Un spectacle de marionnettes antisémite retiré du programme d’un musée de Cracovie
Un spectacle de la Nativité dans lequel on menaçait de frapper les Juifs, à qui on reprochait d'avoir "honte du Messie", a été supprimé par le musée de Cracovie
Cracovie, Pologne – Le Musée d’histoire de Cracovie, le plus important de la ville fait l’objet de demandes d’examen externe après avoir présenté une pièce de théâtre contenant des références au tabassage de Juifs.
La requête adressée au maire Jacek Majchrowski pour qu’il soumette le musée de Cracovie à un examen approfondi a été déposée mardi, à l’occasion de la journée israélienne de commémoration de la Shoah, par FestivALT, une organisation basée à Cracovie qui produit des événements artistiques et militants juifs, ainsi que par 11 autres groupes juifs et deux rabbins éminents.
Au début de l’année, le musée a publié sur sa chaîne YouTube et inclus dans une exposition destinée aux enfants l’enregistrement d’une pièce de théâtre de la famille Malik, bien connue à Cracovie pour ses mises en scène de représentations de la Nativité. Le musée a retiré la vidéo, qu’il avait diffusée pour célébrer le patrimoine régional en matière de scène de la nativité, ce mois-ci, à la suite d’un examen interne.
La vidéo, qui, selon le fondateur de FestivALT, a été visionnée par des milliers de personnes, montre les acteurs interprétant des chants où les juifs sont mentionnés à au moins 30 reprises. Certaines de ces mentions se font dans un contexte violent ou négatif. Le spectacle de marionnettes est centré sur un personnage qui semble être un juif orthodoxe à lunettes et un autre personnage, qui tient en main un bâton, et porte ce qui ressemble à un vêtement polonais traditionnel.
Alors qu’un marionnettiste anime les figurines, des acteurs de la troupe de la famille Malik chantent un duo des deux marionnettes. La voix du personnage tenant un bâton chante : « Juifs ! Juifs ! Je vais vous montrer, je vais vous montrer. Comme je vais vous frapper par derrière, comme je vais vous frapper par devant avec ce bâton ».
Plus tôt, la marionnette au bâton reproche à la marionnette juive de ne pas avoir reconnu Jésus-Christ comme le Messie. « Juifs ! Juifs ! Eh bien, tu y vois clair, tu y vois clair. Et pourquoi, pourquoi as-tu honte du Messie ? » chante l’acteur.
Plus tard dans le même spectacle, une marionnette blonde dit à la même marionnette juive : « Allez, Juif, ça suffit. Je vais t’apprendre quelque chose de nouveau. Savais-tu que nous avons un nouveau Messie ? ».
Le personnage juif demande alors : « Oh, qu’est-ce que cela va me rapporter ? » et le blond répond : « Oh Juif, homme cruel. Pour avoir offensé Dieu, tu seras puni par le pouvoir du diable. Que ne te ferais-tu pas subir à cause de ton manque de foi ? Tu découvriras la puissance impressionnante du diable infernal ».
Le fait que cette vidéo ait pu être intégrée aux documents et à l’exposition du prestigieux musée municipal témoigne d’un manque de sensibilisation à l’antisémitisme qui doit être corrigé, comme le souligne l’appel au maire. Il a été cosigné par le bureau d’Europe centrale du Comité juif américain, les principaux centres communautaires juifs de Varsovie et de Cracovie, le grand rabbin polonais Michael Schudrich et Eliezer Gurary, le principal émissaire du mouvement Habad-Lubavitch à Cracovie.
« Les événements et les activités des institutions culturelles de Cracovie ont permis la représentation des Juifs de manière stéréotypée et négative, ainsi que la reproduction et la justification de la violence à l’encontre des Juifs », indique la lettre, ajoutant que le fait que le public cible était les enfants était particulièrement scandaleux dans le cas du musée de Cracovie.
La lettre souligne également ce que les auteurs décrivent comme des progrès vers une plus grande sensibilisation à l’antisémitisme, comme la condamnation par les autorités municipales, en 2021, de la vente de figurines et de photos de Juifs orthodoxes, que certains Polonais et Ukrainiens aiment collectionner comme porte-bonheur. Mais l’incident du musée de Cracovie montre qu’il y a encore du travail à faire, estiment les auteurs de la lettre.
« Nous suggérons de créer une équipe d’experts pour représenter les groupes minoritaires et aider les institutions communautaires à adopter et à développer des comportements tolérants », écrivent les auteurs de la lettre.
Le bureau du maire n’avait pas encore répondu, au moment de la publication de l’article, aux demandes de commentaires des groupes juifs, et du Times of Israel.