Israël en guerre - Jour 593

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Un médecin de Gaza dénonce l’infiltration des hôpitaux de l’enclave par les groupes terroristes

L'homme a suscité la controverse sur internet après avoir révélé les initiatives prises par les terroristes qui veulent utiliser l'hôpital Nasser de Khan Younès, révélant avoir été "ouvertement menacé"

Nurit Yohanan est la correspondante du Times of Israel pour le monde arabe et palestinien.

Des soldats israéliens montrent aux médias un tunnel souterrain découvert sous l'hôpital Shifa à Gaza City, le 22 novembre 2023. (Crédit : AP/Victor R. Caivano)
Des soldats israéliens montrent aux médias un tunnel souterrain découvert sous l'hôpital Shifa à Gaza City, le 22 novembre 2023. (Crédit : AP/Victor R. Caivano)

Mohammed Sakar, le chef du service des soins infirmiers à l’hôpital Nasser de Khan Younès, a posté un message très inhabituel sur son compte Facebook, la semaine dernière.

Dans sa publication, le médecin – qui fait également office de porte-parole de l’hôpital – laissait entendre qu’il avait été menacé par le Jihad islamique palestinien en raison de son refus de laisser les agents du groupe terroriste pénétrer dans l’hôpital pour l’utiliser.

« En tant que chef de service, j’ai déployé tous les efforts possibles pour rouvrir l’hôpital et j’ai réussi… à le mettre au service exclusif des blessés », a écrit Sakar sur le réseau social. « J’ai veillé à ce que les salles de l’hôpital ne soient utilisées que par les patients, et non par les personnes déplacées… De cette façon, j’ai réussi à garder l’hôpital en sécurité et je suis parvenu à échapper aux menaces de fermeture ».

Et aujourd’hui, a-t-il révélé, « je suis ouvertement menacé – même si j’ai expliqué à ceux qui sont venus me voir dans mon bureau que toutes les mesures que j’avais prises visaient à protéger l’hôpital ».

« Dieu ne vous pardonnera pas, » a-t-il ajouté.

Dans le message, la photo d’une note que Sakar avait apparemment reçue : « Mon cher, tu as dépassé les bornes, fais attention ! ». Une note signée par Saraya al-Quds, en référence à la branche armée du groupe terroriste palestinien du Jihad islamique.

Le post a été supprimé quelques jours après sa publication. Sakar n’a plus rien publié sur Facebook et il n’est plus apparu dans les médias depuis.

Le docteur Marwan al-Hams, directeur du département des hôpitaux de campagne à Gaza, examine les destructions à l’intérieur d’un bâtiment de l’hôpital Nasser au lendemain d’une frappe aérienne israélienne à Khan Younès, dans la bande de Gaza, le 24 mars 2025. (Crédit : AP/Abdel Kareem Hana)

Ces révélations au grand jour sont l’un des (très) rares exemples de professionnels de la santé, à Gaza, qui ont cherché à s’attaquer aux tentatives d’infiltration des hôpitaux de la part des groupes terroristes. D’après de nombreux témoignages, ces tentatives sont largement répandues dans la majorité des établissements hospitaliers de la bande.

Tout au long de la guerre, Israël a envoyé à plusieurs reprises des soldats dans les hôpitaux. Objectif : éliminer les infrastructures terroristes et les hommes armés qui se trouvaient à l’intérieur. Le pays a également fourni des preuves de l’utilisation régulière de ces installations par les groupes terroristes qui s’en servent comme bases d’opération – les hôpitaux bénéficiant d’une protection. Mais peu de témoignages avaient jusqu’à présent été volontairement apportés par les habitants de Gaza eux-mêmes.

Le Times of Israel est entré en contact avec un autre médecin de l’hôpital Nasser, qui a souhaité conserver l’anonymat pour des raisons de sécurité. Il a refusé de dire s’il avait lui aussi été menacé, le sujet étant sensible. Il s’est contenté de dire que « en ce qui concerne les menaces, c’est à la direction de l’hôpital de s’en occuper. Nous, les équipes médicales, nous ne nous impliquons pas dans la politique ».

