Chomsky fustige les tactiques du BDS sur le modèle de l’Afrique du Sud
Pour l'académicien, le BDS peut récolter des résultats inverses et les Palestiniens souffrent plus que les Africains
Marissa Newman est la correspondante politique du Times of Israël
L’universitaire américain Noam Chomsky dénonce la tactique de la campagne de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) contre Israël, soulignant que les organisateurs ignorent l’absence des sanctions internationales, et en particulier l’afflux constant de fonds en provenance des États-Unis.
Dans un éditorial de The Nation, publié mercredi, l’intellectuel public et critique virulent d’Israël affirme concernant le BDS : « Le travail éducatif nécessaire n’a pas été fait », soulignant que certains de ses principaux objectifs pourraient finalement avoir un effet inverse à celui souhaité.
Le mouvement BDS devrait être nommé le mouvement BD, écrit Chomsky, « car les sanctions, ou actions de l’Etat, ne sont pas à l’horizon – l’une des nombreuses différences notoires avec l’Afrique du Sud. »
L’absence de pressions américaines sur Israël sape l’analogie « douteuse » établie entre Israël et l’Afrique du Sud, écrit-il, car dans le cas de cette dernière, les sanctions ont précédé les mesures de boycott et de désinvestissement. Et d’énumérer d’autres failles dans l’analogie : « Dans les territoires occupés, la situation est bien pire qu’elle ne l’était en Afrique du Sud, où les nationalistes blancs avaient besoin de la population noire : c’était la main-d’œuvre du pays, et si grotesques étaient les bantoustans, le gouvernement nationaliste consacrait des ressources pour qu’ils bénéficient d’une reconnaissance internationale. À l’opposé, Israël veut se débarrasser du fardeau palestinien. La route en vue n’est pas celle de l’Afrique du Sud, comme souvent clamé, mais bien pire. »
Au sujet de la déclaration du secrétaire américain d’État John Kerry il y a quelques mois – rétractée après avoir suscité une violente réaction – selon laquelle Israël se dirigeait vers un État d’apartheid s’il ne concluait pas d’accord de paix, Chomsky écrit que « cette croyance commune est un mirage ».
« Tant que les États-Unis soutiennent les politiques expansionnistes d’Israël, il n’y a aucune raison de s’attendre à ce qu’elles cessent. Des tactiques doivent être élaborées en conséquence », ajoute-t-il.
En ce qui concerne les liens entre Israël et les Etats-Unis, Chomsky déclare : « Les Etats-Unis devraient également être condamnés et punis pour fournir un soutien militaire, économique, diplomatique et même idéologique décisif pour ces crimes. »
Chomsky admoneste le mouvement BDS pour certaines de ses politiques qui mettent l’accent sur les boycotts l’intérieur des frontières internationalement reconnues d’Israël. Il s’agit pour lui d’un « échec quasi-uniforme » car il « ouvre la porte à la réaction standard de ‘maison de verre’. Par exemple, si nous boycottons l’Université de Tel Aviv parce qu’Israël viole les droits de l’Homme à la maison, alors pourquoi ne pas boycotter Harvard en raison de bien plus importantes violations des Etats-Unis ? »
« Les initiatives avortées nuisent doublement aux victimes – en déplaçant l’attention vers des questions non pertinentes… et en gaspillant les réelles possibilités de faire quelque chose de significatif », ajoute Chomsky.