Un éminent cheikh palestinien réclame le droit à « l’auto-défense » sur le mont du Temple
Ekrima Sabri, l’ancien dirigeant religieux pour Jérusalem de Yasser Arafat, déclare que la violence est justifiée dans le combat contre les "extrémistes juifs"
Elhanan Miller est notre journaliste spécialiste des affaires arabes
Furieux de la confiance croissante de l’activisme juif sur le mont du Temple et du manque de soutien perçu qu’ils reçoivent du gouvernement israélien, un ancien dirigeant religieux islamique a justifié la violence musulmane sur le lieu saint pour légitimer l’auto-défense devant le danger imminent.
Le cheikh Ekrima Sabri, qui avait été le plus important membre du clergé de l’Autorité palestinienne entre 1994 et 2006, a déclaré au Times of Israel que le loi islamique reconnaît le droit aux croyants de passer le nuit dans une mosquée et de prier, un acte religieux connu en arabe comme i’tikaf. Lorsque cela est fait dans le but de défendre la mosquée d’une agression externe, l’acte est reconnu comme un acte de ténacité religieuse, ou ribat.
Il a affirmé que les « extrémistes juifs » avaient accru leurs efforts pour encourager la montée religieuse sur le mont du Temple, le lieu le plus saint du Judaïsme et le troisième lieu le plus saint de l’Islam, le foyer du sanctuaire al-Haram ash-Sharif et de la mosquée al-Aqsa, durant les fêtes juives, qui ont commencé dimanche et finissent le 5 octobre.
« A qui nous opposons-nous ? Seulement aux Juifs extrémistes qui viennent avec des intentions agressives, qui veulent attenter à al-Aqsa, construire [le troisième] temple [juif] ou prier ouvertement », a-t-il déclaré. Pour éviter un embrasement, la police interdit aux Juifs de prier sur le mont, le site des deux temples juifs.
« Pourquoi entrent-ils avec des forces [de police] ? » a-t-il continué. Ils le font parce qu’ils ont peur d’être chassés. Un Juif américain, par exemple peut venir, visiter et partir, sans causer de provocation ni faire des pratiques juives. Il y a une différence entre lui et un Juif extrémiste qui vient pour porter atteinte à al-Aqsa ».
Mercredi, à la suite de trois jours d’affrontements entre des activistes musulmans et la police sur le mont du Temple, le porte-parole de la police israélienne Micky Rosenfeld a déclaré que les forces israéliennes étaient entrées sur le mont du Temple tôt dimanche matin après avoir reçu des informations indiquant que des activites musulmans avaient l’intention d’attaquer des visiteurs juifs du site, le matin lors des heures de visite.
« L’entrée de la mosquée al-Aqsa était bloquée par des barres de fer », a déclaré Rosenfeld au Times of Israel. Des blocs de bois bloquaient l’entrée. De l’intérieur de la mosquée, 50 à 60 Palestiniens masqués tiraient des feux d’artifice et lançaient des pierres sur les policiers, qui ont dû retirer les barricades à l’entrée de la mosquée al-Aqsa et fermer la porte principale, sans entrer dans la mosquée. Les émeutiers ont été empêchés de sortir et étaient, en fait, enfermés à l’intérieur ».
Les mêmes tensions ont eu lieu lundi et mardi, lors de la fête du Nouvel An juif de Rosh Hashana. Rosenfeld a déclaré que « deux petits tuyaux de métal remplis d’explosifs » ont été trouvés à l’entrée de la mosquée al-Aqsa.
Le porte-parole de la police s’est efforcé à souligner que la police n’était pas entrée dans la mosquée elle-même, mais pour le cheikh Sabri cela semblait être un point secondaire. La police a outrepassé son autorité lors des quatre derniers jours en fermant les portes de mont du Temple, a-t-il déclaré, et en coupant dans le même temps l’électricité à la mosquée et à ceux qui y étaient assiégés.
« Pourquoi la police a-t-elle placé des barricades ? Pourquoi nous provoque-t-elle ? a déclaré Sabri. Nous plaçons la responsabilité directe sur le gouvernement. Nous l’accusons avant même d’accuser les groupes extrémistes juifs ».
Selon Sabri, l’activité religieuse juive sur le mont du Temple a commencé lors du mandat d’Ariel Sharon en 2001, et a augmenté depuis lors. (La visite de Sharon sur le mont du Temple en septembre 2000 en tant que chef de l’opposition a été mentionnée comme l’élément déclencheur de la seconde intifada (soulèvement) sanglante palestinienne dans laquelle Israël a été visé par des vagues d’attentat suicide à la bombe). L’engagement du Premier ministre Benjamin Netanyahu pour les « extrémistes » est total, a affirmé Sabri, évoquant la visite dimanche du ministre de l’Agriculture israélien, Uri Ariel, sur le site.
Des limites à « l’auto-défense » des musulmans ?
Sabri n’a pas nié l’existence d’armes dans la mosquée, mais l’a justifiée comme de « l’auto-défense ».
Il a indiqué que les principaux acteurs de la violence sur le site étaient des lycéens d’un des trois lycées situés sur le mont du Temple, qui avaient été empêchés d’entrer sur les lieux par la police depuis dimanche.
Les musulmans souhaitant rester à la mosquée la nuit n’avaient besoin d’aucune permission du Waqf, les fonctionnaires des Affaires islamiques jordaniennes surveillant le site, a déclaré Sabri. En fait, il a vu les activistes comme des volontaires fournissant du renfort au personnel du Waqf.
« Le nombre des hommes du Waqf est très réduit, et ils ne peuvent pas s’opposer [aux visiteurs juifs], a-t-il déclaré. [Les volontaires musulmans] viennent la veille et passent la nuit, comme cela, ils sont prêts à défier les agresseurs ».
Mais « l’auto-défense » a-t-elle des limites ? Une action peut-elle être considérée comme trop dangereuse par les autorités officielles sur le site ? Sabri, qui dirige actuellement le Haut Conseil Islamique sur le mont du Temple, créé, selon sa page Facebook, pour « protéger les lieux saints et particulièrement la mosquée bénie d’al-Aqsa », est resté évasif.
« Lorsqu’une maison de Dieu est attaquée, c’est pire que si l’on m’attaque personnellement, a-t-il déclaré. Al-Aqsa fait partie de notre foi. Défendre notre foi est la plus puissante forme de défense ».