Le post écrit Sakar a suscité des réactions en ligne de la part des habitants de Gaza. Mustafa Asfour, un résident de Gaza City qui, dans le passé, avait été incarcéré par le Hamas et qui affirme que son frère a été frappé par des membres du groupe terroriste après des critiques écrites sur les réseaux sociaux, pendant la guerre, a noté sur son compte personnel sur X : « Le docteur Mohammed Sakar a reçu des menaces de mercenaires appartenant au Jihad islamique parce qu’il s’est opposé à la présence d’hommes armés à l’intérieur de l’hôpital. Toutes les organisations de mercenaires ont leurs voleurs ; ils veulent se saisir de la terre et la prendre entre leurs mains et ils veulent pouvoir jouer avec la vie des gens comme ils l’entendent ».

Un autre habitant de Gaza City, qui s’est exprimé sur X sous le nom d’Abu Malek al-Azzi, a écrit que « le responsable des soins infirmiers de l’hôpital Nasser reçoit des menaces de la part d’espions et de la progéniture impure de [l’ancien dirigeant suprême iranien Ruhollah] Khomeini… Les gens et la famille Sakar devront abattre quiconque s’attaquera à leur fils ».

Des armes trouvées par les troupes de l’armée israélienne fouillant l’hôpital Nasser, à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 février 2024. (Crédit : Armée israélienne)

Dans les jours qui ont suivi la publication écrite par Sakar, un autre incident a pointé des tensions liées aux tentatives du Hamas d’utiliser les hôpitaux de la bande. Au début de la semaine, des rumeurs ont circulé sur internet – des rumeurs qui laissaient entendre que l’hôpital Al-Amal de Khan Younès, géré par la Société du Croissant-Rouge, avait fermé ses portes et que les médecins étaient en grève pour protester contre les initiatives prises par les terroristes du Hamas qui essayaient de s’infiltrer dans l’enceinte. Des photos ont été diffusées montrant l’hôpital fermé et vide de patients. Toutefois, le lendemain, le Croissant-Rouge de Gaza a démenti la fermeture de l’hôpital.

Des incidents qui surviennent alors que le Hamas, à Gaza, fait l’objet de critiques croissantes au sein de l’enclave depuis la reprise de la guerre et depuis qu’Israël empêche l’aide humanitaire d’entrer dans la bande, ce qui a eu de graves répercussions sur la population de Gaza.

Preuves d’un double usage

Au cours des 18 derniers mois, l’armée israélienne a mené des raids terrestres dans la grande majorité des hôpitaux de la bande de Gaza – parfois à plus d’une occasion. Selon Tsahal, des combats ont eu lieu dans de nombreux établissements hospitaliers et, dans le sillage de ces opérations, ce sont des centaines de personnes qui ont pu être arrêtées à l’intérieur même de ces enceintes. Des munitions et des armes ont également été découvertes dans ces bâtiments et les détenus auraient déclaré, lors de leurs interrogatoires, que les hôpitaux avaient été utilisés comme abris par les groupes terroristes.

Au mois d’avril 2024, l’armée israélienne avait annoncé avoir lancé un raid sur l’hôpital Shifa. 200 terroristes avaient été tués et 500 autres hommes armés avaient été arrêtés – avec parmi eux des commandants du Hamas et du Jihad islamique palestinien. Des renseignements précieux avaient également été saisis, avaient noté les militaires à l’époque.

Au mois de décembre 2024, l’armée avait lancé un raid à l’hôpital Kamal Adwan, dans le nord de Gaza, après avoir constaté que des membres du Hamas avaient fait leur retour dans ce secteur. Tsahal avait ultérieurement diffusé des images de l’interrogatoire d’un terroriste placé en détention par les soldats à Kamal Adwan; Il affirmait, dans la séquence, que le Hamas utilisait l’établissement hospitalier comme refuge.

Le mois dernier, Israël a frappé une aile de l’hôpital Nasser, une attaque qui a entraîné la mort de deux personnes – dont Ismail Barhoum, un haut responsable du Hamas. Selon l’armée, Barhoum avait été nommé Premier ministre du Hamas dans la bande de Gaza après que son prédécesseur, Issam al-Daalis, a été tué lors de l’attaque surprise israélienne qui avait mis fin au cessez-le-feu, le 18 mars dernier.

