Israël en guerre - Jour 63

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Ce que les leaders des manifestations ont dit à l’Assemblée générale des JFNA

Le projet de réforme judiciaire gouvernemental "déchire le contrat social", ont-ils estimé, ajoutant que "nous vivons notre crise la plus grave depuis 1948"

Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.

Des manifestants contre la refonte judiciaire participent à un panel de l'Assemblée générale des JFNA.  De gauche à droite : Eric Fingerhut (président des JFNA), Yiftach Golov, Ronit Harpaz, Asaf Agmon, à Tel Aviv, le 24 avril 2023. (Crédit : Jewish Federations of North America/AG)
Des manifestants contre la refonte judiciaire participent à un panel de l'Assemblée générale des JFNA. De gauche à droite : Eric Fingerhut (président des JFNA), Yiftach Golov, Ronit Harpaz, Asaf Agmon, à Tel Aviv, le 24 avril 2023. (Crédit : Jewish Federations of North America/AG)

Alors qu’une plateforme anglophone leur était offerte devant une assistance de responsables juifs américains, les responsables des manifestations ont indiqué, lundi, qu’ils avaient la conviction que le contrat social fondamental conclu entre l’État et ses défenseurs était détruit par la tentative gouvernementale visant à supprimer les contre-pouvoirs venant entraver la toute-puissance potentielle de la majorité.

La bataille politique et sociale sur les limitations gouvernementales s’est donc également introduite sur la scène de la conférence de l’Assemblée générale des JFNA (Fédérations juives d’Amérique du nord), qui a ouvert ses portes dimanche soir à environ 2 000 participants, en amont du 75e anniversaire de l’indépendance israélienne.

« Ce coup d’État déchire le contrat sacré entre l’État juif et ses défenseurs », a commenté Yiftach Golov, l’un des leaders du mouvement Frères d’armes, une organisation de réservistes proche du mouvement de protestation qui s’oppose au plan de réforme du système de la justice en Israël. « Ce n’est pas une période comme les autres. En tant qu’armée du peuple, nous sommes convaincus qu’il est de notre responsabilité de protéger Israël face aux menaces » mais « cette fois, il ne s’agit pas d’une menace extérieure », a-t-il ajouté.

Ronit Harpaz, directrice-générale d’Endoron Medical et leader du mouvement d’opposition au projet de la coalition au sein de l’industrie des hautes technologies, a indiqué que l’incertitude entraînée par la refonte du système judiciaire sur le marché « est suffisante pour écraser notre écosystème de start-ups ».

Alors que des manifestations avaient été organisées à l’extérieur du bâtiment accueillant l’Assemblée générale et qu’elles ont finalement franchi son enceinte, avec plusieurs intervenants qui ont abordé dans leurs discours la désunion nationale, le plan de réforme judiciaire est assurément resté au premier plan des préoccupations des responsables américains venus assister à la conférence, un événement annuel qui se déroule en Israël tous les cinq ans.

Le bruit des manifestations s’est infiltré dans la salle de conférence elle-même où les émotions, comme au-dehors, ont été fortes.

Plusieurs participants ont applaudi les protestataires, tandis que d’autres ont indiqué qu’ils ignoraient les griefs soulevés par les citoyens israéliens qui ont le sentiment que le pouvoir n’a pas été distribué de manière équitable.

Ronit Harpaz, PDG d’Endoron, s’exprimant lors d’une manifestation à Ramat Hasharon, le 25 février 2023. (Autorisation)

« Ce qui a commencé comme un débat portant sur la politique législative a malheureusement révélé des préoccupations bien plus nombreuses et bien plus profondes », a dit Eric Fingerhut, président et directeur-général des JFNA, lors de la session.

D’autres ont expliqué être plus inquiets face à la possibilité que la discussion sur le projet de réforme du système judiciaire puisse avoir un effet déstabilisateur sur l’unité israélienne.

« Cela va devenir l’époque la plus clivante, la plus périlleuse pour ce pays – et ce n’est pas en raison de ce que fait le gouvernement » mais bien à cause « de ce que nous nous faisons subir les uns aux autres », a déclaré Ariella, une participante juive à la conférence. Des propos qui sont venus en écho aux avertissements lancés dimanche soir par le président Isaac Herzog lors de l’ouverture de l’Assemblée générale. Il avait ainsi jugé que la désunion entre les Juifs était une menace existentielle.

