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Contenus haineux : Facebook essuie un revers devant la justice de l’UE

Un hébergeur de contenus peut être contraint de supprimer au niveau mondial des commentaires jugés diffamatoires ou injurieux par une juridiction d'un pays de l'UE

Le logo Facebook est affiché lors de la conférence F8 Facebook Developers à San Jose, Californie, le 30 avril 2019. (Justin Sullivan/Getty Images via JTA)
Le logo Facebook est affiché lors de la conférence F8 Facebook Developers à San Jose, Californie, le 30 avril 2019. (Justin Sullivan/Getty Images via JTA)

Un hébergeur de contenus comme Facebook peut être contraint de supprimer au niveau mondial des commentaires jugés diffamatoires ou injurieux par une juridiction d’un pays de l’UE, a estimé jeudi la Cour de justice de l’Union européenne.

Le géant américain a déploré la décision, jugeant qu’elle « sape le principe de longue date selon lequel un pays n’a pas le droit d’imposer à un autre sa législation sur la liberté d’expression », selon un communiqué transmis à l’AFP.

L’ex-élue autrichienne à l’origine de l’affaire a de son côté salué « un succès historique pour les droits de la personne contre les géants du web ».

La Cour de justice de l’UE (CJUE), établie à Luxembourg, était interrogée par la Cour suprême autrichienne sur l’interprétation à donner à une directive européenne de 2000 sur le commerce électronique.

À l’origine du litige, une députée écologiste autrichienne s’était plainte qu’un utilisateur de Facebook la brocarde sur le réseau social, en commentant un article de presse expliquant le soutien des Verts autrichiens à une mesure favorable aux réfugiés.

Le lien vers l’article partagé par l’internaute sur sa page personnelle avait fait apparaître une photo de l’élue.

Et il avait rédigé sous la photo un commentaire dans des termes qui ont été jugés injurieux par un tribunal autrichien, explique dans un communiqué la Cour de justice de l’UE.

La députée, Eva Glawischnig-Piesczek (aujourd’hui retirée de la vie politique) a estimé que l’atteinte à son honneur était d’autant plus importante que « cette contribution pouvait être consultée par chaque utilisateur de Facebook », dans le monde entier.

Interrogée par la Cour suprême (l’Oberster Gerichtshof), la juridiction européenne estime qu’un tribunal d’un pays de l’UE « peut enjoindre un hébergeur de supprimer » du contenu ou des informations reproduisant ce qui a été « déclaré illicite précédemment ». La Cour évoque des contenus « identiques » ou « équivalents ».

« Corrompue »

L’hébergeur, tel le réseau social Facebook, peut aussi être enjoint « de supprimer les informations visées par l’injonction ou de bloquer l’accès à celles-ci au niveau mondial, dans le cadre du droit international pertinent dont il est du ressort des États membres de tenir compte », poursuit la CJUE.

Selon Facebook, « ce jugement soulève des questions cruciales concernant la liberté d’expression et le rôle que les entreprises de l’Internet devraient jouer dans la surveillance, l’interprétation et la suppression des propos qui pourraient être illégaux dans un pays donné ».

« Il sape le principe de longue date selon lequel un pays ne peut pas imposer à un autre sa législation sur la liberté d’expression », a regretté un porte-parole du réseau social dans un communiqué.

Facebook estime qu’une telle décision ne sera applicable que si les juridictions nationales établissent « des définitions très claires » de ce qui peut être considéré comme « identique » ou « équivalent » à un contenu puni par la loi.

En septembre 2016, le parti Vert autrichien avait apporté son soutien à Mme Glawischnig-Piesczek – à l’époque sa responsable nationale – en portant plainte auprès du tribunal de commerce de Vienne.

En pratique, la plainte visait les messages d’un compte Facebook anonyme qui avait notamment traité Mme Glawischnig de « corrompue » et que le réseau social a refusé de supprimer, selon les Verts.

« Facebook nous a répondu que ces propos ne contrevenaient pas à leurs normes. Mais ils tombent bel et bien sous le coup de la loi autrichienne », avait à l’époque souligné un porte-parole des Verts, assurant vouloir créer une jurisprudence « au profit de tous ».

Pour Mme Glawischnig-Piescek, citée jeudi par l’agence de presse autrichienne APA, cette décision « à la portée mondiale » ne porte « en rien » atteinte à la liberté d’opinion, mais renforce les droits du citoyen.

C’est un « jalon posé dans le combat contre la haine sur la toile », a commenté l’avocate de l’ex-députée, Maria Windhager.

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