Un court-métrage imagine une issue heureuse – et japonaise – pour l’otage Guy Gilboa
Le fan d'animation, âgé de 22 ans, devait se rendre au Japon avant d'être enlevé par des terroristes le 7 octobre 2023 ; son histoire est racontée dans "Guygu", film d'animation de six minutes

Les fans d’anime – l’animation japonaise – ont tendance à se retrouver autour de leur passion commune et c’est justement ce qui a incité le vidéaste Jordan Barr à s’intéresser plus particulièrement à l’otage Guy Gilboa-Dalal, enlevé le 7 octobre 2023 sur les lieux de la rave Nova le jour du pogrom commis par le Hamas, et qui est aujourd’hui encore aux mains des geôliers du Hamas dans la bande de Gaza.
La passion de Gilboa-Dalal pour tout ce qui est japonais – à commencer par la langue, qu’il avait commencé à apprendre seul en prévision d’un voyage là-bas – a été évoquée à de nombreuses reprises par sa famille au cours de ces 17 derniers mois.
Barr, qui est cofondateur et propriétaire du Studio Pixel, à Tel Aviv, s’était déjà rendu au Japon avant le 7 octobre. Et il se trouvait à une conférence consacrée à l’anime, au mois de mars dernier, lorsqu’il a entendu parler de l’intérêt porté par Gilboa-Dalal au Japon.
C’est cette passion partagée qui a donné à Barr et à son co-réalisateur, Chen Heifetz, l’idée de passer plusieurs mois à réaliser « Guygu », un film d’animation de six minutes qui est consacré à Gilboa-Dalal et à son amour pour la culture japonaise – un amour qui, souhaitons-le, l’aura aidé à survivre aux tortures et à la captivité aux mains du Hamas.
La bande-annonce de ce court-métrage a été projetée en avant-première ce dimanche à Harucon, l’une des plus grandes conventions d’anime et de manga d’Israël, qui se tient chaque année au moment de la fête de Pourim au Centre international des congrès de Jérusalem.
Le frère aîné et la sœur cadette de Guy, Gal Gilboa-Dalal et Gaya Gilboa-Dalal, étaient présents dimanche et Gal a parlé au public de son frère et de leur amour mutuel pour l’anime.
Gilboa-Dalal a souligné que les costumes revêtus par le public – pour la plupart des cosplay de bandes dessinées ou de jeux vidéo – étaient la preuve que c’était là le public rêvé pour projeter cet hommage à Guy.
La bande-annonce imagine Gilboa-Dalal – dont le visage nous est familier à cause des affiches d’otages – dans divers endroits. Il est par exemple entouré de cerisiers en fleurs, vêtu d’un kimono à manches courtes. On y entend les voix de Gal, de Gaya et de leurs parents. On y voit Gilboa-Dalal se frapper le torse tandis que la voix de sa mère dit : « Guygu, si tu te sens en danger, donne-toi un coup sur la poitrine. » C’est, en effet, ce que sa mère lui disait en permanence, explique le réalisateur Barr, car elle avait le sentiment que quelque chose de terrible pouvait lui arriver.

Les Gilboa-Dalal ont souvent imaginé Guy en train de se frapper la poitrine pendant ses 17 mois de captivité, pour lui rappeler que même lorsque les choses semblaient impossibles, sa famille était à ses côtés.
Guy Gilboa-Dalal s’était rendu à la rave Nova, qui était organisée dans le désert, le 6 octobre 2023 en compagnie de trois de ses amis : cette sortie était prévue depuis des mois. Il y avait retrouvé son frère, Gal, arrivé tôt dans la matinée du 7 octobre.
Les deux frères s’étaient embrassés et ils avaient pris la pose le temps d’un selfie, que Guy avait envoyé à leur mère. Lorsque les terroristes du Hamas étaient passés à l’attaque, à 6h30 du matin, les frères avaient tenté de s’échapper, chacun dans une voiture séparée, à quelques minutes d’intervalle. Ils s’étaient retrouvés à plusieurs reprises dans l’énorme embouteillage qui s’était formé à la sortie du festival et ils avaient été séparés par les tirs des terroristes.

