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Cinéma : Jonathan Glazer, le commandant d’Auschwitz et l’effroyable banalité du mal

Contrairement à d'autres fictions sur la Shoah portant sur des actions héroïques ou de survie, ce long-métrage se focalise sur des scènes de la vie ordinaire qui rendent la réalité encore plus terrifiante

L'actrice allemande Sandra Hueller (G) et le réalisateur britannique Jonathan Glazer assistent à une conférence de presse pour le film "The Zone Of Interest" lors de la 76e édition du Festival de Cannes à Cannes, le 20 mai 2023. (Crédit : Stefano RELLANDINI / AFP)
L'actrice allemande Sandra Hueller (G) et le réalisateur britannique Jonathan Glazer assistent à une conférence de presse pour le film "The Zone Of Interest" lors de la 76e édition du Festival de Cannes à Cannes, le 20 mai 2023. (Crédit : Stefano RELLANDINI / AFP)

En recréant la vie quotidienne du commandant du camp d’extermination d’Auschwitz, dans « La zone d’intérêt » en salles mercredi, le cinéaste Jonathan Glazer a voulu montrer la banalité du mal à l’oeuvre dans la Shoah, perpétrée par « des gens comme les autres ».

Le film a reçu cinq nominations aux Oscars et le réalisateur britannique a décroché le Grand Prix au dernier Festival de Cannes.

La « zone d’intérêt » était l’appellation utilisée pour décrire les 40 kilomètres carrés entourant Auschwitz-Birkenau, sur le territoire de l’actuelle Pologne. Dans le plus grand camp de concentration et d’extermination nazi, un million de Juifs européens sont morts entre 1940 et 1945, sur les six millions assassinés pendant la Shoah.

Dans le film, Glazer fait le portrait glaçant du commandant Rudolf Höss (joué par l’acteur allemand Christian Friedel), sa femme Hedwig, surnommée « la reine d’Auschwitz » (Sandra Hüller, vue dans « Anatomie d’une chute »), et leurs enfants, goûtant aux plaisirs de la vie dans leur maison jouxtant le camp.

Ce personnage, qui a réellement dirigé Auschwitz pendant plus de trois ans et pris l’initiative d’en augmenter les capacités exterminatrices, tente, aux côtés de sa femme, de construire une vie de rêve dans cette maison dotée d’un jardin fleuri et d’une piscine, non loin d’une rivière où ils s’amusent parfois avec leurs enfants.

Seule lueur d’humanité: la résistance incarnée par une fillette polonaise qui, chaque nuit, sème de la nourriture pour les détenus, inspirée d’une femme de 90 ans que Glazer a rencontrée et qui faisait la même chose.

« Des gens ordinaires »

Contrairement à d’autres fictions sur la Shoah portant sur des actions héroïques ou de survie, ce long-métrage se focalise sur des scènes de vie ordinaire qui rendent encore plus terrifiante la réalité de l’autre côté du mur : le bruit des tirs, celui de l’arrivée des convois, les cris des détenus.

Rien n’est montré, sauf la fumée qui se dégage des chambres à gaz. « Tout a été très bien calibré pour qu’on sente qu’elle est toujours là, cette machine monstrueuse », a expliqué Jonathan Glazer, « qui a grandi dans une famille juive, entouré de proches et d’amis juifs », à l’AFP à Cannes.

S’inspirant du roman du même nom de son compatriote Martin Amis et après deux ans de recherches, le réalisateur s’est aperçu que, derrière l’extermination, il y avait « juste un groupe de gens du type bourgeois, provincial, ambitieux, (…) ordinaires ». Ils aiment « avoir une jolie maison, un joli jardin, des enfants en bonne santé, de l’air frais », raconte celui qui s’est documenté sur leur manière de vivre pour « comprendre » l’incompréhensible.

« Ca laisse à penser que l’horreur, c’est que ces gens soient non pas des monstres mais des gens comme les autres. Comment des gens comme les autres peuvent-ils agir de la sorte? » s’interroge-t-il, dix ans après son précédent long-métrage, « Under the Skin », avec Scarlett Johansson.

Plus terrifiant encore, pour lui, est de se demander: « comment se serait-on comporté à leur place? A quel point leur ressemble-t-on? »

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