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Analyse

COVID-19 : Israël achète des vaccins – mais les défis logistiques sont nombreux

Le pays a acheté des millions de doses de vaccin à Pfizer, mais le diable est dans les détails de leur stockage et de leur transport. Serons-nous prêts ?

Un médecin, en habit de protection et portant le masque, avec une seringue et une dose de vaccin. (Crédit : oshcherban via iStock by Getty Images)
Un médecin, en habit de protection et portant le masque, avec une seringue et une dose de vaccin. (Crédit : oshcherban via iStock by Getty Images)

Israël a signé aujourd’hui un accord portant sur l’achat de millions de doses de vaccin contre le coronavirus, qui devraient être livrées d’ici quelques mois. Mais le pays sera-t-il prêt pour les recevoir ?

Dans un message enthousiaste à destination des Israéliens, dans la soirée de jeudi, le ministre de la Santé Yuli Edelstein avait annoncé qu’il signerait un accord aujourd’hui avec Pfizer pour un nombre de doses suffisant pour presque la moitié de la population israélienne. Cette annonce est survenue au lendemain d’une déclaration triomphante du Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui dévoilait qu’un accord était imminent.

Jérusalem s’est âprement battu en faveur d’un accord depuis lundi, la journée où Pfizer a fait savoir que son vaccin semblait être à 90 % efficace.

Netanyahu a indiqué que les vaccins commenceraient à arriver dès le mois de janvier. D’autres responsables israéliens ont déclaré qu’il serait probablement mis à disposition plus tard – mais toujours au cours du premier trimestre 2021. Le projet est de l’introduire presque immédiatement dans les dispensaires et hôpitaux après le feu vert qui sera apporté par les régulateurs israéliens.

On peut avoir l’impression qu’un rêve est en train de devenir réalité. Mais il y a toutefois d’importantes réserves.

Tout d’abord, il faut mentionner que le vaccin de Pfizer n’est pas encore prêt, qu’il n’a pas été approuvé et que certains experts ont appelé vivement à la prudence, des données déterminantes étant encore nécessaires.

Mais même si tout doit se dérouler pour le mieux à ce niveau-là, l’arrivée du vaccin présentera encore d’importants défis.

Le vaccin de Pfizer doit absolument être conservé à une température de moins 70 degrés au minimum – une température bien inférieure à celle de n’importe quel autre vaccin. Cela nécessitera des infrastructures sans précédent pour recevoir et stocker le vaccin, sans même parler du défi gigantesque de le distribuer. Les doses ne peuvent rester que quelques jours au réfrigérateur après leur décongélation.

Une infirmière sort un vaccin du congélateur. (Crédit : Natalia Kokhanova via iStock by Getty Images)

Et jamais, dans le passé, il n’y a eu une telle nécessité d’une « chaîne du froid » pour un si grand nombre de vaccins, avec des températures aussi basses. Les responsables de la Santé qui avaient commencé à s’intéresser au vaccin s’étaient concentrés sur celui de Moderna, que l’Etat juif espère recevoir au milieu de l’année 2021 suite à un accord préliminaire signé en juin. Mais ce vaccin peut être conservé à moins 20 degrés Celsius, soit 50 degrés de plus que celui de Pfizer – ce qui est dans les capacités des structures de réfrigération médicales habituelles.

Israël s’est pressé de trouver un accord avec Pfizer de manière à ce que, si le vaccin de la compagnie devait être approuvé en premier, le pays ne perde pas de temps pour lancer son opération de vaccination. Plus vite le vaccin commencera à être injecté, plus vite les citoyens et l’économie pourront reprendre une vie plus normale. L’accord anticipé – annoncé si rapidement après les informations optimistes de Pfizer – est un coup politique significatif et un encouragement pour la population israélienne, qui n’a pas vraiment le moral. C’est l’annonce que les officiels du ministère de la Santé attendaient de pouvoir faire depuis des mois.

Mais des questions importantes restent posées au point de vue de la logistique. Et il n’y a aucun plan détaillé s’attaquant au problème du refroidissement et à celui du transport.

Reconnaissant la complexité du problème, Pfizer prévoit lui-même de fabriquer d’impressionnantes boîtes de refroidissement, qui seront suivies par GPS et qui conserveront à la bonne température les vaccins pendant plusieurs jours (les informations suggèrent que le froid pourrait être préservé « jusqu’à » dix jours, ce qui reste vague et qui reste soumis à des facteurs environnementaux tels que la température extérieure). Ces boîtes s’appuieront sur la neige carbonique – une neige carbonique qui perd de son efficacité avec le temps. Aux Etats-Unis, Pfizer peut contrôler ses propres opérations de distribution en utilisant le transport routier, et il est concevable que le laboratoire sera en mesure de livrer les vaccins depuis ses dépôts jusqu’à leur destination finale – ce qui implique qu’aucun stockage ne sera nécessaire au-delà des boîtes.

