Corruption : Netanyahu demande un report de son témoignage à son procès
La défense a demandé un report de deux mois et demi, une initiative qui pourrait entraîner de nouvelles requêtes réclamant la récusation du Premier ministre qui avait affirmé que son rôle de dirigeant n'interférerait pas avec la justice
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.
L’équipe chargée de la défense du Premier ministre Benjamin Netanyahu a déposé une requête auprès de la Cour de district de Jérusalem, lui demandant de reporter son témoignage de deux mois et demi dans le cadre de son procès pour corruption en cours. Ses avocats ont affirmé qu’une série d’incidents sécuritaires survenus alors qu’il devait se préparer à apparaître devant les juges avait rendu « impossible » ce travail de préparation, ont indiqué les médias israéliens dans la matinée de lundi.
La requête, semble-t-il, a mentionné plusieurs développements majeurs survenus ces derniers mois, ajoutant que ces derniers avaient entraîné « l’annulation de presque tous les créneaux horaires alloués à préparer le Premier ministre à présenter son témoignage ». Elle a invoqué « des nécessités sécuritaires ou diplomatiques urgentes. »
Elle a affirmé que « ce court report permettra à la défense de se préparer de façon appropriée pour ce témoignage sans pour autant porter atteinte à l’intérêt public. »
Le tribunal de district de Jérusalem a indiqué lundi en fin de matinée qu’il tiendra une audience sur cette demande mercredi à 11 heures.
La juge Rivka Friedman-Feldman a ordonné à l’accusation de déposer sa réponse à la demande avant demain midi.
Cette requête était largement attendue – avec une guerre en cours qui, notaient les observateurs, allait empêcher Netanyahu de se préparer correctement pour son procès. Il s’avère également le Premier ministre ne pourra pas paraître physiquement, cette fois-ci, devant les magistrats dans la mesure où le tribunal n’offre ni pièce blindée, ni abri antiaérien.
Netanyahu travaille majoritairement, en ce moment, depuis une pièce blindée qui est installée dans les sous-sols du Bureau du Premier ministre. Il a abandonné pour le moment son bureau habituel qui se trouve à l’étage, conformément aux instructions qui lui ont été données par les responsables de la sécurité, a noté un reportage qui a été diffusé dimanche, quelques heures avant la soumission de la requête de la défense à la Cour.
Selon la chaîne d’information N12, Netanyahu a confié à ses collaborateurs qu’il avait reçu pour instruction d’utiliser la pièce blindée, au sous-sol de son bureau, et d’éviter de se tenir là où il est habituellement présent « en permanence » en raison des inquiétudes causées par de potentielles attaques au drone et autres. Le Hezbollah avait frappé son habitation de Césarée lors d’une frappe au drone, le mois dernier.
Ce drone, qui avait été envoyé depuis le Liban en date du 19 octobre par le groupe terroriste soutenu par l’Iran, avait explosé au domicile de Netanyahu quand il n’était pas présent et il avait détruit la fenêtre d’une chambre, endommageant légèrement l’habitation.
Le reportage diffusé dimanche a fait remarquer que les nouveaux protocoles de sécurité pouvaient expliquer pourquoi les récentes rencontres du cabinet ont, ces derniers temps, été délocalisées à différents endroits et pourquoi le mariage d’Avner, le fils du Premier ministre, a été reporté à une date ultérieure – et pas à court-terme.
Netanyahu avait refusé de démissionner quand il avait été mis en examen, affirmant qu’il était capable de mener de front à la fois son passage devant la justice et le travail exigé par la direction du pays. La nouvelle requête pourrait entraîner dans son sillage des réactions des groupes de veille gouvernementaux auprès de la Haute cour de justice – ils pourraient demander une récusation du Premier ministre. Des demandes antérieures, dans ce sens, ont été rejetées par les magistrats.
Ces organisations avaient déposé des requêtes auprès de la Haute cour en 2020, demandant aux juges de statuer qu’assumer la fonction de Premier ministre avec, en arrière-plan, un procès pour corruption entraînerait un conflit d’intérêt trop important pour être ignoré. Pendant les audiences qui avaient été organisées sur cette problématique, la question s’était posée de savoir ce qui pourrait survenir si Netanyahu devait être jugé en période de guerre – ses avocats avaient répondu qu’il serait en capacité de continuer à assumer ses fonctions tout en remplissant ses obligations judiciaires.
Reconnaître devant la Cour de district de Jérusalem qu’il n’a pas pu, en réalité, conjuguer son travail de Premier ministre et le travail de préparation de son procès pourrait sembler contredire son affirmation du contraire, créant des difficultés pour Netanyahu si la question devait être à nouveau soulevée.
Netanyahu devait commencer à témoigner le 2 décembre – avec le début des interventions de ses avocats. Ce témoignage devrait durer plusieurs heures par jour et il pourrait durer des semaines.
Au mois de juillet, l’équipe juridique de Netanyahu avait demandé au tribunal de reporter son témoignage du mois de novembre au mois de mars 2025 en raison de la nécessité de gérer la guerre, mais le tribunal avait rejeté la demande, fixant cette date au mois de décembre.
Le Premier ministre est accusé de fraude et d’abus de confiance dans deux dossiers et de corruption, fraude et abus de confiance dans un troisième. Il avait été inculpé il y a près de cinq ans, au mois de janvier 2020, et le procès avait débuté au mois de mai de la même année.
Netanyahu a toujours clamé son innocence, affirmant que les accusations ont été fabriquées de toutes pièces dans le cadre d’une chasse aux sorcières lancée par la police et le ministère public.
Jusqu’à présent, Netanyahu ne s’est pas présenté à la barre – même s’il a comparu à quelques reprises devant le tribunal. Principal accusé, Netanyahu devrait être le premier à être soumis à un contre-interrogatoire lorsque la défense présentera ses témoins dans les trois affaires.
Le procès a été critiqué pour la lenteur de la procédure.
Il a débuté il y a quatre ans et demi et, en l’état actuel des choses, il ne devrait pas se terminer avant 2028 ou 2029 – en tenant compte des appels.