'Iran – y voient une faiblesse et une opportunité de modifier l'équilibre des pouvoirs en leur faveur

La Direction du renseignement militaire aurait adressé quatre courriers au Premier ministre Benjamin Netanyahu pour l’avertir des conséquences du projet de réforme judiciaire sur la sécurité du pays, la dernière en date lui étant parvenue quelques jours avant que le vote par la Knesset de la première loi, cette semaine.
Les autorités du renseignement y expliquent que les ennemis d’Israël, en particulier l’Iran et son organisation terroriste par procuration, le Hezbollah, voient dans les profonds clivages qui déchirent Israël sur la question de la réforme judiciaire – pour eux, un signe de faiblesse – une occasion unique de modifier l’équilibre des forces en leur faveur, a rapporté vendredi le quotidien Yedioth Ahronoth, sans citer les sources ni lesdites lettres.
Selon le Yedioth Ahronoth donc, les ennemis d’Israël voient en cet été 2023 le point le plus bas de l’histoire d’Israël, et les autorités israéliennes du Renseignement craignent pour la dissuasion. Elles estiment que l’Iran et le Hezbollah préfèrent pour l’instant attendre l’effondrement d’Israël de l’intérieur, du fait de la crise, mais le risque de d’escalade est malgré tout le plus élevé depuis la deuxième guerre du Liban, en 2006.
Toujours selon les mêmes sources, l’armée en aurait déduit que les ennemis d’Israël estimaient sa sécurité assurée par quatre pivots : l’armée, la relation forte avec les États-Unis, l’économie forte et la forte cohésion interne. Or, tous ces éléments sont affaiblis par la longue crise autour de la réforme judiciaire.
Le chef d’État-major de Tsahal, le lieutenant-général Herzi Halevi, s’est entretenu avec Netanyahu lundi, sans doute pour évoquer ces craintes.
Le même jour, la Knesset a promulgué la loi privant le pouvoir judiciaire du droit de révoquer les décisions de l’Exécutif jugées « déraisonnables », et ce en dépit des manifestations de masse répétées, de l’opposition de nombreuses personnalités du monde judiciaire, de la sécurité et de l’économie et des réservistes de Tsahal qui n’effectueront plus leur temps de réserve.

Mardi, l’armée a annoncé que sa préparation au combat serait sérieusement compromise si des milliers de réservistes occupant des postes clés, en particulier les pilotes, n’effectuaient pas leur temps de réserve sur une longue période.
Selon des éléments fournis par Tsahal vendredi, le chef de l’armée de l’air israélienne, le major-général Tomer Bar, aurait dit lors d’une récente réunion à haut niveau que les ennemis d’Israël pourraient profiter de la situation délicate avec les réservistes pour tester l’armée israélienne.
« Nous avons à l’évidence plusieurs problèmes. Je suis bien conscient des menaces, dans tous les domaines, et de ce que disent nos ennemis. Il est possible qu’à un moment comme celui-ci, ils décident de tester nos frontières, notre cohésion et notre vigilance », a déclaré Bar lors de cette réunion, en présence des chefs des différents escadrons et unités de l’armée de l’air israélienne.
« Il nous faut rester vigilants et prêts à tout. Et je suis sûr que nous le serons », a-t-il ajouté.
Lundi dernier, à la demande de Netanyahu et du ministre de la Défense Yoav Gallant et avant le vote de la loi sur le « caractère raisonnable », Tsahal a envoyé deux généraux à la Knesset pour informer les ministres de haut rang des menaces qui pèsent sur l’armée et son état de préparation.

Seuls trois ministres ont accepté de voir le chef de la Direction du renseignement militaire, le major-général Aharon Haliva, et le chef de la Direction des opérations, le major-général Oded Basiuk, pour cette séance d’information. Selon la Douzième chaine, il s’agirait du ministre de l’Agriculture Avi Dichter, de la ministre du Renseignement Gila Gamliel et du ministre des Affaires étrangères Eli Cohen, ce dernier ayant eu un briefing téléphonique.
Par ailleurs, le gouvernement de Netanyahu est en délicatesse avec les États-Unis et l’administration Biden, qui critiquent les pressions et actions du gouvernement en Cisjordanie, tandis qu’Israël s’inquiète de la conclusion d’un accord nucléaire provisoire entre l’Iran et les États-Unis.
A l’occasion d’un discours donné cette semaine, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, s’est réjoui qu’Israël soit « en voie de disparition », en raison des manifestations chaotiques.
« Israël était autrefois considéré comme une puissance régionale imbattable. Les pays de la région prenaient la menace qu’elle représentait comme un fait établi », a déclaré Nasrallah, ajoutant que « sa conscience et sa confiance en soi s’étaient détériorées, comme en témoigne la crise qu’elle traverse aujourd’hui ».

Les tensions à la frontière entre Israël et le Liban sont récemment montées d’un cran après que le Hezbollah a installé des tentes sur ce que les organisations internationales considèrent faire partie du territoire israélien, à proximité de la barrière frontalière.
Israël tente depuis début juin de retirer deux tentes placées par le Hezbollah dans la zone contestée du mont Dov, également connue sous le nom de Fermes de Chebaa. Une tente a été retirée suite à l’envoi par Israël d’un message au Hezbollah le menaçant d’une confrontation armée s’il ne retirait pas l’avant-poste.
Mais il y a deux semaines, Nasrallah a fait savoir que la tente restante ne bougerait pas, agitant la menace d’une attaque si Israël faisait mine de vouloir la retirer.
La zone du mont Dov, où les tentes ont été installées, également connue sous le nom de fermes de Chebaa, a été prise à la Syrie par Israël pendant la guerre des Six Jours, en 1967, puis annexée avec les hauteurs du Golan et le village de Ghajar.
Le gouvernement libanais revendique cette région.