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« Bella Ciao », ode à la liberté chantée de l’Iran à l’Ukraine

Ses paroles ambiguës — évoquant un envahisseur anonyme et l'honneur de mourir pour la liberté — en ont fait depuis un symbole de solidarité pour de nombreuses causes

Des personnes scandent des slogans et tiennent les photos de Mahsa Amini lors de la manifestation "Freedom rally for Iran" dans le quartier de Shibuya à Tokyo, le 1er octobre 2022. (Crédit : Philip FONG / AFP)
Des personnes scandent des slogans et tiennent les photos de Mahsa Amini lors de la manifestation "Freedom rally for Iran" dans le quartier de Shibuya à Tokyo, le 1er octobre 2022. (Crédit : Philip FONG / AFP)

De l’Ukraine au Chili, à Hong Kong ou désormais en Iran, les manifestants à travers le monde se rallient sur les notes et les paroles déchirantes de « Bella Ciao », chant traditionnel italien devenu ode à la liberté.

Les femmes kurdes de Turquie et les expatriés iraniens de Paris ont entonné la chanson ces derniers jours en solidarité avec les Iraniens protestant contre la mort de la jeune Mahsa Amini après son arrestation par la police des mœurs pour infraction au code vestimentaire strict de la République islamique.

L’hymne est devenu un symbole des manifestations lorsqu’une vidéo est devenue virale : celle d’une chanteuse — la tête découverte, au mépris du hijab obligatoire — interprétant une version lente et émouvante en persan.

Mais il a été utilisé auparavant pendant des décennies par des manifestants de New York à Hong Kong, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale où il était devenu l’hymne officieux des combattants antifascistes.

Il n’existe en réalité aucune preuve qu’il ait jamais été chanté par les partisans italiens, selon Carlo Pestelli, auteur du livre Bella Ciao: Le chant de la liberté.

Son histoire remonte à bien plus loin, à des chants du 19e siècle du nord de l’Italie empreints de passion et d’amours déçues.

« Il est difficile d’établir précisément ses origines », explique Carlo Pestelli à l’AFP, notant que la musique elle-même a des sources diverses.

Ses paroles ambiguës — évoquant un envahisseur anonyme et l’honneur de mourir pour la liberté — en ont fait depuis un symbole de solidarité pour de nombreuses causes. « Ce n’était pas une chanson communiste mais un manifeste pour la liberté… elle représente des valeurs apolitiques que tout le monde est capable de comprendre et partager », détaille M. Pestelli.

C’est aussi « une chanson facile à chanter », avec un refrain accrocheur que même les non-italiens peuvent reprendre en chœur.

Une résonance mondiale

La popularité de « Bella Ciao » a été alimentée par de grands noms de la chanson, dont la star française d’origine italienne Yves Montand, et plus récemment, son inclusion dans la série à succès de Netflix « La casa de papel ».

Et on peut l’entendre partout où des foules se rassemblent.

Les Ukrainiens l’ont entonnée cette année face aux forces russes qui ont envahi le pays, elle a été la bande-son de manifestants dansant à Tripoli, un chant des supporters anglais de football et un appel à l’action des militants climatiques de Sydney à Bruxelles.

Des policiers arrêtent une manifestante suite à des appels à protester contre la mobilisation partielle annoncée par le président Vladimir Poutine, à Moscou le 21 septembre 2022. (Crédit : Alexander NEMENOV / AFP)

En Italie, « Bella Ciao » est un hymne national officieux, qui fut chanté avec émotion depuis les balcons pendant le confinement dû à la pandémie de coronavirus en 2020.

Pour beaucoup, l’histoire de la chanson est moins importante que sa résonance mondiale.

« Cette chanson est très célèbre en Iran, et dans le monde entier, parce qu’elle est un symbole contre l’oppression », avançait cette semaine Masah, une expatriée iranienne de 29 ans, lors d’un rassemblement de solidarité à Rome.

Souvent traduit, adapté ou retravaillé, le refrain est normalement en italien. A Jérusalem l’an dernier, les opposants au Premier ministre sortant Benjamin Netanyahu, surnommé « Bibi Netanyahu », ont chanté « Bibi Ciao » sur l’air de la chanson, en signe de joie à la perspective de son départ.

En 2019, les manifestants de l’opposition en Irak se rassemblaient au chant de « Blaya Chara », qui signifie « pas d’issue » en dialecte irakien, sur cette même mélodie de « Bella Ciao ».

« Quand nous le chantons, nous nous sentons plus unis avec le monde entier parce que c’est un symbole », analysait la sœur de Masah, Shiva, 33 ans, à la manifestation de Rome. « La musique est une forme d’expression qui vous permet de communiquer même sans connaître d’autres langues. »

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