Dans le nord d’Israël, « la seule solution », c’est la guerre, dit le maire de Metula
Les habitants craignent une attaque transfrontalière de la part du groupe terroriste ; un responsable de la sécurité d'une ville déclare que "tout a changé" après le 7 octobre, "parce que nous avons compris que l'invasion constituait une véritable menace"

David Azoulay est l’homme des mauvaises nouvelles. C’est lui qui appelle ses administrés déplacés, pour leur annoncer qu’une roquette tirée par le groupe terroriste islamiste libanais du Hezbollah s’est écrasée sur leur maison désertée de Metula, dans le nord d’Israël.
Et aujourd’hui, le maire de Metula ne voit pas d’autre solution qu’une guerre totale pour faire disparaître la menace. « Nous n’avons pas d’autre choix », dit-il.
David Azoulay, 57 ans, vit seul dans cette petite localité bordée au nord, à l’ouest et à l’est par le Liban, et vidée de ses quelque 2 000 habitants depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas en octobre.
Il s’est senti obligé de rester pour recenser les dommages infligés par les tirs quasi quotidiens sur le nord d’Israël du Hezbollah, allié du groupe terroriste islamiste palestinien du Hamas.
M. Azoulay dort dans un abri la nuit et constate les dégâts le jour : 130 maisons sur 650 touchées par des tirs depuis le 7 octobre, date de l’attaque sanglante du Hamas contre Israël qui a entraîné la guerre à Gaza. Et qui fait redouter une escalade régionale du conflit, particulièrement avec le Liban.
Pour lui, il faut maintenant engager complètement le combat contre le Hezbollah afin de le chasser de la frontière. Israël et la milice du groupe terroriste chiite libanais allié de l’Iran échangent des tirs meurtriers, mais n’ont jamais franchi jusqu’à présent le seuil de déclenchement de la guerre.
Depuis le 8 octobre, les forces dirigées par le Hezbollah ont attaqué presque quotidiennement des communautés israéliennes et des postes militaires le long de la frontière, le groupe affirmant qu’il le fait pour soutenir Gaza dans le cadre de la guerre qui s’y déroule.
Le Hezbollah a nommé 244 membres qui ont été tués par Israël au cours des accrochages en cours, principalement au Liban, mais aussi en Syrie. Au Liban, 42 autres agents d’autres groupes terroristes, un soldat libanais et au moins 30 civils, dont trois journalistes, ont été tués.
En Israël, selon l’armée, dix soldats et sept civils ont péri.
Les échanges de tirs ont déplacé des dizaines de milliers de personnes des deux côtés de la frontière.

La guerre, « c’est la seule solution pour que les habitants reviennent en sécurité », explique M. Azoulay lors d’une visite organisée cette semaine par les autorités israéliennes.
« Offensive de printemps »
Paris et Washington multiplient les missions au Liban et en Israël pour faire baisser la pression, mais Sarit Zéhavi, ex-officier dans le renseignement militaire israélien, estime qu’un accord ne fera pas disparaître les menaces posées par le Hezbollah.
« L’idée d’un accord de cessez-le-feu qui n’éliminerait pas les capacités du Hezbollah m’empêche de dormir », déclare Mme Zéhavi lors d’une briefing pendant le voyage de presse. Selon elle, la stratégie du Hezbollah est d’entraîner Israël dans la guerre plutôt que de la déclencher. Elle craint aussi d’éventuelles infiltrations de terroristes du mouvement chiite.
Mais pour Hamish Kinnear, analyste Moyen-Orient au cabinet de conseil en évaluation des risques Verisk Maplecroft, « il est peu probable que le Hezbollah veuille une guerre totale », le mouvement préférant fonder sa stratégie sur la surprise, « essentielle dans un conflit asymétrique ».
Une guerre à grande échelle déclenchée par Israël est également « improbable », le pays préférant « concentrer ses ressources sur le combat contre le Hamas » à Gaza, dit-il à l’AFP.

En revanche, Hussein Ibish, de l’Arab Gulf States Institute, basé à Washington, estime que c’est Israël – et non le Hezbollah – qui pousse à l’escalade, en menant des frappes de plus en plus en profondeur au Liban, comme récemment à Baalbek, à une centaine de kilomètres de la frontière.
Selon lui, il y a des signes d’une « offensive de printemps » israélienne au Liban.
« Israël veut créer l’impression que cette guerre est inévitable pour sécuriser le nord », affirme-t-il.
La guerre à Gaza a éclaté lorsque le Hamas a envoyé 3 000 terroristes armés en Israël, le 7 octobre, pour mener une attaque brutale au cours de laquelle ils ont tué près de 1 200 personnes. Les terroristes ont également pris en otage 253 personnes, pour la plupart des civils, et les ont emmenées à Gaza. Israël a réagi en lançant une campagne militaire dont l’objectif vise à détruire le Hamas, à l’écarter du pouvoir à Gaza et à libérer les otages.
Plus de 31 000 personnes seraient mortes à Gaza depuis le début de la guerre, selon le ministère de la Santé dirigé par les terroristes du Hamas. Les chiffres publiés par le groupe terroriste sont invérifiables, et ils incluraient ses propres terroristes et hommes armés, tués en Israël et à Gaza, et les civils tués par les centaines de roquettes tirées par les groupes terroristes qui retombent à l’intérieur de la bande de Gaza. L’armée israélienne affirme avoir tué plus de 13 000 membres du groupe terroriste à Gaza, en plus d’un millier de terroristes à l’intérieur d’Israël le 7 octobre et dans les jours qui ont suivi l’assaut.

« Nous méritons la paix »
Et pourtant, à Kiryat Shmona, autre localité du nord vidée de ses habitants, le responsable chargé de la sécurité Ariel Frisch raconte combien les choses ont changé depuis le 7 octobre.
« Le 6, nous pouvions encore aller à Metula, voir les positions du Hezbollah de l’autre côté de la frontière, et rigoler. On se disait: ‘Ils ont des armes, et alors ? Nous avons l’armée israélienne, nous sommes en sécurité' », se souvient-il.
Après l’attaque du Hamas dans le sud d’Israël, « tout a changé car nous avons compris qu’une invasion était une menace réelle », dit-il, en estimant que cette menace doit être « éliminée » pour permettre un retour à la normale.
« Nous voulons la paix, nous la méritons. Ce que nous avons là, ce n’est pas la paix, ce n’est pas une vie ».