Abbas aux Israéliens : Le dialogue amènera la paix, pas l’ONU
Lors d’une rencontre avec des centaines d’activistes et d’universitaires à Ramallah, le président de l’AP a déploré les critiques de la résolution 2334
Dov Lieber est le correspondant aux Affaires arabes du Times of Israël

RAMALLAH — Lors d’une rencontre avec des centaines de militants, auteurs et universitaires israéliens au siège de l’Autorité palestinienne à Ramallah, le président de l’AP Mahmoud Abbas a expliqué jeudi que la paix ne se ferait pas via l’ONU, mais bien à travers le dialogue.
“La vérité, c’est que nous n’avons pas besoin de la Résolution 2334 des Nations unies”, a déclaré Abbas. « Il suffit que nous soyons en mesure de parler pour obtenir la paix. Le seul moyen pour nous, c’est de vivre ensemble sur cette terre et pour la paix ».
La Résolution adoptée par le Conseil de Sécurité le 23 décembre clouait au pilori les implantations israéliennes en les qualifiant d’illégales et appelait les états “à faire la distinction, dans les accords concernés, entre l’Etat d’Israël et les territoires occupés depuis 1967.”
Israël redoute que l’utilisation d’un tel langage puisse mener à une accélération des mesures de boycott et de sanctions et les responsables israéliens ont averti qu’elle pourrait offrir un nouveau contexte de « turbulences propices au terrorisme ».
La mesure a été accueillie par toute une série de condamnations furieuses à Jérusalem.
Des politiciens ont critiqué avec aigreur les pays qui ont avancé et soutenu cette résolution “anti-israélienne”, ainsi que l’administration Obama qui s’est refusée à utiliser son droit de veto, facilitant l’adoption de la mesure.
De hauts-responsables, dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu, ont accusé la Maison Blanche d’avoir, en coulisses, été à l’origine de la résolution et de l’avoir guidée.
Mais Abbas a déploré les critiques émises par les responsables israéliens, affirmant que la résolution “n’est pas contre Israël, mais seulement contre les implantations… Elle appelle à soutenir une solution à deux états et à mettre un terme aux entreprises de construction. Qui peut s’opposer à cela ? Et c’est pour ça que tout le monde l’a soutenue”.

S’adressant à l’auditoire israélien, arrivé en autocar de toutes les régions d’Israël avec l’aide du Comité pour l’Interaction avec la société israélienne de l’AP, Abbas a été inflexible en affirmant que son gouvernement s’opposait à la violence.
« Nous ne croyons ni à la violence, ni au radicalisme, et nous n’y croirons jamais », a-t-il dit. « Seule une petite portion d’Israéliens ne veut pas la paix. Nous les convaincrons à travers des moyens pacifiques et d’aucune autre manière ».
Uri Avnery, ancien législateur israélien et activiste pour la paix a pris place aux côtés d’Abbas au cours d’une grande partie de la soirée.
Abbas a expliqué que les deux hommes entretenaient une vive amitié depuis 35 ans, depuis qu’Avnery avait rencontré le leader de l’AP en Tunisie, où le siège de l’Organisation de la Libération de Palestine s’était installé après son expulsion du Liban en 1982.

Avnery, âgé de 91 ans, a déclaré à l’auditoire que lorsqu’il avait rencontré le président de l’OLP Yasser Arafat pour la première fois – également en Tunisie – Arafat lui avait dit : “Si vous voulez la paix, allez discuter avec [Abbas].”
Depuis les années 1970, Abbas s’est impliqué dans le dialogue avec les Israéliens.
“Nous ne devons pas tarder (à faire la paix), a dit Abbas, 81 ans, au cours de son allocution. « Je veux que cette paix existe avant notre mort, à moi et à Avnery.”
Abbas a clairement indiqué qu’il appréciait particulièrement la démarche des Français, le président François Hollande à leur tête, de présenter une initiative de paix. A la fin du mois, Paris devrait accueillir une conférence visant à établir des termes clairs de référence en vue de futures négociations de paix entre les Israéliens et les Palestiniens.
Environ 70 nations devraient être présentes lors de ce rendez-vous, même si les Israéliens et les Palestiniens ne s’y rendront pas.
Un grand nombre d’Israéliens présents lors de cet événement ont expliqué être venus pour soutenir spécifiquement la reconnaissance par Abbas de l’initiative française et montrer qu’il existe un partenaire avec lequel débattre de la paix en Israël.

Michal Brami, 70 ans, militante israélienne dans le secteur du social, a déclaré au Times of Israel qu’elle voulait venir pour que “de cette façon, lorsque Abbas ira à Paris, il saura qu’il y a des Israéliens qui veulent la paix”.
Elle a ajouté : “Mon mari a combattu dans quelques guerres et mon fils aussi. Je ne veux pas que mes petits-enfants aient à faire la même chose. La guerre arrive lorsque le dialogue s’est avéré impossible”.
Au terme de l’événement, Abbas a été photographié avec différents groupes israéliens, dont un groupe judéo-irakien et des familles israéliennes endeuillées.
Alors qu’il s’apprêtait à quitter le hall, entouré par les services de sécurité, une femme âgée israélienne a crié qu’elle avait attendu de pouvoir prendre une photo avec lui.
Abbas a alors fait arrêter ses gardes du corps, embrassé la femme et souri devant l’objectif de l’appareil photo avant d’être entraîné hors du hall.