Photo d’illustration : de la neige carbonique. (Crédit : nikkytok via iStock by Getty Images)

Mais ce n’est pas la même histoire en Israël. Les populations vivent dans des localités plus petites et les dispensaires locaux auront besoin d’un nombre moindre de doses que n’en transportent les conteneurs à neige carbonique, avec une capacité de cent vaccins. L’approvisionnement dépendra des calendriers de vol prévus, et il est impossible, ou très compliqué tout du moins, de synchroniser les calendriers de livraison et de vaccination de manière à ce que toutes les doses puissent être injectées dans les deux semaines suivant leur date de départ de l’Europe (avec, dans le meilleur scénario, dix jours passés dans la boîte réfrigérée et cinq jours dans un frigidaire médical).

Une telle synchronisation est d’autant plus difficile que chaque personne doit recevoir deux doses de vaccin – la seconde intervenant 21 jours après la première. Ce qui ne laisse aucune place à des perturbations qui seraient entraînées par des facteurs inattendus.

La période de refroidissement, dans les boîtes, peut être prolongée – mais cela nécessiterait des réserves de neige carbonique copieuses dont Israël ne dispose pas actuellement. Une possibilité serait que l’Etat investisse massivement dans des structures de production de neige carbonique, qui seraient stratégiquement réparties dans tout le pays.

Le siège de Pfizer à New York City, le 9 novembre 2020. (Crédit : David Dee Delgado/Getty Images/AFP)

Et pourtant, les experts doutent du fait que les boîtes, remplies constamment de neige carbonique, soient la solution. Pour un stockage pendant des semaines, voire des mois, les boîtes de Pfizer ne pourront probablement pas fournir le même niveau de fiabilité que les congélateurs super-froids, tout défaut dans l’approvisionnement de neige carbonique pouvant entraîner la perte de séries entières de vaccin.

Le plus sûr, pour Israël, est de lancer immédiatement le développement de la production de neige carbonique, de construire des congélateurs spéciaux, et de développer les infrastructures nécessaires pour livrer les vaccins à leur lieu de destination.

Au Royaume-Uni, la Public Health England a fait savoir que des « préparatifs nationaux » étaient en cours concernant le stockage central et la distribution des doses dans tout le pays.

Il reste maintenant à voir si l’Etat juif saura se montrer à la hauteur du défi prévu ou si le pays, comme il le fait de plus en plus, échouera, passé l’effet d’annonce, à mettre en place le suivi d’une initiative pourtant déterminante.

Quand le monde évoquait le fort potentiel des tests sérologiques pour empêcher la propagation du virus, le ministère de la Santé avait acheté 2,4 millions de kits pour dépister les citoyens et déterminer s’ils avaient d’ores et déjà attrapé la maladie – une acquisition faite à un coût de 112 millions de shekels. Mais le contrôleur de l’Etat d’Israël a récemment expliqué que, des mois plus tard, aucun plan n’avait été mis en place concernant leur déploiement et que seulement 60 000 avaient été pour le moment utilisés.

Des techniciens réalisent un test du coronavirus dans un laboratoire au centre de santé Leumit à Or Yehuda, le 14 juillet 2020. (Yossi Zeliger/Flash90)

Et si les professionnels de la médecine soulignent depuis des mois que le suivi des contacts, pour les malades, est essentiel pour couper la chaîne des infections, le développement de ce suivi a été lent. Presque tous les membres de la communauté médicale convienne que cette traçabilité est un outil qui permet de sauver des vies, mais le contrôleur de l’Etat a, dans ce domaine-là également, estimé que le système n’avait été que médiocrement déployé, que peu de patients étaient suivis et que ce type d’enquête était souvent réalisée trop tard pour être efficace.

Si Israël échoue à se préparer convenablement pour recevoir les vaccins, ce manque de préparation pourrait entraîner des blocages, des retards et le gaspillage d’innombrables doses.

Avec ses antécédents médiocres au niveau organisationnel et une tendance à une prise de décisions engluée dans les lourdeurs administratives, il est fort possible que le gouvernement puisse finir par être à l’origine de retards de vaccination dans le pays. Les accords pour les vaccins sont une bonne chose et ils sont réjouissants, mais au-delà des liquidités que l’Etat juif versera aux géants pharmaceutiques, le pays devra, de son côté, se montrer à la hauteur de l’aubaine.

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