Avec l’opération contre le Jihad islamique, Ben Gvir apaise sa base électorale
Stoppant son boycott politique, le ministre de la Sécurité nationale utilise l'offensive à Gaza, qu'il n'a pas planifiée, pour réintégrer une coalition réticente à son égard
Le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir considère que l’opération contre les groupes terroristes de Gaza qui a été lancée cette semaine a été une victoire politique. Difficile pour lui, toutefois, de s’attribuer un mérite quelconque dans cette campagne – et ce sont ses partenaires de coalition eux-mêmes qui compliquent une telle revendication de sa part.
Mardi, Ben Gvir a accepté de mettre un terme au boycott lancé par son parti d’extrême-droite Otzma Yehudit qui avait déclaré se retirer de toutes les activités gouvernementales, saluant l’offensive israélienne qui a commencé par l’assassinat ciblé de trois leaders du Jihad islamique palestinien à Gaza.
Ben Gvir avait lancé son boycott six jours auparavant pour protester contre la « faiblesse » de la réponse israélienne aux 104 roquettes tirées depuis la bande de Gaza en direction du sud du pays, la semaine dernière.
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Mais vingt-quatre heures avant l’annonce du boycott par Ben Gvir – selon le Premier ministre Benjamin Netanyahu et d’autres – les responsables politiques et militaires israéliens avaient d’ores et déjà convenu de lancer l’opération au sein de l’enclave côtière.
En d’autres mots, la réponse de l’armée était déjà en mouvement avant qu’Otzma Yehudit ne décide de sortir de la coalition, ce qui met à mal l’hypothèse que ce sont les pressions exercées par Ben Gvir et ses alliés qui ont finalement précipité l’offensive.
Si Ben Gvir n’a peut-être pas poussé le gouvernement à lancer une campagne militaire ou qu’il n’a pas obtenu une réponse positive à ses autres demandes, il a toutefois enregistré deux victoires. La première : il a pu s’extraire de la crise qu’il avait lui-même créée avec son boycott. Et la deuxième, qui est probablement plus importante, il a apaisé sa base.
Malgré les faits, Ben Gvir a expliqué, mardi, que son parti avait « sa part » dans l’opération et qu’il avait, « aux côtés du ministre de la Défense », ordonné les assassinats ciblés, pendant un discours prononcé lors d’une conférence à Jérusalem qui était accueillie par le Forum de Défense et de sécurité d’Israël.
En réalité, malgré tout, Netanyahu a volontairement conservé le ministre de la Sécurité nationale à l’écart lors des réunions du cabinet de sécurité. Il a aussi demandé – et obtenu – l’approbation de la procureure-générale pour lancer les frappes initiales de l’opération, mardi en début de matinée, sans devoir convoquer le cabinet, dont les ministres appartenant à Otzma Yehudit avaient, de toute façon, boudé la réunion de dimanche.
Ben Gvir a aussi donné « une très bonne note pour cette opération » au ministre de la Défense Yoav Gallant qui, contrairement au ministre de la Sécurité nationale, a été profondément impliqué dans la planification de cette campagne militaire.
« C’est ce que je recherche chez un ministre de la Défense et chez un Premier ministre, a déclaré Ben Gvir, « et à partir de maintenant, je veux des initiatives offensives ».
Alors que ces propos s’adressaient ostensiblement à Gallant et à Netanyahu, ils visaient, en réalité, la base électorale du député d’extrême-droite – les 5 à 10 % d’Israéliens qui, aux élections du mois de novembre, avaient opté pour le bulletin de l’alliance Hatzionout HaDatit, très largement en raison de leur profonde inquiétude sur la sécurité intérieure en Israël.
En proie à une vague constante de terrorisme, à des attaques à la roquette et aux crimes violents, certains Israéliens avaient été prêts à se laisser séduire par les promesses de répression sévère de la délinquance et du terrorisme qui avaient été faites par Ben Gvir aux électeurs.
Le seul problème – comme ses partenaires au sein de la coalition l’admettront aisément à huis-clos – c’est que Ben Gvir n’a pas été à la hauteur de ses engagements. Personne d’autre ne l’a été, d’ailleurs.
Depuis le mois de décembre, Ben Gvir a été un ministre marginalisé par Netanyahu, qui l’a laissé à l’écart de tribunes sécuritaires pourtant déterminantes. Le ministre de la Sécurité nationale, pour sa part, a tenté de faire avancer ses propres initiatives visant à sanctionner plus durement les terroristes et à reconstruire une Garde nationale languissante pour qu’elle intervienne dans des zones médiocrement gouvernées.
Il a aussi redirigé ses critiques de l’ancien gouvernement de Naftali Bennett et de Yair Lapid, qui siège dorénavant dans l’opposition, vers ses propres partenaires politiques.
Quand Ben Gvir a menacé de quitter le gouvernement, la semaine dernière, le parti du Likud a fait savoir sèchement que s’il était insatisfait, il était libre de partir.
Aucun des cinq partis partenaires de la coalition ne souhaitent l’effondrement de cette dernière – et c’est aussi le cas d’Otzma Yehudit, la faction de Ben Gvir. Avec une majorité de 64 sièges à la Knesset, forte de 120 membres, les formations sont conscientes qu’elles ont besoin les unes des autres pour rester au pouvoir après avoir occupé pendant une année les bancs de l’opposition.
Ben Gvir connaît un léger rebond dans les sondages, mais les chiffres ne sont pas suffisamment élevés pour justifier son départ du gouvernement, ni pour se soumettre à de nouvelles élections pour améliorer son propre positionnement sur la scène politique.
Toutefois, le sentiment général, au sein de la coalition, continue à être que Ben Gvir est un franc-tireur politique – un franc-tireur qui, pour le moment, a été apaisé par des frappes aériennes qu’il n’a pas contribué à planifier.
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