Des anciens dirigeants d’un pipeline d’État condamnés pour la pollution du Zin
Le ministère de la Protection de l’environnement et les organisations environnementales se félicitent du jugement et de la responsabilité personnelle des cadres supérieurs.
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.

Un tribunal de Beer Sheva a condamné mardi l’Europe Asia Pipeline Company (EAPC) et plusieurs anciens cadres supérieurs, dont le directeur général, pour avoir pollué le cours d’eau Zin, dans le sud d’Israël, à deux reprises en 2011.
Quelques heures seulement après la publication du jugement, le ministère de la Protection de l’environnement a annoncé avoir trouvé des rapports faisant état d’odeurs nauséabondes liées à une fuite d’environ 20 000 litres de carburant au dépôt de l’EAPC à Ashkelon, sur la côte sud.
La société publique, anciennement dénommée Eilat-Ashkelon Pipeline Company, faisait l’objet d’un examen minutieux quant à son impact environnemental, dans le cadre de négociations d’un accord visant à transporter davantage de pétrole originaire des Émirats arabes unis, par voie terrestre, entre la mer Rouge et la Méditerranée.
La société avait déjà été condamnée pour la pollution de la réserve naturelle d’Evrona et du désert d’Arava en 2014, qualifiée de pire marée noire de l’histoire d’Israël. Elle avait accepté de payer 100 millions de shekels (28 millions de dollars) de dommages et intérêts à titre de réparations.
Le tribunal a déclaré mardi que l’EAPC avait été reconnu coupable de deux chefs d’accusation de pollution aggravée de l’eau avec circonstances aggravantes, de deux chefs d’accusation de déversement de déchets dangereux dans le domaine public et d’un chef d’accusation lié à la diffusion d’une odeur forte ou déraisonnable.
Yair Vida, l’ancien directeur général, Shlomo Levy, alors directeur adjoint de l’ingénierie, et Nir Savion, alors chef du projet de réparation des infrastructures au centre de l’affaire, ont été reconnus coupables de deux chefs d’accusation pour pollution de l’eau avec circonstances aggravantes et de deux chefs d’accusation pour défaut de supervision et prévention d’infractions à la loi.
Les fuites ont gravement porté atteinte au Zin, une rivière saisonnière qui s’étend sur 120 kilomètres du cratère Ramon à la plaine de Sodome, puis à l’extrémité sud de la mer Morte, sur des terrains parmi les plus accidentés du pays.

La première des deux fuites avait eu lieu à l’occasion des travaux d’entretien d’un tuyau en juin 2011 alors qu’un travailleur tentant de déterrer un arbre pour le déplacer avait heurté le tuyau, provoquant le déversement de 722 mètres cubes de carburant sur une zone plus de six hectares à l’intérieur et autour du Zin, et ce pendant plus de cinq heures.
Environ 100 mètres cubes de kérosène avaient pu être pompés dans le cadre d’une opération d’urgence et 26 500 tonnes de sol pollué retirées. Mais, selon la juge Sarah Haviv, le ruisseau et ses rives sont restés contaminés d’une manière qui a mis en danger l’aquifère sous le ruisseau, ainsi que le forage d’eau jusqu’à 25 kilomètres de distance. L’événement avait endommagé la flore et la faune, laissant en outre une odeur toxique plusieurs mois durant.

Selon l’arrêt, l’EAPC n’aurait pas veillé au respect des spécifications techniques et détails d’un ordre de travail qu’il avait lui-même rédigé. En outre, il était mal préparé à une possible fuite et Vida n’avait pas été suffisamment impliqué dans la supervision du projet.
Le ministère de la Protection de l’environnement avait ordonné l’arrêt des travaux, n’en autorisant la reprise que le 27 juillet de la même année, sous réserve de diverses conditions, l’une d’entre elles tenant à l’ensevelissement du tuyau sous un mètre de terre une fois l’entretien effectué.
Malgré cela, le 4 septembre 2011, les travailleurs chargés de l’enfouissement d’une section de tuyau au sud du Zin ne l’ont recouverte que de 37 centimètres de terre. A l’occasion de la remise en état d’un chemin voisin, les dents de la pelleteuse ont percé deux trous dans le tuyau, dispersant plusieurs centaines de millions de mètres cubes de kérosène dans le lit du ruisseau.
La maîtrise du flux avait alors été fortement ralentie par l’absence de la clé de la vanne, oubliée dans un bureau.
Le jugement avait conclu à la violation par les travailleurs d’un certain. nombre de règlements et des conditions de travail soumises par le CPEA au ministère de la Protection de l’environnement.

Le juge a une nouvelle fois conclu que l’entreprise n’était pas correctement préparée à une urgence.
Interrogé par le Times of Israël, l’EAPC s’est refusé à tout commentaire.
Le ministère de la Protection de l’environnement s’est félicité de l’issue de l’affaire pénale, intentée par son service juridique.
La Société pour la protection de la nature en Israël (SPNI) a déclaré qu’elle espérait que le jugement serait « une nouvelle étape sur la voie de la cessation des activités polluantes du CPEA ».
Amit Bracha, chef du groupe pour la justice environnementale Adam Teva V’Din, a déclaré qu’il était important que les dirigeants soient punis pour « l’activité irresponsable de l’entreprise et son mépris flagrant de l’environnement, et son importance pour la vie humaine ».
Il a accusé l’EAPC de continuer à polluer, mais a exprimé l’espoir que le procès « amènerait des changements » au sein du CPEA et d’autres entreprises qui « polluent également l’environnement au quotidien, mettant en danger la santé des personnes et des animaux ».

La SPNI, Adam Teva V’Din, et l’organisation de conservation des mers Zalul, avaient soumis une requête à la Haute Cour en mai dernier visant à annuler un protocole d’accord signé par l’EAPC et un consortium d’hommes d’affaires israéliens et émiratis pour l’acheminement du pétrole brut du Golfe à travers les ports et pipelines de l’EAPC, d’Eilat sur la mer Rouge à Ashkelon sur la Méditerranée.
Ils l’avaient retirée en décembre, après que le bureau du procureur d’État a déclaré à la Haute Cour que, du point de vue du ministère de la Justice, le ministère de la Protection de l’environnement avait pleine autorité pour agir contre l’EAPC.
Le ministère de la Protection de l’environnement s’oppose vigoureusement à l’accord, notamment en raison du risque encouru par les coraux voisins, sujet d’importance mondiale.
Il a, en septembre, limité à six le nombre maximum de pétroliers du Golfe autorisés accoster chaque année à Eilat, alors que la société en espérait trente.

La pollution présumée du Zin par une société minière de phosphate ICL, Rotem Amfert Negev Ltd., fait actuellement l’objet d’un recours collectif distinct.