Yet Harpaz, qui fait partie d’une équipe qui a été formée de manière indépendante et qui a assisté aux audiences publiques, à la Knesset, qui étaient consacrées à la législation sur la nomination des juges – un projet de loi qui placerait ces nominations sous le contrôle de la coalition au pouvoir – a estimé que l’économie avait d’ores et déjà essuyé des dégâts.

« Les investisseurs veulent parier sur vous quand ils ont le sentiment que les règles du jeu sont claires et qu’elles peuvent être appliquées », a dit cette cofondatrice de start-up. « C’est l’incertitude qui règne en ce moment ».

« Avançons jusqu’en 2024 : le concept de start-up nation est mort et enterré et avec lui, tout ce qui était bon dans ce pays », a-t-elle ajouté.

Harpaz a noté que pendant le premier trimestre de l’année 2023, presque aucune nouvelle start-up n’avait été enregistrée en Israël.

« Ce n’est pas une exagération. Je peux vous dire que ce phénomène est actuellement en train de se produire », a-t-elle poursuivi.

Des Israéliens tenant les drapeaux israélien et américain manifestent aux abords de la conférence des JFNA à Tel Aviv, le 23 avril 2023. (Crédit :Tomer Neuberg/FLASH90)

Asaf Agmon, général de brigade à la retraite impliqué dans l’organisation Ein Matzav, opposée au plan de refonte judiciaire, qui réunit essentiellement d’anciens responsables de la sécurité, a lui aussi estimé que l’État juif était potentiellement à un tournant et il a imploré la diaspora « de s’impliquer ».

« Nous sommes en lutte dans le cadre de notre crise la plus grave depuis 1948. Vous, les Juifs de la diaspora, vous avez un rôle à tenir. Cette fois-ci, nous ne combattons pas un ennemi venu de par-delà nos frontières. Nous combattons depuis l’intérieur », a-t-il déclaré.

Lundi soir, les Israéliens commenceront à marquer Yom HaZikaron, la journée en hommage aux soldats tués sur le front et aux victimes du terrorisme. Cet événement solennel a longtemps été une journée d’unité nationale, mais Agmon a fait écho aux propos tenus par de nombreux politiciens israéliens quand il a dit que le conflit actuel pouvait nuire à la nature « sacrée » de cette journée.

Ces derniers jours, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a été rejoint par les leaders de l’opposition dans un appel réclamant aux Israéliens de ne pas politiser les cérémonies du souvenir, et plusieurs politiciens ont été écartés des cérémonies, leur présence étant controversée aux yeux de familles de proches de défunts. Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, devrait se rendre à un événement de commémoration, mardi – même si les critiques déplorent son soutien passé au terrorisme juif, le fait qu’il n’a jamais fait son service militaire et qu’il a souvent encouragé les agitations politiques.

Évoquant les déchirures dans le tissu sociétal, Agmon a raconté avoir entendu quelqu’un dire à une mère ayant perdu son fils que « j’espère que vous enterrerez bientôt votre deuxième enfant », parce que la femme portait une pancarte anti-Netanyahu.

Parallèlement à l’apparition des leaders du mouvement de protestation, un panel auquel participait le député Simcha Rothman, du parti d’extrême-droite Otzma Yehudit, qui est l’un des artisans du projet de réforme du système judiciaire israélien, a été perturbé par des activistes.

Des milliers d’Israéliens manifestant contre le programme de réforme du système judiciaire du gouvernement, à Tel Aviv, le 22 avril 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)

Entre vendredi et dimanche, les manifestants ont également organisé des initiatives visant à accueillir les participants à la conférence à l’aéroport et dans leurs hôtels dans le but d’ouvrir le débat sur la réforme du système judiciaire.

Jeudi, des activistes de droite prévoient un grand rassemblement en soutien au plan de refonte aux portes de la Knesset, à Jérusalem. Ils n’ont toutefois rien organisé pour contre-manifester devant le bâtiment accueillant l’Assemblée générale des JFNA.

« C’est important que nous nous souvenions, bien sûr, du fait que ce sont les mêmes passions animant les rues, que ce sont les mêmes profondeurs de sentiment chez les intervenants qui se manifestent aussi chez les Israéliens favorables au projet de réforme », a expliqué Fingerhut. « Ce sont des citoyens qui, au sein de la société israélienne, ont eu le sentiment d’être exclus des systèmes de gouvernance antérieurs et qui tentent, eux aussi, de faire entendre leur voix ».

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