Des chercheurs du Technion s’attaquent au biofilm pour affaiblir la salmonelle
L'équipe de chercheurs a utilisé des composés déjà cliniquement testés pour le traitement d'Alzheimer et ont réussi à inhiber la formation du biofilm qui protège la bactérie
Les chercheurs en biologie de l’Institut israélien de la Technologie, le Technion de Haïfa, ont annoncé avoir trouvé un moyen de réduire l’agressivité de l’infection bactérienne à salmonelle en inhibant la formation de biofilm, une couche de micro-organismes qui permettent à la bactérie d’adhérer aux surfaces.
Le biofilm est une couche résistante de micro-organismes qui se forme et adhère à plusieurs surfaces. Cette couche constitue un problème médical et environnemental majeur parce qu’elle protège les bactéries et leur permet d’adhérer aux tissus, aux dispositifs médicaux, aux tuyaux, à l’épiderme et aux surfaces.
Les scientifiques – la professeure associée Meytal Landay, le doctorant Nir Salinas et l’équipe de recherche du laboratoire – espèrent désormais que leur découverte permettra de développer de nouveaux traitements pour lutter contre les infections virulentes sans créer de résistance antibiotique, a déclaré le Technion dans un communiqué.
« Si l’on réduit le biofilm, la bactérie devient moins agressive », a déclaré Landau dans un entretien téléphonique. C’est le biofilm qui permet à la bactérie de s’accrocher sur des surfaces, de la peau ou des cathéters, a-t-elle dit.
« La diminution du biofilm réduit donc l’agressivité de l’infection. »

Laudau a souligné que l’étude n’avait été menée qu’in vitro – en laboratoire – et pas encore sur des souris ni des humains.
La salmonellose est souvent associée à l’eau ou à la nourriture contaminée. La plupart des personnes infectées développent de la diarhée, de la fièvre et des crampes abdominales entre 12 et 72 heures après l’infection, selon le Centers for Disease Control and Prevention.
La plupart des personnes touchées guérissent sans traitement au bout d’une semaine, mais si l’infection se propage dans le sang, elle peut être fatale si le patient ne reçoit pas immédiatement des antibiotiques.
Dans leurs travaux, les chercheurs ont décidé de ne pas s’attaquer directement mais au biofilm, la couche résiliente qui protège la bactérie des substances qui la mettent en danger, notamment les médicaments antibiotiques. Cette approche réduit le risque que la bactérie ne développe une résistance, ce qui arrive souvent quand une bactérie est ciblée par des antibiotiques, déclenchant alors un mécanisme de défense contre le médicament et rendant la bactérie encore plus résiliente et virulente au lieu de l’affaiblir.
Dans leur étude, publie dans PLoS Pathogens, les chercheurs du Technion ont décidé, sur la base de leur précédente recherche, d’interférer avec les fibrilles amyloïdes produites par la bactérie de la salmonelle. Les études précédentes ont montré que ces fibrilles sont capables d’attaquer les cellules T des systèmes immunitaires. Ces fibrilles protègent la bactérie et l’aident à adhérer, a expliqué Landau.
Ces même fibrilles se retrouvent dans d’autres bactéries, comme E coli ou le staphylocoque doré, une bactérie particulièrement agressive qui est devenue résistante à de nombreux antibiotiques et qui est responsable de nombreuses infections en milieu hospitalier.
Ces fibrilles toxiques ressemblent à l’amyloïde, les protéines associées aux maladies débilitantes, notamment Alzheimer ou Parkinson, mais elles différent dans leur structure, a précisé le Technion.

Pour leurs travaux, les scientifiques ont décidé de donner une nouvelle fonction aux substances ou aux composés qui ont déjà été cliniquement testés pour le traitement d’Alzheimer, pour voir s’ils pouvaient entraver les mécanismes de défense de la bactérie et leur capacité à adhérer aux tissus et aux dispositifs médicaux. Et ils ont réussi.
« Quand nous avons ajouté les composés aux bactéries de la salmonelle, cela a empêché la croissance de biomasses, réduisant ainsi l’agressivité de l’infection », a déclaré Landau. « Les composés ont réduit la biomasse du biofilm. »
L’avantage majeur de réutiliser des substances utilisées dans des essais cliniques pour le traitement d’Alzheimer est que le processus d’approbation sera bien plus court et moins coûteux que s’il s’agissait d’un nouveau composé, ont indiqué les chercheurs.
Landau a déclaré qu’elle espérait que cette découverte sera également efficace dans la lutte contre le biofilm d’autres bactéries, en affaiblissant la bactérie elle-même, notamment le staphylocoque doré.
La recherche est menée en collaboration avec l’Institut des Systèmes complexes de Jülich et de Düsseldorf, en Allemagne. Le Centre pour la biologie structurale du Technion(TCSB), le Centre interdisciplinaire pour les sciences de la vie et le génie Lorry Lokey, le Centre de microscopie électronique et le Centre de microscopie électronique de la matière molle du Russell Berrie Nanotechnology Institute (RBNI) ont également contribué au projet, selon le communiqué.