Une start-up israélienne spécialisée dans le quantique lève 170 M de $
Selon Quantum Machines, qui est aidée par Intel, plus de 50 % des entreprises emploient sa technologie pour construire des ordinateurs quantiques. Les fonds iront au développement et à l'embauche
Sharon Wrobel est journaliste spécialisée dans les technologies pour le Times of Israel.

La start-up israélienne Quantum Machines a obtenu 170 millions de dollars de la part de bailleurs de fonds, dont la branche d’investissement d’Intel, alors que s’intensifie la course au développement d’une informatique quantique pratique et utile, avec le potentiel d’accélérer l’accès aux solutions des problèmes les plus complexes d’aujourd’hui.
Le tour de table a été mené par l’investisseur PSG Equity, basé à Boston, et a permis d’attirer la branche d’investissement d’Intel – Intel Capital, -, la société de capital-risque israélienne Red Dot Capital Partners et d’autres investisseurs déjà présents dans l’environnement de l’entreprise. L’investissement porte le financement total de la startup à ce jour à 280 millions de dollars.
Fondée en 2018 par des spécialistes multi-récompensés du domaine de l’électronique quantique – Itamar Sivan, Yonatan Cohen et Nissim Ofek -, Quantum Machines développe des technologies matérielles et logicielles pour aider les fabricants d’informatique quantique à exploiter, contrôler et gérer les processeurs quantiques. Ceux-ci sont au cœur de la réalisation du potentiel des ordinateurs quantiques. Leur plate-forme technologique reconnaît les erreurs qui se produisent dans le système quantique et est capable de les corriger en temps réel, explique la startup.
Les processeurs quantiques promettent une puissance de calcul de nature à résoudre les problèmes les plus complexes, là où les ordinateurs ordinaires échouent, afin de permettre des avancées significatives dans les domaines de l’économie, de la technologie, de la sécurité, de l’ingénierie et de la science, ou encore ceux de la découverte de nouveaux médicaments, la cryptographie, la modélisation financière ou la logistique de la chaîne d’approvisionnement.
« Transformer un processeur quantique en un ordinateur quantique fonctionnel est un immense défi technique », explique Cohen, directeur technique de Quantum Machines. « Il faut pour cela contrôler avec précision le système quantique, traiter d’énormes quantités de données en temps réel et orchestrer des algorithmes complexes avec des processeurs quantiques et classiques. »
« Notre plateforme intègre de manière unique toutes ces capacités, ce qui permet aux équipes de passer rapidement des innovations dans leurs laboratoires au déploiement dans les centres de données », ajoute-t-il.

S’adressant au Times of Israel, Sivan explique que ces fonds arrivent à point nommé dans le développement de l’informatique quantique, alors que les géants de la technologie comme Google, Microsoft, IBM ou Intel font au plus vite depuis un an pour sortir des réalisations révolutionnaires, dans le but de rendre l’informatique quantique plus fonctionnelle et accessible que jamais.
La semaine dernière, Microsoft a dévoilé sa puce quantique qui, selon elle, est la preuve que l’horizon des ordinateurs quantiques capables de résoudre des problèmes significatifs est de l’ordre « de quelques années, pas de décennies ». En décembre dernier, Google avait déjà présenté sa propre puce quantique appelée Willow.
« Rien ne stimule autant l’économie ou l’industrie mondiale que le besoin en puissance de calcul, car les ordinateurs quantiques ont le potentiel de libérer une puissance de calcul incroyable capable d’effectuer en quelques minutes, heures ou jours, selon le problème, des calculs qui prendraient des millions d’années aux systèmes d’aujourd’hui », poursuit Sivan. « Nous avons développé une technologie universelle dans le sens où elle peut fonctionner avec n’importe quel ordinateur quantique et n’importe quel type de processeur quantique. »
« C’est ce qui nous a permis de faire de plus de 50 % des organisations et entreprises développant des ordinateurs quantiques dans le monde des clients qui utilisent notre technologie et nos systèmes, et nous avons bon espoir de poursuivre sur cette lancée », ajoute-t-il.
Quantum Machines ne donne pas le nom de ses clients, mais on sait que la startup a noué des partenariats avec le géant américain des puces Nvidia, Rigetti Computing, Applied Materials, Toyota Tsusho Corporation et QuantWare.
L’informatique quantique exploite la mécanique quantique et la physique abstraite pour effectuer de nombreux calculs à la fois afin de résoudre rapidement des problèmes trop complexes pour être traités par les ordinateurs classiques les plus puissants. Les ordinateurs quantiques traitent de façon exponentielle davantage de données que les ordinateurs classiques, en utilisant des bits quantiques, ou qubits, l’unité de base de l’information quantique.

Sivan explique que les fonds levés iront au développement de la prochaine génération de la technologie de la startup, au recrutement dans les domaines de la recherche et du développement, des produits, des ventes et du marketing et à l’ouverture de bureaux en dehors d’Israël.
« L’année dernière, nous avons lancé la plate-forme OPX1000, qui est un système de contrôle pour ordinateurs quantiques capable de prendre en charge 1000 qubits : le système de nouvelle génération ciblera 20 000 qubits et les découvertes en la matière se poursuivent à un rythme effréné, qui n’a d’équivalent que l’exigence de nos clients », ajoute Sivan.
En Israël, la startup a été choisie l’an dernier pour diriger et exploiter le premier centre d’informatique quantique (IQCC) du pays, financé par l’Autorité israélienne de l’innovation pour un investissement de 100 millions de shekels. Le centre a été créé en juin 2024 pour aider Israël à participer à la course mondiale au développement de capacités pratiques d’informatique quantique. En août 2024, Israël comptait 22 startups d’informatique quantique, selon les données de Startup Nation Central. Des pays comme la Chine, les États-Unis, l’Allemagne, l’Inde ou le Japon investissent d’énormes quantités d’argent dans le développement de leurs capacités quantiques et se disputent la suprématie dans ce qui promet d’être la nouvelle ère de l’informatique.
« Nous faisons partie de plusieurs projets financés par le gouvernement, en Israël, en Europe et aux États-Unis », conclut Sivan. « Pour les Etats, cette course débridée à l’informatique quantique est la plus importante qui soit, car la puissance de calcul qui ira aux gagnants est tout bonnement inimaginable. »