Comment une nouvelle immigrante est devenue guide dans les tunnels du Hamas
Quand elle vivait aux Etats-Unis, la capitaine Libby Weiss n’a jamais pensé qu’elle travaillerait un jour avec des médias internationaux en zone de guerre
TEL AVIV — Le Capitaine Libby Weiss a passé la plus grande partie de son été 2014 dans un tunnel du Hamas, et elle n’aurait pas voulu être ailleurs.
L’armée israélienne a pris le contrôle du tunnel qui allait de Gaza en Israël à proximité du kibboutz d’Ein Hashlosha, lors de l’opération Bordure protectrice contre le Hamas à Gaza. En tant que porte-parole de l’armée, Weiss avait pour mission de montrer le tunnel aux journalistes, et elle était la première à faire venir des journalistes étrangers dans l’espace confiné.
Son premier tour a été pour Jodi Rudoren du New York Times et le présentateur vedette de CNN, Wolf Blitzer.
« C’était vraiment effrayant d’être à l’intérieur, a déclaré Weiss. Il y avait des paquets de chips vides et des bouteilles d’eau écrasées au sol. Cela vous faisait comprendre à quel point l’ennemi était proche ».
Au cours des six dernières années, Weiss a été à disposition 24h/24 et 7j/7 des journalistes du monde entier. Les journalistes se tournent vers elles lorsqu’ils veulent filmer des soldats israéliens en action ou ont besoin d’un commentaire rapide de Tsahal sur une nouvelle fraîche.
Le 17 août, Weiss va finalement couper son téléphone fourni par l’armée. A 29 ans, elle démissionne de son poste et quitte l’armée.
Weiss n’est pas la soldate israélienne typique. Née aux Etats-Unis et élevée à Portland dans l’Oregon, elle est venue vivre en Israël autour de la vingtaine et s’est engagée dans l’armée peu après. Elle n’était pas obligée d’aller dans l’armée, à l’âge de 23 ans, Weiss aurait pu éviter le service militaire, mais l’idée de ne pas l’effectuer ne lui est même pas venue à l’esprit.
« Il n’y a jamais eu de doute dans mon esprit, je voulais servir, a déclaré Weiss. J’ai considéré cela comme la responsabilité de base de quiconque qui est citoyen, et il s’agissait aussi pour moi d’une manière d’adopter mon identité israélienne ».
Elle a travaillé dans l’Unité des Porte-Parole de Tsahal quasiment toute sa carrière militaire. Depuis mars, Weiss dirige le département des réseaux sociaux internationaux, supervisant une équipe de 14 soldats engagés et d’un officier junior qui produit des contenus viraux en anglais, espagnol et français.
Leur mission : raconter l’histoire de l’armée israélienne, et promouvoir une image positive d’une armée qui est souvent condamnée à l’international.
Travaillant dans un bâtiment banal au centre de Tel Aviv, les soldats sont assis et penchés sur plusieurs ordinateurs préparant des vidéos tournées sur le terrain et téléchargeant les vidéos vers des blogs de l’armée israélienne et sur les comptes Facebook, Twitter, Instagram et Snapchat de l’armée. La plupart des soldats dans la division sont des immigrants d’Amérique du Nord, d’Amérique du Sud et de France.
Weiss a commencé à travailler dans la branche de la presse internationale de l’unité, opérant à la surveillance de médias et la gestion de crise. Bien qu’elle ait signé, au départ, pour un contrat d’un an et demi, elle est rapidement devenue accroc.
« J’étais fascinée par le travail et j’ai compris son importance dès le départ, a-t-elle déclaré. Je n’ai pas eu à y penser deux fois pour rester et prendre des fonctions à responsabilité ».
Elle a rapidement été nommée à la tête du département des médias d’Amérique du Nord, où elle a passé quatre ans. Elle a gravi les échelons pour obtenir le rang de capitaine.
Son téléphone sonnait constamment, il n’y avait pas un jour de routine. Weiss gardait son uniforme de terrain et ses équipements de sécurité prêts dans sa voiture.
Parfois, son travail l’a conduit à voyager. Après le typhon des Philippines en 2013 et le tremblement de terre au Népal, Weiss s’est rendue avec les délégations de soutien pour venir en aide à ces pays.
« Chaque fois qu’une catastrophe frappait dans le monde, Libby était mon premier choix parce que je pouvais totalement compter sur elle, a déclaré l’ancien porte-parole de Tsahal, le lieutenant Colonel Peter Lerner, patron et mentor de Weiss pour une grande partie de son service dans l’armée.
Lors de ses missions à l’étranger, Weiss a été témoin de scènes horribles, mais aussi de miracles. Au Népal, elle a vu un adolescent être piégé pendant plusieurs jours sous les décombres et sortir vivant puis être amené à l’hôpital de Tsahal afin d’y être soigné.
« Il a survécu grâce à une bouteille de ghee, du beurre clarifié, qui se trouvait dans une des poches d’air », s’est souvenu Weiss.

Aux Philippines, Weiss était présente pour la naissance du premier bébé dans l’hôpital de terrain de Tsahal. Ses parents l’ont appelé Israël.
