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Des associations juives combattent l’utilisation en hausse d’opioïdes

En 2014, presque 30 000 personnes sont mortes d’overdose opioïde aux Etats-Unis, une hausse de 14 % par rapport à 2013 ; la hausse est aussi visible auprès des juifs américains

Eve Goldberg, dont le fils est mort d'une overdose aux opioïdes en 2013 à 23 ans, dirige maintenant une association en sa mémoire qui cherche à créer une communauté de jeunes adultes anciens toxicomanes. (Crédit : Ben Sales)
Eve Goldberg, dont le fils est mort d'une overdose aux opioïdes en 2013 à 23 ans, dirige maintenant une association en sa mémoire qui cherche à créer une communauté de jeunes adultes anciens toxicomanes. (Crédit : Ben Sales)

NEW YORK (JTA) – Isaac, le fils d’Eve Goldberg, était en panique. Il devait partir de l’université.

Isaac Goldberg Volkmar était à l’université du Rhode Island depuis moins d’un semestre en 2009, quand il a appelé sa mère, désespéré de s’enfuir. Il avait rejoint une fraternité, où ses frères lui faisaient prendre du Percocet et de l’OxyContin, des anti-douleurs. Après quelques mois, l’adolescent de New York savait qu’il était accro et avait besoin d’aide.

A partir de ce moment, Isaac a fait des allers-retours en désintoxication en Pennsylvanie et à New York. Il a fait une overdose l’été suivant sa première année d’université. A un moment, une amie de la famille a fait irruption dans l’appartement d’Eve, où elle a trouvé Isaac qui devenait bleu et l’a emmené à l’hôpital.

Isaac a grandi dans ce que sa mère appelle un foyer juif normal de Tribeca, un quartier de Manhattan. La famille n’a pas d’historique de toxicomanie, donc en 2013, quand Isaac était en réhabilitation et travaillait comme entraîneur de basket-ball à l’école internationale des Nations unies à Manhattan, Goldberg espérait que le pire était derrière lui. Il devait même emménager dans son propre appartement.

Mais Isaac a commencé à être anxieux autour de Thanksgiving. Il réveillait sa mère au milieu de la nuit en cherchant une aspirine. En décembre, Goldberg est entrée dans sa chambre et l’a trouvée inconscient, après une overdose aux opioïdes. Il est mort après six semaines de coma ; il avait 23 ans.

« Pour Isaac, une grande partie [du problème] était qu’il ne se sentait pas bien, a déclaré Goldberg. Il essayait de s’auto-médicamenter et de s’échapper. Les choses étaient mauvaises pour lui. L’école était dure pour lui. C’était une grande part de ça, essayer de s’engourdir et de ne plus sentir. »

Isaac Goldberg Volkmar, ici avec sa sœur, est mort en 2013 d'une overdose aux opioïdes. (Crédit : autorisation d'Eve Goldberg)
Isaac Goldberg Volkmar, ici avec sa sœur, est mort en 2013 d’une overdose aux opioïdes. (Crédit : autorisation d’Eve Goldberg)

L’année dernière, Goldberg a fondé BigVision, une communauté pour les jeunes adultes en rémission d’une addiction, où les participants se rassemblent deux fois par mois pour faire du kart, du tricot ou du basket-ball. C’est l’une des nombreuses initiatives juives du pays pour lutter contre les addictions, particulièrement contre la hausse de l’abus d’opioïdes dans tout le pays.

Les décès dus aux opioïdes, des anti-douleurs sur prescription comme l’OxyContin aux substances contrôlées par l’héroïne, ont augmenté aux Etats-Unis depuis 2000, selon le Centre de contrôle et de prévention des maladies. En 2014, presque 30 000 personnes sont mortes d’une overdose opioïde aux Etats-Unis, une hausse de 14 % par rapport à l’année précédente. Et bien que les données pour les juifs américains soient difficiles à obtenir, les statistiques montrent une hausse ici aussi.

Plus de 20 juifs orthodoxes sont mort d’overdose aux opioïdes depuis Rosh Hashana dernier dans la région de New York, selon Zvi Gluck, qui dirige Amudim, une organisation qui aide les toxicomanes à trouver un traitement. A Beit T-Shuva, un centre juif de réhabilitation à long terme de Los Angeles, les candidatures ont augmenté de 50 % l’année dernière, passant de 400 – 500 à 600 – 800, ce que le rabbin Mark Borovitz, le rabbin principal du centre, attribue aux addictions aux opioïdes.

