Ce cueilleur israélien vous fait voyager à travers des plantes comestibles
Yatir Sade amène également ses trouvailles dans un restaurant de Césarée, où ses plantes sauvages se transforment en expérience gastronomique inoubliable

C’est au cours d’une matinée brûlante – un mardi – que Yatir Sade gare son pick-up poussiéreux à proximité d’un champ rempli de tiges sèches et jaunes, situé au-dessus de la route provenant de l’étendue sablonneuse de la plage de Dor Habonim, à proximité de Zichron Yaakov, sur la côte méditerranéenne.
Il va au bord du champ, il cueille une gousse et fait glisser quelques graines dans la paume de sa main.
« Vous voyez ? », dit-il, montrant les graines jaunes. « Des graines de moutarde sauvage. J’en ai préparé l’autre jour ; on en aura au déjeuner ».
De la moutarde maison, faite à partir de graines sauvages ? Ça a l’air divin.

Sade, dont le nom de famille signifie « champ » en hébreu, passe une grande partie de son temps à errer dans les champs, dans les dunes et dans les lits de rivière de la zone – une étendue de 60 kilomètres dans les plaines côtières du nord qui séparent Netanya et Haïfa.
Son entreprise, Shirat HaSade, emmène des groupes d’Israéliens et de touristes à la recherche de produits comestibles dans la nature – orties sauvages, gousses et autres graines qui poussent librement et sans contrainte dans cet habitat humide et sablonneux.
Cet été, Sade a ajouté un autre élément à ses marches quotidiennes et hebdomadaires en amenant ses trouvailles – roquette de mer, lampranthus, arroche halime et autre fenouil marin – chez Helena, le restaurant du chef Amos Sion, situé sur la côte de Césarée.
« Amos obtient peu de moi mais il travaille avec ce que je lui donne », explique Sade. (Pour ce déjeuner dégusté particulièrement tard dans l’après-midi, Sion a servi des branches craquantes de lampranthus dans une salade César revue et corrigée, avec des morceaux d’œufs dur et des croûtons arrosés de sauce aïoli, des cubes de sashimi à base de thon frais avec de l’arroche halime et plusieurs autres mets délicats à base de fruits de mer – dont un pesto de roquette de mer et un tartare de poisson des profondeurs).
« J’adore travailler avec Yatir », s’exclame Sion. « C’est un travail créatif – réfléchir à quoi faire avec cette végétation fraîche qu’on est amené à croiser ».
Le repas au restaurant Helena est le deuxième de la journée.
Le premier a commencé avec une promenade de deux heures et la découverte des graines de moutarde, suivie par celle des orties, nichées dans une gousse douce – des graines qui, a découvert Sade, possèdent des qualités gélatineuses similaires à la chia et aux graines de lin lorsqu’elles sont trempées.
Il y a également des lampranthus, un légume vert croquant et succulent qui ressemble à un petit cactus ; le fenouil de mer, qui combine la senteur de l’anis et du fenouil ; des câpres frais et les feuilles rondes de l’arroche halime qu’Amos prépare en les faisant frire jusqu’à ce qu’elles soient croustillantes.
Sade s’arrête tout à coup sur le chemin de sable, criant : « Vous n’allez jamais croire ce que je suis en train de voir ! »
La surprise immense, ce sont des nigelles, avec de petites pétales blanches ornées de graines noires, nichées dans une gousse de couleur jaunâtre. Elles sont connues en hébreu sous le nom de ketzah et elles sont souvent saupoudrées sur des borekas feuilletés, ou challah.