Le 7 avril 2025, Israël a frappé un complexe voisin du secteur des communications, blessant Hassan Asleh, un journaliste proche du Hamas qui avait couvert le pogrom du 7 octobre. Les médias palestiniens ont signalé que d’autres journalistes avaient aussi été tués. Le complexe, adjacent à l’hôpital, existe depuis le début de la guerre et il a été régulièrement utilisé par les journalistes.

Des otages remis en liberté ont également déclaré avoir été détenus dans des hôpitaux pendant certaines périodes de leur captivité.

Des Palestiniens inspectent les dégâts autour de l’hôpital al-Shifa de Gaza après le retrait de l’armée israélienne du complexe abritant l’hôpital après deux semaines de combat contre des groupes terroristes, le 1er avril 2024. (Crédit : AFP)

Plus de 30 hôpitaux pour 2 millions de personnes

Selon les informations des Nations unies, il y avait environ 35 hôpitaux à Gaza avant que la guerre n’éclate dans le sillage du pogrom commis, le 7 octobre, dans le sud d’Israël. Un nombre qui n’est toutefois pas fixe et qui a tendance à fluctuer, en raison de l’existence de petits dispensaires médicaux, dont certains entrent dans la même catégorie que les hôpitaux.

Actuellement, selon des sources au fait de la situation humanitaire à Gaza qui se sont entretenues avec le Times of Israel, 14 établissements hospitaliers gouvernementaux continuent leurs activités sous le contrôle du Hamas, en plus des 14 hôpitaux de campagne qui ont été établis pendant la guerre grâce au financement international apporté par les organisations humanitaires et par les États arabes. De nombreux hôpitaux ont par ailleurs été endommagés et ils ont été fermés pendant la guerre.

C’est un nombre relativement élevé d’hôpitaux par habitant pour une population de 2 millions de personnes. À titre de comparaison, Israël, qui compte environ 9,9 millions d’habitants, dispose d’une vingtaine d’hôpitaux généraux et de quelques autres qui ne proposent pas de services d’urgences.

Ce nombre élevé d’établissements hospitaliers, à Gaza, est dû aux dons faits par les pays et par les organisations à but non-lucratif, des dons qui ont permis la création de nombre d’entre eux. Il est aussi dû à l’absence d’instance administrative qui s’efforcerait de les regrouper en mettant en place des hôpitaux plus importants. Néanmoins, la situation actuelle a autorisé des organisations terroristes à mener des opérations dans un grand nombre de ces structures.

Des pressions croissantes

Mais malgré tout, les hôpitaux de Gaza ont maintenu leurs activités – avec des médecins, des infirmiers et le personnel médical nécessaire – tout au long de la guerre, selon de nombreux rapports et selon de nombreux témoignages. C’est ce que des médecins venus de l’étranger ont également affirmé.

Selon l’organisation humanitaire israélienne Médecins pour les droits de l’Homme, des centaines d’employés du secteur médical à Gaza, toutes professions confondues, ont été arrêtés au cours des dix-huit derniers mois, et environ 150 d’entre eux sont toujours incarcérés en Israël. Le docteur Iyad al-Bursh, qui s’est entretenu avec le Times of Israel, avait été arrêté pendant des opérations menées par Tsahal à l’hôpital Shifa, l’année dernière, et il est resté en détention en Israël pendant dix mois avant d’être relâché, sans aucune mise en examen prononcée à son encontre. Il dit ignorer encore la raison ayant justifié son arrestation.

Al-Bursh explique au Times of Israel qu’il y a une grave pénurie de médicaments en raison de la décision prise par Israël de ne plus autoriser l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza depuis le début du mois de mars – et il ajoute que la situation dans le nord de la bande de Gaza est encore pire. De plus, les bombardements et les raids ont entraîné la fermeture ou un fonctionnement partiel des hôpitaux de Gaza. L’hôpital Shifa lui-même a été en grande partie détruit lors d’un raid militaire contre des terroristes pendant la guerre et, selon al-Bursh, il ne poursuit actuellement que des activités très limitées.

Al-Bursh affirme au Times of Israel qu’il n’a reçu aucune menace de la part d’une quelconque entité au cours de son travail à Shifa. « Les autorités médicales de Gaza prennent soin des médecins et du personnel et elles surmontent les obstacles », déclare-t-il, faisant référence à l’infrastructure contrôlée par le Hamas au sein de l’enclave côtière.

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