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Abdallah II : Les relations jordano-israéliennes sont « à leur point le plus bas »

Le monarque a dit que les problèmes de relations étaient partiellement dus aux difficultés politiques en Israël ; que la paix avec les Palestiniens nécessite l'implication US

Le roi Abdallah II au Capitole, à Washington, le 13 mars 2019 (Crédit : Mandel Ngan/AFP)
Le roi Abdallah II au Capitole, à Washington, le 13 mars 2019 (Crédit : Mandel Ngan/AFP)

Le roi Abdallah II de Jordanie a expliqué que les relations entre le royaume hachémite et l’Etat juif, qui avaient combattu deux guerres avant de signer un traité de paix historique il y a 25 ans, se trouvaient à leur point le plus bas depuis leur réconciliation.

« La relation israélo-jordanienne est à un niveau historiquement bas », a déclaré le roi Abdallah, jeudi, lors d’un événement organisé à New York par l’Institut de Washington de politique au Proche-Orient, un think-tank américain.

Ces dernières semaines, Amman a été amené à rappeler son ambassadeur en Israël, aucune cérémonie conjointe n’a été organisée pour célébrer l’accord de paix qui vient d’avoir un quart de siècle et un arrangement qui permettait aux agriculteurs israéliens d’exploiter des parcelles de terre, sur le territoire jordanien, n’a pas été renouvelé par le royaume hachémite.

« Ce niveau de relations exceptionnellement bas est en partie dû aux affaires intérieures israéliennes », a expliqué Abdallah, faisant apparemment référence à l’impasse politique à Jérusalem qui pourrait entraîner un troisième scrutin en moins d’un an.

« Nous espérons qu’Israël décidera de son avenir – que ce soit dans les prochaines semaines ou au cours des trois prochains mois », a dit Abdallah dans une vidéo présentant un montage des propos qu’il avait tenus au cours de cet événement, un clip qui a été publié sur la page YouTube de la cour royale jordanienne dans la nuit de vendredi.

Plus tard dans son discours, Abdallah a noté que « les problèmes que nous avons eus avec Israël sont bilatéraux… Et maintenant j’espère que quoi qu’il arrive dans le pays au cours des deux ou trois prochains mois, nous pourrons discuter de nouveau, l’un avec l’autre, sur des questions simples qu’il n’a pas été possible d’aborder au cours des deux dernières années ».

Dans le clip, il n’a pas établi clairement quelles étaient les « questions simples » qu’Israël et la Jordanie n’ont pas été en mesure d’évoquer ces derniers temps. Les liens bilatéraux entre les deux pays reposent sur le commerce, l’eau, l’agriculture, le tourisme, le gaz naturel et de nombreux autres secteurs.

La Jordanie et l’Egypte sont les deux seuls Etats arabes à avoir conclu des traités de paix officiels et à avoir instauré des relations diplomatiques avec l’Etat juif.

Tandis que les liens sécuritaires entre Jérusalem et Amman se sont renforcés, les relations politiques ont récemment tourné au vinaigre en raison d’un certain nombre de sujets – et notamment de la promesse de campagne faite par Netanyahu, au mois de septembre, d’annexer la vallée du Jourdain en Cisjordanie s’il devait obtenir un nouveau mandat de Premier ministre.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu pointe une carte de la vallée du Jourdain dans une déclaration dans laquelle il promet d’étendre la souveraineté israélienne à la vallée du Jourdain et au nord de la mer Morte, à Ramat Gan, le 10 septembre 2019. (Menahem Kahana/AFP)

Cela fait longtemps que la Jordanie soutient une solution à deux Etats au conflit israélo-palestinien, qui inclurait l’établissement d’un État palestinien en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et à Jérusalem-Est.

Les deux pays ont également récemment connu des querelles diplomatiques après l’arrestation, par l’Etat juif, de deux citoyens jordaniens, au mois d’août et au mois de septembre. Les autorités chargées de la sécurité israélienne avaient ainsi emprisonné pendant environ deux mois Heba al-Labadi, 32 ans, et Abdel Rahman Miri, 29 ans, dans le cadre d’une détention administrative pour activité terroriste présumée.

La détention administrative est une mesure qui permet à Israël d’incarcérer des suspects, parfois pendant des mois, sans inculpation ou sans présenter les détails des accusations lancées à leur encontre.

