Suède : le camarade de Salwan Momika condamné pour « incitation à la haine »
Salwan Momika a été tué par balles après avoir suscité la colère de pays musulmans en brûlant des exemplaires du Coran
Le camarade de Salwan Momika, l’homme tué la semaine dernière en Suède après avoir suscité la colère de pays musulmans en brûlant des exemplaires du Coran, a été condamné lundi pour « incitation à la haine », un verdict qui a rouvert le débat sur la liberté d’expression.
Salwan Momika, 38 ans, a été tué par balles au sud-ouest de Stockholm dans la nuit de mercredi à jeudi, jour où le tribunal devait rendre son jugement sur ces accusations portées contre lui et son camarade Salwan Najem, âgé de 50 ans.
La décision avait été reportée à ce lundi à cause du meurtre de Salwan Momika.
« Il existe un large espace, dans le cadre de la liberté d’expression, pour être critique à l’égard d’une religion dans un débat factuel et sérieux », a souligné le juge Göran Lundahl, cité dans un communiqué.
La cour s’est penchée sur quatre rassemblements au cours de l’été 2023 pendant lesquels les deux hommes avaient mis le feu au texte sacré des musulmans, tout en faisant des remarques désobligeantes sur l’islam.
A deux occasions, du bacon avait été glissé entre les pages ou autour du livre.

« Le fait de s’exprimer sur une religion ne donne pas pour autant un permis de dire ou faire n’importe quoi sans risquer d’offenser le groupe dont c’est la croyance », a-t-il ajouté.
Les relations entre la Suède et plusieurs pays du Moyen-Orient s’étaient détériorées à l’été 2023 en raison des actes de profanation du Coran perpétrés par les deux hommes.
« Mépris envers la population musulmane »
« Même si l’intention était de critiquer l’islam en tant que religion, le comportement et les actes ont clairement dépassé les limites d’un débat et d’une critique factuels », a estimé le tribunal. « A chaque occasion, du mépris (a été) exprimé envers la population musulmane ».
Le tribunal a condamné Salwan Najem à une amende de 4.000 couronnes suédoises (350 euros). Ce dernier a fait appel de cette décision.
Fin juin 2023, Salwan Momika, un réfugié irakien de confession chrétienne, avait piétiné un exemplaire du Coran avant d’en brûler quelques pages, devant la plus grande mosquée de Stockholm.
En réaction, des manifestants irakiens avaient pris d’assaut l’ambassade de Suède à Bagdad à deux reprises en juillet 2023, déclenchant la seconde fois des incendies dans l’enceinte de la représentation diplomatique.
Le gouvernement suédois a condamné ces profanations tout en rappelant que la liberté d’expression et de réunion était protégée par la Constitution.
Défense de la liberté d’expression
La décision du tribunal de Stockholm a suscité de vives réactions dans le pays scandinave.
« Si l’on regarde ce que disent respectivement Momika et Najem dans la transcription de l’enquête préliminaire, je dirais que Najem s’exprime sur le Coran, sur Mahomet et sur l’islam, ce qui, selon moi, relève de la liberté d’expression », a dit à la chaîne SVT Nils Funcke, spécialiste de ces questions.
Salwan Momika, à l’inverse, s’était exprimé de manière virulente sur les musulmans en tant que groupe, les comparant à plusieurs occasions à des insectes ou des cafards, selon le jugement consulté par l’AFP.
« On fait porter (à Najem) la responsabilité de ce que Momika a dit », estime M. Funcke.
Ce jugement signifie aussi qu’il sera plus difficile de critiquer les religions, « qu’il s’agisse de l’islam, du christianisme ou du judaïsme », ajoute-t-il.
Dans une chronique publiée dans le quotidien de référence Dagens Nyheter, le journaliste Erik Helmerson juge au contraire qu’une condamnation pour incitation à la haine est dans ce cas pleinement justifiée.
« On peut tout à fait défendre l’idée que cela devrait être autorisé en Suède. Mais il existe une loi sur l’incitation à la haine, et il est difficile de trouver un exemple plus clair de sa violation », écrit-il.
Les deux hommes ont, lors de ces réunions publiques, affirmé que les « musulmans sont attirés sexuellement par les enfants », et qu’ils constituent le « peuple le plus sale de la planète », rappelle-t-il.
En août 2023, le service de renseignement suédois avait relevé son niveau de menace à quatre sur une échelle de cinq après ces profanations du Coran.
Le gouvernement étudie depuis les moyens légaux d’interdire les manifestations au cours desquelles des livres religieux seraient profanés.