Borovitz et Gluck disent tous les deux que les juifs américains de classe moyenne typiques sont plus susceptibles à l’addiction aux opioïdes parce que les anti-douleurs sont accessibles dans un environnement sûr, où les drogues dures ne sont sinon pas présentes. Borovitz, comme Goldberg, attribue également la hausse de ces abus à la sur-prescription des médicaments.

Le journal JAMA Psychiatry annonce que l’usage d’héroïne n’est plus un problème urbain concernant les minorités, mais qu’il « touche de plus en plus les hommes et femmes blancs entre 25 et 30 ans vivant en-dehors des grandes zones urbaines ». L’usage d’héroïne est aussi en hausse parce que les opiacés sont moins chers et souvent plus facile à obtenir que les opioïdes, qui sont délivrés sur prescription.

« Nous avons des accros aux opiacés tout le temps », a déclaré Borovitz, dont la femme, Hariet Rossetto, a fondé Beit T’Shuva il y a 30 ans. « Les médecins les rendent accros à tous les opiacés, OxyContin, etc., et ensuite ils se tournent vers l’héroïne. »

Operation Survival (opération survie), qui essaie d’empêcher les abus de drogues dans les communautés Habad-Loubavitch et non juive du quartier de Crown Heights, à Brooklyn, depuis 1988, a lancé en mai un programme de prévention des overdoses aux opioïdes. Le programme forme des personnes à administrer de la Naloxone, un médicament qui bloque ou inverse les effets d’une overdose aux opioïdes s’il est donné assez rapidement.

« Vous donnez de la Naloxone, ça ne peut qu’aider », a déclaré le directeur du programme d’Operation Survival, Yaacov Behrman. « Si quelqu’un fait une overdose et que vous avez accès à de la naloxone, dans ces cinq minutes vous pouvez sauver la vie d’une personne. »

Divers autres groupes proposent aussi des réponses juives à l’addiction en général et aux opioïdes en particulier. A Brooklyn, la Fondation Safe donne des conférences dans les écoles juives sur les dangers de l’addiction à la drogue et au jeu, et propose un traitement ambulatoire. Le centre de traitement résidentiel du Habad de Los Angeles soigne des hommes toxicomanes. Dans le sud-est de la Pennsylvanie, le rabbin Yosef Lipsker est conseiller en addiction au centre de traitement Caron, où il a fourni des ressources religieuses et des conseils à 5 000 patients juifs depuis 1999.

Les juifs orthodoxes luttant contre les addictions disent qu’alors que la communauté orthodoxe avait pour habitude de nier que la toxicomanie soit un problème, plus de personnes ont cherché un traitement quand les morts par overdoses se sont répandues. Gluck a déclaré que bien qu’une communauté insulaire puisse perpétuer le problème en essayant de le cacher, la communauté peut aussi proposer un soutien plus fort une fois que le problème est reconnu.

« Il y a 15 ans, c’était très largement sous le tapis, a-t-il déclaré. On n’en parlait vraiment pas. [Maintenant,] beaucoup de rabbins sont plus familiers avec ça. Tout le monde connaît quelqu’un. Vous ne pouvez plus dire que ça n’existe pas dans notre communauté. »

Certains des conseillers juifs ajoutent une nuance juive au processus de guérison. Lipsker a des patients juifs chez lui chaque semaine pour le repas du vendredi soir, et fournit de la nourriture casher aux patients observants. Borovitz raconte la paracha de la semaine dans son sermon hebdomadaire, traçant un lien, par exemple, entre la rencontre de Dieu et Adam dans le jardin d’Eden et la reconnaissance de son problème par un toxicomane.

« L’une des choses que font les toxicomanes, c’est de s’isoler, de se déconnecter de leur famille et de leurs amis, de perdre ce qu’ils avaient en terme de spiritualité, a dit Lipsker. Dans une institution, vous pouvez leur rapporter avec la chaleur d’un foyer juif. »

Eve Goldberg espère faire grandir BigVision jusqu’au point où elle pourra ouvrir un centre communautaire permanent pour les anciens toxicomanes à New York. Son groupe est ouvert aux juifs et aux non juifs, mais pour elle, les parents juifs de toxicomanes devaient être plus ouverts pour reconnaitre l’addiction aux opioïdes et chercher de l’aide pour leurs enfants.

« Les parents juifs, les parents qui viennent d’une bonne catégorie socio-professionnelle, les personnes comme ça veulent que tout semble parfait, donc ils ne parlent pas des choses, a-t-elle dit. Je pensais que l’héroïne, c’était le pire. Ça ne l’est pas. »

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