Un peu plus d’une semaine après le rappel, par Amman, de son ambassadeur à Tel Aviv, Ghassan Majali, à la fin du mois d’octobre, Israël avait rendu ses deux ressortissants à la Jordanie.

Selon Raslan Mahajna, avocat de Labadi et de Miri, les autorités israéliennes avaient soupçonné ces derniers de maintenir des liens avec des groupes terroristes. Il avait précisé que ses deux clients avaient nié ces allégations.

Au début du mois, deux dispositions figurant dans le traité de paix – qui avaient encadré des arrangements particuliers permettant aux agriculteurs israéliens et à leurs employés d’aller travailler des parcelles de terre dans les enclaves frontalières de Naharayim, dans le nord, et de Tzofar, dans le sud – avaient été abrogées.

Photo prise du côté israélien de la frontière : des soldats jordaniens plantent le drapeau national avant une cérémonie dans la vallée du Jourdain, à Naharayim, le 10 novembre 2019. (Crédit : MENAHEM KAHANA / AFP)

Pendant 25 ans, Israël et la Jordanie avaient mis en oeuvre ces dispositions de l’accord de paix concernant ces parcelles agricoles situées sur le territoire jordanien. A la fin de l’année 2018, toutefois, les responsables jordaniens avaient informé leurs homologues israéliens du royaume qu’ils allaient mettre un terme à l’arrangement.

Dans son discours de jeudi, Abdallah a également écarté l’idée que la paix entre Israël et les Palestiniens puisse avoir lieu sans le soutien des Etats-Unis.

« Tous ceux, au sein de la communauté internationale, qui disent que la paix pourra se concrétiser entre les Israéliens et les Palestiniens sans le soutien de l’Amérique ne connaissent pas notre région et le rôle que joue l’Amérique », a-t-il clamé.

« Nous avons tous besoin de l’Amérique pour rassembler les deux parties », a-t-il ajouté.

Peu de temps après la reconnaissance par l’administration Trump de Jérusalem comme capitale d’Israël, à la fin de l’année 2017 et l’annonce du transfert de l’ambassade américaine dans la ville sainte, les Palestiniens avaient fait savoir qu’ils ne travailleraient plus à un accord de paix où les Etats-Unis seraient l’interlocuteur dominant et exclusif.

En plus de ses initiatives prises à Jérusalem, l’administration Trump a adopté plusieurs mesures qui ont été considérées comme marginalisant les autorités palestiniennes de Ramallah, en coupant les aides à hauteur de centaines de millions de dollars versées aux Palestiniens et à l’agence de l’ONU en charge des réfugiés palestiniens, en fermant le bureau de représentation de l’OLP à Washington et, récemment, en déclarant que les implantations ne constituaient pas une violation du droit international.

Les responsables de l’administration Trump se sont également refusés à endosser la solution à deux Etats.

Abdullah a ajouté que le processus de paix était actuellement en suspens, suggérant qu’il pourrait ne pas reprendre avant la formation d’un nouveau gouvernement au sein de l’Etat juif.

« Malheureusement, nous sommes en mode ‘Pause’. Comme vous le savez bien, les Israéliens viennent de traverser une série d’élections. Et on pourrait encore avoir trois autres mois électoraux », a-t-il continué.

« En conséquence, nous sommes tous en mode ‘Pause’ et nous n’avons pas été en mesure de regrouper les parties concernées autour de la table pour des pourparlers ».

La dernière fois que le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas et Netanyahu se sont officiellement rencontrés pour des négociations remonte au mois de septembre 2010, à Jérusalem.

Le roi jordanien a également affirmé que la pleine intégration d’Israël au Moyen-Orient nécessitait une solution apportée au préalable au conflit israélo-palestinien.

« L’avenir d’Israël est de faire partie du Moyen-Orient mais le problème est que cela ne sera jamais le cas à 100 % tant que la question palestinienne ne sera pas résolue », a-t-il dit.

« Il y a beaucoup de gens, dans notre partie du monde, qui disent en coulisses : ‘Faites ce que vous voulez’. Mais, en réalité, c’est une question sensible, chargée d’émotions. Et faute de pouvoir résoudre le problème israélo-palestinien, nous n’obtiendrons jamais la pleine intégration que chacun d’entre nous mérite », a-t-il remarqué.

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