Belgique : La synagogue d’Anderlecht bientôt classée monument de la région
Témoin du riche passé juif de la commune, la synagogue est depuis désertée du fait de l'insécurité et de la migration des Juifs vers d'autres quartiers
La synagogue d’Anderlecht, principale synagogue de la Communauté israélite orthodoxe de Bruxelles (CIOB), est en passe d’être classée par les monuments et sites de la Région bruxelloise, ont indiqué au Times of Israël ses représentants.
Une demande formelle a ainsi été adressée par le collège des bourgmestre et échevins à la Région bruxelloise, qui a reçu un avis favorable de la Commission royale des monuments et sites. Le gouvernement doit désormais donner son feu vert, une formalité.
Inaugurée le 6 avril 1933 après cinq ans de travaux, au cœur de l’ancien quartier juif d’Anderlecht, Cureghem, la synagogue a été construite dans un style Art-déco.
Anderlecht a connu un afflux de réfugiés juifs au début du 20e siècle, conduisant à la construction de cet édifice par l’architecte juif anversois Joseph De Lange.
« À l’époque, ces personnes ont installé à Anderlecht un tissu social et communautaire dont la synagogue a très vite représenté un élément structurant », a expliqué à la RTBF Gershon Aronsohn, membre du conseil d’administration de la synagogue. « Aujourd’hui, la synagogue a près de cent ans, elle a besoin d’être entretenue, restaurée et aussi préservée dans son patrimoine aussi bien architectural que mobilier. D’où l’idée d’en demander le classement. »
Le lieu était jusqu’à présent entretenu avec les moyens du bord, principalement par des donateurs dans une communauté de plus en plus réduite.
Le classement devrait concerner les murs, les éléments de décoration et le mobilier d’époque.
« Cette synagogue a des qualités patrimoniales incroyables, c’est un rare témoignage de cette architecture. Surtout, c’est un symbole important parce que la communauté juive était particulièrement présente à Cureghem », a expliqué Fabrice Cumps (PS), bourgmestre d’Anderlecht. « Cureghem, c’est un quartier fait de vagues de migrations successives. Entre les deux guerres, une vague provenait d’Europe centrale et de l’Est. C’est le petit peuple qui s’est installé, ici, dans le quartier, avec la synagogue comme point central. Le classement va permettre de pérenniser les briques. Mais il faut aussi continuer à dynamiser l’occupation. »
Témoin du riche passé juif de la commune d’Anderlecht, la synagogue est désertée du fait de l’insécurité et de la migration des Juifs d’Anderlecht vers d’autres quartiers, expliquait en 2010, Joël Rubinfeld, président de la Ligue belge contre l’antisémitisme.
« Il est difficile de chiffrer le nombre de personnes au sein de notre communauté », a expliqué Gershon Aronsohn. « La plupart de nos membres ont déménagé, n’habitent plus Anderlecht. Nous sommes une communauté d’assez petite taille avec quelques dizaines de membres et des fidèles qui se rassemblent autant que possible, lors des offices du Shabbat et lors des grandes fêtes du calendrier hébraïque. »
Plusieurs activités y restent aussi proposées, a expliqué à la RTBF Daniel Rabinovitsj, président du conseil d’administration de la synagogue. « Comme des ateliers de pratique musicale, en collaboration avec les élèves de l’Académie d’Anderlecht. Nous menons aussi un projet appelé ‘Diversité’, qui permet de faire venir les élèves des écoles d’Anderlecht. Nous attachons beaucoup d’importance à faire connaître le monde juif aux personnes du quartier, aux jeunes… C’est important pour l’avenir que ces jeunes qui ne rencontreront peut-être pas un autre Juif dans leur vie puissent d’abord être accueillis ici et connaître ce lieu où les Juifs se retrouvent. C’est un lieu important, avec une histoire dans le quartier. Cette synagogue est importante, pas seulement pour la communauté juive d’Anderlecht mais de tout Bruxelles. La plus grande partie des Juifs venus d’Europe centrale à Bruxelles sont arrivés par Anderlecht. Ils ont été accueillis dans cette synagogue, ils ont participé aux offices. C’était un lieu central, de rencontre. Au niveau mémoriel, c’est important de préserver ce lieu, de le classer. »
L’endroit a été touché par plusieurs attaques antisémites notoires ces dernières années : en 2010, un cocktail Molotov a été jeté contre la porte d’entrée ; en 2014, la synagogue a été victime d’un incendie volontaire ; et en 2017, les caméras de surveillance de la synagogue ont été vandalisées à plusieurs reprises.