Yossi Cohen : un accord entre Israël et l’Arabie Saoudite est « absolument possible »
L'ex-chef du Mossad, citant sa "connaissance personnelle" de négociations potentielles, se montre optimiste ; de hauts collaborateurs de Netanyahu seraient en route pour Washington
Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Dans un contexte d’optimisme mesuré de la part de Jérusalem quant aux chances d’un accord de normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite, l’ancien chef du Mossad, Yossi Cohen, a déclaré de son côté dimanche qu’un tel accord était « absolument possible ».
S’exprimant à l’Institut d’études de sécurité nationale (INSS), Cohen – qui a été à la tête de l’agence d’espionnage de 2016 à 2021 – a déclaré : « À mon avis – et je m’appuie ici sur mes connaissances personnelles sur le sujet – c’est absolument possible ».
« Il y a en effet au Moyen-Orient une nouvelle ère dans laquelle des dirigeants courageux (…) savent comment créer une normalisation », a-t-il ajouté.
Selon de nombreuses informations, les négociations entre Jérusalem et Ryad, sous l’égide des États-Unis, sur la mise en place de vols directs pour les pèlerins du Hajj, en sont à un stade avancé.
Un accord sur les vols pourrait potentiellement conduire à un accord de normalisation plus large – qui a longtemps été recherché par Israël mais largement rejeté par les Saoudiens.
En échange d’une normalisation complète avec Israël, les Saoudiens exigeraient que la Maison Blanche débloque certains accords d’armement de l’ère Trump qui ont été gelés lorsque le président américain Joe Biden avait pris ses fonctions, et cherchent également à obtenir un traité de défense avec les États-Unis, similaire à l’OTAN, ainsi que le sceau d’approbation des États-Unis pour un programme nucléaire civil.
La semaine dernière, un reportage non sourcé de la Douzième chaîne a affirmé que Washington et Ryad cherchaient tous deux à faire pression sur Israël pour qu’il reprenne les pourparlers diplomatiques avec les Palestiniens en vue d’une « séparation », et que les États-Unis exigeaient également que Netanyahu retire le plan controversé de réforme judiciaire de son gouvernement en échange d’une normalisation avec Ryad.
Lors du même événement organisé par l’INSS, le directeur-général du ministère des Affaires étrangères, Ronen Levy, a déclaré que, bien que les liens avec Ryad soient extrêmement importants, « nous ne devons pas écarter d’autres pays qui ont un potentiel de normalisation avant l’Arabie saoudite ».
Il a ajouté qu’il espérait que des accords seraient conclus avec ces pays dans les mois à venir.
Le ministre des Affaires stratégiques, Ron Dermer, et le conseiller à la sécurité nationale, Tzachi Hanegbi, se rendront à Washington DC cette semaine pour y rencontrer des hauts fonctionnaires, selon un média américain.
Dermer et Hanegbi devraient rencontrer le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, et d’autres hauts responsables de la Maison Blanche et du département d’État pour discuter de la menace nucléaire iranienne et des perspectives de paix avec l’Arabie saoudite, ont indiqué quatre responsables israéliens et américains au site d’information Axios.
Un fonctionnaire du bureau du Premier ministre a déclaré que les dates n’avaient pas encore été fixées, tandis qu’un porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche a déclaré au site qu’il n’y avait rien à confirmer.
Hanegbi et Dermer sont tous deux considérés comme de très proches confidents du Premier ministre Benjamin Netanyahu. Les tentatives du Premier ministre pour se faire inviter à la Maison Blanche sont restées lettre morte, compte tenu des critiques américaines concernant les projets du gouvernement visant à réformer le système judiciaire israélien et à accélérer la construction de colonies de peuplement. Le projet de loi du Likud sur le financement étranger des ONG n’a pas été non plus du goût de l’administration.
Hanegbi a nié qu’il y ait eu des conversations directes entre Netanyahu et le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman au cours des derniers mois, mais a déclaré qu’un accord de normalisation était possible.
« Il y a en Arabie saoudite un dirigeant que le monde n’a jamais vu auparavant, un homme qui a emmené son pays à 180 degrés dans une direction différente, un dirigeant audacieux et révolutionnaire », a déclaré Hanegbi. « S’il pense qu’il est possible de parvenir à une normalisation avec Israël, cela se produira. Je pense qu’il y a une chance que cela se produise ».
L’année dernière, l’Arabie saoudite a annoncé qu’elle ouvrait son espace aérien à tous les vols civils, quelques heures avant que Biden ne devienne le premier dirigeant américain à se rendre directement d’Israël au pays du Golfe.
La semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères Eli Cohen a évoqué la possibilité d’une normalisation avec l’Arabie saoudite dans les six mois, lors d’une interview accordée à l’émission Rencontre avec la presse de la Douzième chaîne.
Cohen a cité les intérêts communs de Jérusalem et de Ryad, notamment celui d’empêcher l’Iran de se doter d’une bombe nucléaire, comme une raison d’espérer la conclusion d’un accord.
La décision prise en mars par l’Arabie saoudite de renouer avec l’Iran, après plus d’une demi-décennie, a été perçue par beaucoup comme un revers pour la normalisation entre le royaume et Israël.
Mais l’administration Biden a continué à travailler à la conclusion d’un tel accord au cours des derniers mois, Sullivan l’ayant qualifié d' »intérêt de sécurité nationale » au début du mois.
Peu après ces commentaires, Sullivan s’est envolé pour Ryad, où il a rencontré Mohammed ben Salman et a soulevé la question. Il était accompagné de Brett McGurk et d’Amos Hochstein, hauts responsables de la Maison Blanche, qui se sont ensuite rendus à Jérusalem pour informer Netanyahu de l’état d’avancement du projet.
Ronen Levy s’est également entretenu avec des fonctionnaires de l’administration au sujet d’un accord saoudien potentiel lors de son voyage à Washington la semaine dernière.
Netanyahu s’est envolé pour l’Arabie saoudite en novembre 2020 pour rencontrer bin Salman, la première rencontre publiquement rapportée entre les parties. Israël et l’Arabie saoudite n’ont pas de relations diplomatiques, mais les liens clandestins se sont grandement renforcés ces dernières années en raison de la menace iranienne.
Emanuel Fabian et Jacob Magid ont contribué à cet article.