Il avait fallu près de sept heures et demie à Gal Gilboa-Dalal pour s’échapper, courant et se cachant dans les champs, sous les tirs, sans aucune nouvelle de son frère.
Au bout de quelques heures, la famille avait découvert une vidéo de Guy et de son meilleur ami, Evyatar David, pris en otage à Gaza, ainsi que des images les montrant ligotés, allongés dans un tunnel. Gilboa-Dalal et David se connaissent depuis la maternelle – il semble qu’ils soient détenus ensemble à Gaza. Les signes de vie les plus récents datent d’une vidéo du Hamas dans laquelle on les voit, éperdus, forcés d’assister à la remise en liberté d’autres captifs par le groupe terroriste…

Comme tant d’autres d’Israéliens, Barr connait bien une famille dont un proche a été pris en otage. Il s’était en effet rapidement rendu compte après le pogrom du 7 octobre qu’Omer Shem Tov, le fils de Malki Shem Tov, son collègue du monde des médias, avait été enlevé au festival de musique électronique Nova.
Barr avait immédiatement contacté les Shem Tov. « Quand j’ai pris conscience qu’il s’agissait bien d’Omer, j’ai eu toutes les peines du monde à y croire. J’ai proposé de faire tout ce qui pourrait aider », explique Barr. Il a ainsi pris part à plusieurs petits projets, comme par exemple la transformation en vidéo d’un podcast enregistré par Shelly Shem Tov.
« Omer est un otage que je connaissais. J’ai toujours pensé à lui », confie Barr.
Mais quand il a entendu parler de la passion de Guy pour le Japon, il a eu l’idée du film et il est allé voir la famille Gilboa-Dalal.

« Il y avait quelque chose d’intéressant dans son histoire », poursuit Barr. « Celle d’un jeune homme de 22 ans qui aime le Japon et qui a appris le japonais en autodidacte. J’ai compris à quel point c’était important pour lui. »
Barr a lancé une campagne de financement participatif au mois de novembre 2024 afin de collecter des fonds. Objectif : créer « Guygu », le titre venant du petit surnom donné à Guy par ses proches.
Il y a des traits de « Guygu » qui ne sont pas purement japonais, précise Barr. La plupart des anime tournent en effet autour de l’ambivalence, un état d’esprit qui parle aux Japonais, explique-t-il. Alors que « l’histoire de Guy n’est pas ambivalente », poursuit-il. « Ce qui est arrivé à Guy, et tout ce qui entoure la captivité, c’est très binaire – c’est noir ou c’est blanc. »
Ce qui n’a pas empêché Barr d’apporter des touches oniriques dignes des anime à ce court-métrage, car sa famille et ses amis veulent croire que Guy s’accroche à ses rêves, même détenu dans une petite cellule, dans les tunnels sans air du Hamas, sous Gaza.
« J’ai dit à son père que Guy s’imaginait peut-être que son ravisseur était un samouraï et qu’il réussissait à fausser compagnie aux Japonais », poursuit Barr.
La création de ce film et l’implication des Gilboa-Dalal a ému la famille toute entière, confie Barr, qui a le sentiment que cette initiative fait partie intégrante du processus visant à faire revenir Guy.
« Les gens m’ont dit que je ne pouvais pas faire un film sur lui tant que toute cette histoire n’était pas terminée », se rappelle Barr. « Je leur répondais que cela n’avait pas d’importance, que l’histoire de Guy existerait toujours. Nous nous contentons de la raconter, libre à chacun de l’interpréter comme il le souhaite. »

La projection de la bande-annonce à Harucon m’a paru être une bonne idée, ajoute Barr. La famille de Guy était présente lors de la convention d’anime de Pourim, l’an dernier, et Guy lui-même y avait assisté les années précédentes.
« C’est un lieu dédié à l’anime, c’était une bonne chose », poursuit-il.
Une fois le court-métrage prêt, dans quelques semaines, Barr entend le diffuser le plus largement possible. « Il montre le monde de Guy et raconte cette histoire, même s’il le fait avec plus de douceur », conclut Barr. « C’est aussi un hommage, à Guy et à la technique. »
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