« J’ai bien sympathisé avec la famille, et nous sommes encore en contact », a-t-elle déclaré.
De toutes ses expériences dans l’armée, la guerre d’Israël avec le Hamas en 2014 a été la plus difficile et la plus exigeante. Weiss s’est soudain retrouvée à devoir gérer des centaines de journalistes par jour plutôt que des dizaines. Elle faisait des entretiens devant des caméras 10, 20 parfois 30 fois par jour. Souvent, ils étaient interrompus par les sirènes de raids aériens ce qui poussaient Weiss et les journalistes à sauter dans des fossés pour se protéger des roquettes.
Weiss a déclaré que la guerre a testé sa capacité à faire la distinction entre personnel et professionnel.
« Quand on est un citoyen israélien et qu’il y a une guerre, on se sent impliqué. C’est juste à votre porte. Ensuite, ajoutez à cela que l’on est en uniforme militaire », a-t-elle déclaré.
« Vous êtes exposés et vous connaissez les mouvements des troupes et les plans militaires avant qu’ils ne soient réalisés, et vous découvrez que des détails changent la vie de gens, des soldats meurent. Cela implique une réponse émotionnelle à tous les niveaux, mais en tant que professionnel, vous ne pouvez pas faire ça ».
En grandissant dans l’Oregon, née de parents Israéliens, Weiss n’a jamais imaginé devenir officier de Tsahal. Et elle ne savait pas qu’elle vivrait en Israël.
« Je ne sais pas si je me suis vue moi-même, du moins en tant qu’adolescente, immigrer en Israël, a déclaré Weiss. Mais nous nous sentions incontestablement connectés à Israël. Cela faisait partie de notre identité. Je participais à la journée juive dans mon école et mes parents parlaient hébreu à la maison. Nous nous voyons comme des Américains israéliens, et nous étions certainement sionistes ».
Après avoir obtenu un diplôme en sciences politiques à l’Université de Northwestern en 2010, Weiss a passé un an à participer au Programme du Gouvernement Israélien, un programme MASA Israël sélectif et géré par le Centre d’Héritage Menachem Begin à Jérusalem.
Au milieu de l’année, Weiss a décidé de faire d’Israël son foyer permanent, et a officiellement fait son alyah une fois que le programme était terminé. Puisqu’elle était citoyenne israélienne de naissance grâce à ses parents, tout ce qu’elle a eu à faire pour immigrer était d’aller au ministère de l’Intérieur, montrer son passeport israélien et recevoir une carte d’identité israélienne.
« A ce moment-là, j’ai pris décision la plus importante de toutes jusqu’alors, et peut-être la plus importante de ma vie, cela m’a pris 15 minutes et c’était le processus bureaucratique le moins douloureux dont j’ai dû faire l’expérience en Israël », s’est souvenue Weiss.
Cependant, Weiss a le sentiment d’avoir manqué l’expérience émotionnelle puissante que la plupart des immigrants d’Amérique du Nord ressentent lorsqu’ils prennent un vol d’alyah organisé par Nefesh B’Nefesh en compagnie de dizaines d’autres nouveaux immigrants avec seulement un billet aller vers l’Etat juif.
« Je pense que j’aurais aimé la symbolique de descendre de l’avion et d’avoir la communauté qui vous accueille à la minute où vous touchez le sol israélien, a-t-elle déclaré. Cela met en relief et renforce cette décision importante, à savoir de joindre – ou rejoindre – le peuple israélien ».

Le mois dernier, Nefesh B’Nefesh a honoré Weiss en lui remettant le Prix du Jeune Leader Bonei Sion. Elle a également reçu de nombreux autres prix au cours de sa carrière militaire, y compris le prestigieux Prix Présidentiel d’Excellence en 2014.
Les parents de Weiss et ses frères et sœurs plus âgés vivent toujours aux Etats-Unis. Ils sont fiers de Weiss.
« Quand Libby a déménagé en Israël, cela ne m’a pas vraiment surpris qu’elle rejoigne l’armée, a déclaré son frère Gil, docteur à Chicago. Elle éprouvait un fort sentiment de vouloir faire ce que l’on attendait de ses pairs et de prendre ses responsabilités ».
Maintenant qu’elle quitte l’armée, Weiss prévoit de prendre un peu de temps libre et d’aller dans le secteur des affaires. Elle a achevé le programme de MBA Exécutif International Kellogg-Recanati à l’Université de Tel-Aviv alors qu’elle était dans l’armée.
Alors qu’elle commence ce nouveau chapitre dans sa vie, Weiss n’a aucun regret – ni son temps passé dans l’armée ni sa décision de déménager en Israël.
« Je me vois à la fois comme américaine et israélienne, et j’apprécie les deux pays », a-t-elle déclaré.
Cet article a été sponsorisé et rédigé en partenariat avec Nefesh B’Nefesh, qui en coopération avec le ministère de l’Alyah d’Israël, l’Agence juive, le KKL et le JNF-USA minimise les obstacles professionnels logistiques et sociaux de l’alyah, et a fait venir plus de 50 000 olim d’Amérique du Nord et du Royaume-Uni au cours des 15 dernières années. Cet article a été conçu par l’équipe de rédaction du JTA.
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