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Dans l’Est de la France, un lac infesté de munitions attend sa libération

Non loin des zones de baignade du lac de Gérardmer, sont enfouis toutes sortes d'explosifs des Première et Seconde Guerre mondiales

Un cylindre de fer repose au fond du lac de Gerardmer, dans l'Est de la France, le 20 septembre 2024. (Crédit : Olivier MORIN / AFP)
Un cylindre de fer repose au fond du lac de Gerardmer, dans l'Est de la France, le 20 septembre 2024. (Crédit : Olivier MORIN / AFP)

Quatre-vingts ans après la Libération de la France du joug nazi, un lac du massif des Vosges, dans l’Est du pays, cache encore dans ses tréfonds plusieurs dizaines de tonnes de munitions, issues des deux guerres mondiales.

A 660 mètres d’altitude, au milieu des montagnes et à proximité d’un bourg charmant, le lac de Gérardmer est prisé des touristes qui s’y baignent l’été. Son eau est ponctuellement puisée pour être redistribuée dans le réseau d’eau potable de la ville.

Mais non loin des zones de baignade sont enfouis toutes sortes d’explosifs des Première et Seconde Guerre mondiales.

Ces déchets se comptent par milliers en France, selon l’association française Robin des Bois, la première à en avoir dressé un inventaire national, dès 2001.

Entre 1977 et 1994, 12 campagnes de déminage ont eu lieu dans le lac, à la suite d’un accident au cours duquel un homme s’était brûlé avec une grenade au phosphore.

Le nettoyage a été effectué entre zéro et dix mètres de profondeur au bord du lac, explique à l’AFP Pierre Imbert, adjoint au maire et ancien chef de centre des sapeurs-pompiers de Gérardmer.

L’ancien plongeur se souvient: « 120 tonnes de munitions ont été retirées, ce qui représente à peu près 100.000 pièces de diverses munitions de 14-18 et de 39-45 ».

Un cylindre de fer repose au fond du lac de Gerardmer, dans l’Est de la France, le 20 septembre 2024. (Crédit : Olivier MORIN / AFP)

Déposées en cachette

Quand les démineurs allaient récupérer ces munitions, ils les remontaient à la surface puis « séparaient le détonateur des charges explosives et allaient faire exploser ça au bout du lac », se remémore M. Imbert.

Sur des photos qu’il a conservées, on peut voir « des grenades artisanales de 1914-1918, ou des choses plus récentes de 1939-1945 et même une petite hache ».

Les campagnes ont pris fin car elles auraient été plus difficiles loin du rivage et plus en profondeur sous la vase, selon un courrier de la préfecture envoyé à Robin des Bois, qui estime qu’il reste encore 70 tonnes immergées à Gérardmer.

Pour M. Imbert, « on ne peut pas évaluer la quantité de munitions qui reste envasée » jusqu’à 30 mètres de profondeur.

Aurélie Mathieu, présidente de l’association locale éco-tourisme AKM, plaide pour « décontaminer tout ce qui est au bord » du lac.

Des décennies après le dépôt de ces munitions par l’armée française, qui demandait à ses soldats de le faire de nuit en cachette, les prélèvements réalisés en 2023 par une autre association, Odysseus 3.1, ont montré que ces armes généraient une pollution.

Lors d’une plongée, Odysseus 3.1 a découvert des grenades, certaines « intactes », d’autres « éventrées, laissant échapper l’explosif qu’elles contenaient », expliquait son fondateur, Lionel Rard, dans le documentaire « Vert de Rage » diffusé en mai sur France 5, une chaîne publique.

Taux de TNT élevé

Les résultats des prélèvements, envoyés à un laboratoire en Allemagne, montrent des taux de TNT parmi « les plus élevés jamais mesurés par l’équipe de chercheurs allemands » ainsi que des concentrations de « fer, plomb, titane au-delà des normes », selon l’émission.

Informé de ces résultats, le maire de Gérardmer, Stessy Speissmann-Mozas, a saisi les autorités, l’Agence régionale de santé (ARS) et la préfecture des Vosges.

« Ni l’ARS Grand Est ni l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, ndlr) n’ont été associées à ces investigations, et nous n’avons aucune précision sur les méthodes de prélèvement et d’analyse utilisées », a indiqué la préfecture à l’AFP.

Une nouvelle campagne de prélèvements, en février, a été lancée par les services de l’Etat, « impliquant plusieurs laboratoires français et allemands ». « Les premiers résultats ont confirmé les conclusions des campagnes précédentes: aucune teneur préoccupante n’a été détectée », selon la préfecture, qui affirme qu’à ce jour « aucun risque sanitaire n’a été identifié » ni pour la consommation humaine, ni pour la baignade.

Malgré ces résultats, le maire souhaite un changement dans la règlementation de l’eau potable: « S’il y a un danger pour les populations avec cette molécule-là (le TNT, ndlr), il faut une évolution législative pour que ce soit pris en compte et testé dans la qualité de l’eau ».

Une société a spontanément proposé ses services pour cartographier et identifier les déchets. Un travail à « près de 300.000 euros » qui pourrait être intéressant… s’il était financé par l’Etat, dit l’élu, qui rappelle que « c’est l’armée française qui a déposé ces munitions ».

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