Amir Yaron avertit Netanyahu que le remaniement judiciaire nuira à l’économie
Le gouverneur de la Banque centrale d'Israël a relayé les avertissements des hauts fonctionnaires qu'il a rencontrés au Forum économique mondial de Davos
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a rencontré mardi le gouverneur de la Banque centrale d’Israël, Amir Yaron, en raison des avertissements selon lesquels les plans de la coalition au pouvoir visant à bouleverser le système judiciaire pourraient effrayer les investisseurs et avoir un impact négatif sur la note de crédit du pays.
Selon les médias israéliens, Yaron a exposé à Netanyahu les conséquences potentielles du projet de remaniement judiciaire et a relayé les avertissements formulés par des personnalités économiques de premier plan et des responsables de sociétés de notation de crédit lors de ses récentes rencontres au Forum économique mondial de Davos.
Yaron a explicitement dit à Netanyahu que la refonte du système judiciaire nuirait à l’économie, selon la Douzième chaîne et la chaîne publique israélienne Kan.
La Douzième chaîne a rapporté que Netanyahu n’avait pas manifesté la moindre intention d’assouplir le projet de réforme judiciaire lors de la réunion de mardi, décrite comme une réunion d’urgence. Elle a également rapporté que la Banque d’Israël a envoyé au ministère des Finances une liste de préoccupations soulevées par les agences de notation internationales.
Ces entretiens en tête-à-tête étaient les premiers que Netanyahu a eus avec Yaron depuis qu’il a repris le pouvoir le mois dernier. Netanyahu avait nommé Yaron à la tête de la Banque centrale lors d’un précédent mandat de Premier ministre.
Un communiqué de la Banque d’Israël indique que Yaron a parlé avec Netanyahu de « diverses questions qui ont été soulevées lors de délibérations tenues ces dernières semaines avec de hauts responsables économiques internationaux et de hauts responsables de sociétés de notation », sans mentionner les changements prévus dans le système judiciaire israélien.
Le communiqué indique que Yaron a également donné à Netanyahu une vue d’ensemble de l’économie israélienne et des défis auxquels elle est confrontée, a présenté le « plan économique stratégique » de la banque et a discuté de diverses questions non spécifiées en vue du prochain budget de l’État.
Le Bureau de Netanyahu n’a pas fait de compte-rendu de la réunion, qui s’est déroulée quelques heures après que des centaines d’employés du secteur de la high-tech ont organisé une manifestation d’une heure pour protester contre les changements prévus.
Dimanche, les anciens gouverneurs de la Banque d’Israël, Karnit Flug et Jacob Frenkel, ont prévenu dans une tribune commune que le projet du gouvernement de réformer en profondeur le système judiciaire du pays pourrait avoir un impact négatif sur la note de crédit d’Israël et « porter un coup sévère à l’économie et à ses citoyens ».
« L’affaiblissement du système judiciaire (…) devrait entraîner une diminution du désir des investisseurs d’investir en Israël et une augmentation, pour le gouvernement israélien, du coût de l’emprunt de fonds – ceci en résultat d’une possible révision à la baisse de la notation du pays », expliquent Flug et Frenkel.
L’agence de notation Standard & Poor’s (S&P) a expliqué au début du mois que les projets de refonte du système judiciaire, ainsi que la politique radicale du nouveau gouvernement en Cisjordanie, pourraient avoir un impact négatif sur la notation du pays.
« Si les changements annoncés dans le système judiciaire créent une tendance à l’affaiblissement des dispositions institutionnelles d’Israël et des contrôles et équilibres existants, cela pourrait à l’avenir présenter des risques à la baisse pour les notations », a déclaré à Reuters Maxim Rybnikov, directeur des notations mondiales de S&P.
Telles qu’elles ont été présentées par le ministre de la Justice, Yariv Levin, les propositions de la coalition restreignent considérablement la capacité de la Haute Cour à invalider des lois et des décisions du gouvernement, avec une clause dite « dérogatoire » permettant à la Knesset de légiférer à nouveau sur des lois annulées avec une majorité simple de 61 voix ; elles donnent au gouvernement un contrôle total sur la sélection des juges ; elles empêchent la Cour d’utiliser la règle du « caractère raisonnable » pour juger les lois et les décisions du gouvernement ; et elles permettent aux ministres de nommer leurs propres conseillers juridiques, au lieu d’obtenir des conseils de conseillers opérant sous l’égide du ministère de la Justice.
Les entretiens avec Yaron font suite à une réunion mardi entre Netanyahu et le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, visant à définir les politiques fiduciaires du nouveau gouvernement.
Selon une déclaration commune, les deux hommes ont convenu de maintenir un cap fiduciaire responsable et de coordonner les positions du gouvernement avec la politique monétaire de la Banque d’Israël.
Bezalel Smotrich, dont le parti d’extrême-droite HaTzionout HaDatit est l’un des principaux partisans de la limitation des pouvoirs du pouvoir judiciaire, a balayé d’un revers de la main ces avertissements.
« Face à l’alarmisme de l’opposition et à ses actions irresponsables visant à nuire à la force économique de l’État d’Israël, la coalition est unifiée et responsable et travaillera pour les citoyens israéliens », a-t-il déclaré.
Il a également déclaré qu’un budget pour l’année à venir sera « très bientôt » dévoilé.