Abbas aurait refusé de rencontrer Kushner, selon les dirigeants arabes
Le président de l'AP a rejeté la proposition, communiquée via l'Egypte, d'une réunion conjointe la semaine dernière sur le plan de paix américain, selon Al-Hayat

Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, aurait refusé de rencontrer la semaine dernière le conseiller principal de la Maison-Blanche, Jared Kushner, également gendre du président américain Donald Trump, et les dirigeants des pays arabes voisins, selon un rapport publié samedi dans le journal Al-Hayat, basé à Londres et de langue arabe.
Citant une source diplomatique anonyme, le journal a rapporté qu’Abbas considérait que l’offre était une tentative des Américains pour pousser les Palestiniens à accepter un processus de paix favorable à Israël, tout en atteignant également le « véritable objectif » qui est de resserrer les liens israélo-arabes dans la région.
Cette offre de rencontre a été proposée à Abbas via l’Egypte lors du dernier voyage de Kushner et de l’envoyé de paix du Moyen-Orient Jason Greenblatt dans la région. Les deux hommes se sont rendus en Israël, en Jordanie, en Arabie saoudite, au Qatar et en Égypte la semaine dernière pour discuter d’un plan de paix israélo-palestinien très attendu, ainsi que pour mobiliser l’aide humanitaire pour la bande de Gaza. Ils n’ont pas rencontré les représentants de l’Autorité palestinienne, Abbas ayant coupé tout contact avec Washington suite à la reconnaissance par Trump de Jérusalem comme capitale d’Israël en décembre.
Au cours de la tournée, Kushner a accordé une rare interview au journal palestinien Al-Qods dans laquelle il a exhorté les Palestiniens à ne pas laisser leurs dirigeants « effrayés » rejeter le plan de paix de l’administration Trump, et a exprimé des doutes sur le fait qu’Abbas voulait vraiment un accord.

« Il y a eu d’innombrables erreurs et occasions manquées au fil des ans, et vous, le peuple palestinien, en avez payé le prix », a déclaré M. Kushner, d’après une transcription de l’interview fournie par la Maison-Blanche. « Ne laissez pas vos dirigeants rejeter un plan qu’ils n’ont même pas vu. »
L’interview a été considérée comme une tentative de l’administration Trump de tendre la main au peuple palestinien, malgré le boycott officiel.
Les Palestiniens éprouvent de la colère contre Washington. Samedi dernier, quelques heures avant que Kushner et Greenblatt rencontrent le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour la deuxième fois pendant le voyage, le négociateur palestinien Saeb Erekat a accusé l’équipe de paix américaine de travailler au renversement de l’Autorité palestinienne.

Erekat a affirmé qu’au cours d’une réunion précédente avec Kushner et Greenblatt, Netanyahu a déclaré qu’il était prêt à aider à faire face à la situation humanitaire à Gaza avec les recettes fiscales qu’Israël perçoit au nom de l’AP. Les responsables de Ramallah, qui ont cherché à écraser les dirigeants du Hamas de la bande de Gaza en retenant les salaires et les marchandises comme moyen de reprendre le pouvoir, ont dit que les plans de financement de projets d’infrastructure comme moyen d’atténuer la crise humanitaire, équivaut à une tentative de séparer Gaza de la Cisjordanie dirigée par Abbas.
Toujours pas de plan de paix
Les envoyés américains ont quitté la région sans révéler le plan. Vendredi, le journal Haaretz a rapporté que les dirigeants arabes ont demandé à la Maison Blanche de ne pas révéler les détails du plan de paix afin de ne pas déstabiliser l’ensemble du Moyen-Orient.
Les responsables ont déclaré que le fait que le plan ne reconnaisse pas Jérusalem comme capitale d’un futur État palestinien ou ne traite pas de la question des réfugiés palestiniens mettrait en colère la population arabe de la région.
Des responsables égyptiens, jordaniens et saoudiens, qui sont tous confrontés à leurs propres difficultés intérieures, ont déclaré à la délégation américaine que le dévoilement du plan pourrait provoquer un « séisme », a déclaré un responsable palestinien à Haaretz.
« L’Egypte ne manque pas de problèmes internes avec le terrorisme dans le Sinaï ; la Jordanie fait face à d’énormes difficultés internes et fait face aux répercussions de la guerre en Syrie ; et les Saoudiens [sont occupés] avec le Yémen et la lutte avec l’Iran », a déclaré un responsable palestinien au journal.
« Si l’administration suggérait un plan sans Jérusalem et sans réfugiés, cela provoquerait un tremblement de terre. Les implications pourraient ébranler la stabilité de toute la région, et personne ne le souhaite. »
Plus tôt cette semaine, alors qu’il accueillait le roi Abdallah II de Jordanie à la Maison Blanche, Trump a ignoré une question sur le moment où le plan serait rendu public, répondant simplement : « Nous progressons très bien » au Moyen Orient.
Le responsable palestinien a également déclaré à Haaretz que les représentants des nations arabes qui ont rencontré Kushner et Greenblatt ont tous présenté aux Américains un front uni sur tout accord de paix, affirmant qu’il devait inclure l’établissement d’un État palestinien aux frontières de 1967 avec Jérusalem comme capitale.
Selon le fonctionnaire, ce désaccord a conduit les parties à se concentrer sur la crise humanitaire à Gaza et les moyens de la résoudre.
Israël est en pourparlers avec Chypre sur la construction d’un port maritime pour permettre les expéditions vers Gaza qui n’auraient pas à passer d’abord par Israël. Israël prévoit également de construire une nouvelle centrale solaire pour mettre fin à la crise de l’électricité dans l’enclave côtière.
Le voyage de Kushner et Greenblatt faisait suite à des semaines de violence meurtrière le long de la frontière de Gaza, des dizaines de milliers de Palestiniens prenant part aux manifestations « Marche du retour » soutenues par le Hamas à la frontière.
Gaza est confrontée à des pénuries d’électricité et d’eau potable. Israël et l’Égypte maintiennent un blocus sur la bande de Gaza qui, selon eux, est conçu pour empêcher le Hamas d’importer des armes et d’autres biens qui pourraient être utilisés pour construire des équipements militaires ou des tunnels transfrontaliers.
La détérioration des conditions de vie a été considérée par les responsables de la sécurité comme un facteur alimentant les affrontements violents à la frontière israélienne.
Eric Cortellessa a contribué à cet article.
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