Sarah Halimi : la juge rejette la demande de requalification antisémite
Pour Anne Ihuellou, les parties civiles ne sont pas fondées à demander dans ce cadre une requalification de la mise en examen
Neuf mois après le meurtre de Sarah Halimi, la juge d’instruction n’a pas donné suite à une demande du parquet de Paris pour retenir le caractère antisémite et a rejeté lundi une demande similaire des parties civiles, a appris mardi l’AFP de source proche du dossier.
L’avocat des enfants de cette femme juive, morte défenestrée par son voisin musulman le 3 avril 2017 à Paris, avait réclamé en décembre la requalification des faits en « assassinats » et avec la circonstance aggravante de l’antisémitisme.
Lundi, la juge Anne Ihuellou a refusé cette requête au motif que les parties civiles n’étaient pas fondées selon elle à demander dans ce cadre une requalification de la mise en examen, selon son ordonnance consultée par l’AFP.
La demande du parquet de Paris de retenir le caractère antisémite du meurtre, formulée voici quatre mois, est restée sans réponse à ce jour. Le 20 septembre, après la remise du rapport d’expertise psychiatrique du suspect, le parquet avait requis que le caractère antisémite soit retenu, à la « satisfaction » des responsables juifs qui l’avait réclamé sans relâche.
La juge peut néanmoins encore procéder à tout moment à une requalification de la mise en examen.
Interné aux lendemains du drame, le suspect, Kobili Traoré, a été mis en examen le 10 juillet pour meurtre, sans que soient retenus la préméditation ni la motivation antisémite, au grand dam des parties civiles.
Le meurtre de cette ancienne directrice de crèche confessionnelle, juive orthodoxe âgée de 65 ans, a suscité une très vive émotion, dans la communauté juive et au-delà.
Dans la nuit du 3 au 4 avril, dans un immeuble HLM du quartier populaire de Belleville, ce jeune homme de 27 ans s’était introduit dans l’appartement de sa voisine, Lucie Attal, aussi appelée Sarah Halimi.
Aux cris d’ « Allah Akbar », entrecoupés d’insultes et de versets du Coran, ce jeune musulman l’avait rouée de coups sur le balcon, avant de la défenestrer. « J’ai tué le sheitan » (le démon, en arabe), avait-il hurlé.
L’expertise a conclu que le suspect avait été pris ce jour-là d’une « bouffée délirante aiguë » après une forte consommation de cannabis, mais que ce trouble psychotique n’était « pas incompatible avec une dimension antisémite » et n’écartait pas sa responsabilité pénale.
Dans son ordonnance rendue lundi, la juge a également refusé de procéder à une reconstitution en présence du suspect, au motif qu’il reconnaissait les faits et que les éventuelles circonstances aggravantes « ne sauraient être établies par la reconstitution ».
Début janvier, le président du consistoire, Joël Mergui, a déploré que « la justice de notre pays n’a toujours pas retenu la circonstance aggravante d’antisémitisme » dans cette affaire, recensée par le gouvernement israélien au nombre des actes antisémites commis en 2017 dans le monde.