Sade est profondément protecteur de son environnement et il prend grand soin à n’ôter que le bout des plantes pour s’assurer que la racine restera intacte et qu’elle pourra continuer à grandir, chaque année.
Ce sont environ 3 000 plantes différentes qui poussent le long de la côte, dont 300 qui sont comestibles.
Sade, 39 ans, aime faire ses recherches à proximité de son domicile, à Pardes Hanna-Karkur. Il offre ses visites de découverte des plantes comestibles et de cuisine depuis dix ans, le matin ou l’après-midi – une promenade suivie par un repas somptueux consommé en plein air, sous l’ombre d’un arbre.
Les invités aident à préparer le repas, en utilisant la collecte de plantes et autres végétaux comestibles répandus sur la nappe rouge de la table, avec de l’huile d’olive fraîche et certains fruits et légumes qui ont été achetés pour accompagner la collation.
Pour ce repas, du pourpier et des nectarines ont été rassemblés pour la salade, tandis que des crevettes ont été légèrement sautées avec des tomates et qu’un filet de poisson a été découpé pour préparer un ceviche frais. Les sauces ont été cuisinées à partir d’huile d’olive, de citron fraîchement pressé, de sel, et de graines de moutarde sauvage maison.

Sade a fait de son passe-temps favori sa profession, qui remonte à son enfance passée dans le kibboutz Masryk, lorsqu’il suivait les femmes bédouines du village voisin dans le lit de la rivière proche, où elles cueillaient des plantes comestibles.
« J’ai commencé à apprendre l’arabe à l’école et j’ai commencé à pratiquer la langue avec elles », se soutient Sade.
« C’était un arabe vraiment mauvais, mais c’est le vocabulaire ethnobotanique que j’ai appris auprès d’elle ».
L’intérêt que portait Sade aux plantes et aux populations indigènes à la recherche des plantes comestibles dans leur environnement naturel a continué à croître lors du temps qu’il aura passé en Afrique, où il a rencontré ceux qui agrémentaient leur régime alimentaire de plantes cueillies au gré des écosystèmes.
Quand il est revenu en Israël, il a étudié l’histoire israélienne et en a appris davantage sur les cueillettes des Druzes et des Bédouins, dans des desseins culinaires ou médicaux, auprès de Shomrei HaGan, Gardiens des jardins, qui fait partie du mouvement des verts en Israël.

Alors que Sade commençait à enseigner l’art de la cueillette de plantes comestibles, un chef de Tel Aviv lui a demandé de l’aider à créer un menu à base de ces mêmes plantes. Ce qui l’a amené à faire venir des chefs sur le terrain pour la cueillette et la cuisine – un type de déclinaison inversée du concept « ferme à la table ».
« Cette alimentation devait sortir de l’ombre », explique Sade, qui attribue à des chefs arabes le mérite d’avoir les premiers utilisés ces plantes cueillies traditionnelles dans les menus des restaurants.
« Cela entre dans le cadre de la recherche d’authenticité dans les assiettes », ajoute-t-il. « Il y a aussi un souci d’économie. L’hiver, je ramasse tous mes légumes dans la nature – je ne vais pas au supermarché. C’est la manière la plus proche de me relier à la nature en tant qu’urbain qui n’est pas exploitant agricole ».
Sade veut que les gens puissent apprendre à cueillir leurs propres plantes et légumes sauvages et à les cuisiner eux-mêmes, et il considère son travail avec des chefs comme Amos Sion comme faisant partie de cet effort.
« Il s’agit de cuisine locale », note Sade. « Les pionniers, en Israël, avaient réfléchi à la manière de créer des fermes, de développer la terre, ils avaient pensé à quoi faire concernant l’usage de l’ hébreu. Mais ils n’avaient pas réfléchi à l’alimentation et ils n’avaient pas pensé que les locaux avaient des choses à leur enseigner. Et la cuisine locale ne s’est donc pas développée jusqu’à une date récente. Et maintenant, on tente de rattraper le temps perdu ».
Pour passer une matinée ou un après-midi en compagnie de Yatir Sade, entrez en contact avec lui via sa page Facebook. Il parle anglais. Un forfait de recherche de plantes comprenant un repas (4 heures) s’élève à 120 shekels par personne. L’hiver, le tour dure six heures et coûte 160 shekels par personne.
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